AN. 1303. . XXXIII. garet en Ita lie. Differ.p.175. licences qu'ils doneront au préjudice de cette défenfe. Ces quatre bulles font du même jour quinziéme d'Août 1303. Enfin par une derniere dattée du vingtcinquième du même mois d'Août, le pape referve à fa difpofition toutes les églifes cathedrales & regulicres, c'eft-à-dire les évêchez & les abaïes du roïaume de France, qui vaquent ou vaqueront jufqu'à ce que le roi revienne à l'obéïssance du saint fiége: défendant étroitement à tous ceux qui ont droit d'élection ou de confirmation en ces prélatures, d'en faire aucun usage fous peine de nullité. Pendant que le pape Boniface publioit ces bulles, G. de No- il ne favoit pas que Guillaume de Nogaret étoit en Italie; & travailloit fecrettement à le prendre pour le Jo. Villani. mener à Lion, où se devoit tenir le concile. Car le roi lib.v111.c.63. Philippe par le confeil d'Etiene Colonne & d'autres Italiens habiles, envoïa Guillaume de Nogaret avec up autre chevalier nommé Jean Moufchet & deux docteurs. Leur commiflion est dattée de Paris le feptiéme de Mars 1302. c'est-à-dire 1303. avant pâque, & porte que le roi les envoïe en certains lieux pour quelques affaires, leur donant plein pouvoir de traiter avec toutes fortes de perfones: faire avec eux les alliances & confédérations convenables & promettre les fubfides & fecours reciproques. Avec cette commission les envoïés avoient des lettres de change pour recevoir de groffes fommes d'argent, fans que les marchands fur qui elles étoient tirées fuffent l'emploi qu'on en vouloit faire. Etant arrivés en Tofcane à un château qui apartenoit à Moufchet, ils s'y arrêterent long-temps envoïant des agents & des lettres en divers lieux & faifant fecretement venir à eux ceux avec lesquels ils negocioient. Cependant ils difoient AN. 1303. aux gens du païs, qu'ils étoient venus traiter un accord entre le pape & le roi de France ; & fous ce prétexte ils concerterent les moïens de prendre le pape à Anagni où il s'étoit retiré avec les cardinaux & toute fa cour, croïant y être plus en fûreté qu'ailleurs, parce que c'étoit fa patrie, & il y demeuroit dans fa maison. Differ.p.1824 Il y composoit une derniere bulle qu'il vouloit publier le jour de la nativité de la Vierge huitiéme de Septembre, où il dit, que comme vicaire de J.C. il a le pouvoir de gouverner les rois avec de fer la verge & les brifer comme des vaiffeaux de terre: mais que comme un bon pere il fe contente d'ufer d'une correction falutaire. Que pour cet effet il a premierement envoïé au roi Philipe le nonce Jaques des Normans, enfuite le cardinal le Moine, qui étant François & ami du roi étoit zelé pour fon falut. Mais, P. 1847 ajoûte-t'il, le roi l'a traité encore plus ignominieufement que le nonce, comme le cardinal lui-même nous l'a mandé : refusant l'abfolution qu'il lui offroit de notre part, & lui donant des gardes pour l'empêcher d'aller où il vouloit, & de recevoir ceux qui venoient à lui. Le pape rapelle encore les violencès qu'il prétend avoir été faites aux prélats par le roi pour les empêcher d'aller à Rome, & pour les faire adherer à fon apel: puis il conclut que le roi a manifestement encouru les excomunications portées par plufieurs canons: que par confequent il ne peut plus conferer de benefices, quand même il en auroit quelque droit, ni exercer aucune jurifdiction par foi ou par autrui, fous peine de nullité; ses vaffaux & tous les sujets p. 185. AN. 1303. P. 186. XXXIV. niface & fa mort. c. 63. font abfous de la fidelité qu'ils lui doivent, même par ferment, & nous leur défendons, ajoûte le pape, fous peine d'anathême de lui obéïr & lui rendre aucun fervice. Nous déclarons nulles toutes les confédérations qu'il pouroit avoir faites avec d'autres princes; & nous ordonnons que cette fentence foit affichée dans l'églife cathedrale d'Anagni, afin que le roi ni aucun autre n'en prétende caufe d'ignorance. Mais le jour précedent de la publication de cette Prife de Bo- bulle, c'eft-à-dire le famedi feptiéme de Septembre 1303. dès le matin Guillaume de Nogaret entra dans Diff. p.310. Anagni avec Sciarra Colonne & quelques feigneurs J. Villani. du païs. Ils menoient trois cens chevaux & grand nombre de gens de pied de leurs amis & païés par le roi de France, dont ils portoient les enfeignes en criant: Meure le pape Boniface & vive le roi de France. Nogaret s'adreffa au capitaine & au podestà & Anagni, demandant leur fecours qu'ils lui accorderent: ainfi le peuple fe joignit à eux & ils fe rendirent maîtres de la ville, & enfuite du palais du pape aprés quelque refiftance. Les cardinaux épouvantés s'enfuirent & se cacherent: mais on prétend que quelques-uns étoient d'intelligence avec les François. La pluspart des domeftiques du pape s'enfuirent auffi. Pour lui fe voïant ainfi furpris & abandonné il se crut mort, & dit: Puifque je fuis trahi comme J. C. je veux au moins mourir en pape; & fe fit revêtir de la chape, qu'on apelloit alors le manteau de faint Pierre, prit en tête la tiare, qu'on nommoit la courone de Constantin, & à fes mains les clefs & la croix & s’affit ainsi sur la chaire pontificale. La refiftance que trouva Nogaret dans la maifon du pape & dans quel 247. n. 46. P. 248.n.54. p. ques autres fut cause qu'il ne put parvenir à lui parler AN. 1303. que vers le foir. Alors en prefence de plufieurs per- Differ. p. fones de probité, il lui déclara publiquement la cause de fa venue, lui expliquant la procedure faite en France & l'accufation formée contre lui : fur laquelle ne s'étant point défendu il étoit reputé convaincu, Toutefois, ajoûta-t'il, parce qu'il convient que vous foïés declaré tel par le jugement de l'église, je veux vous conferver la vie contre la violence de vos ennemis, & vous representer au concile general que je vous requiers de convoquer ; & fi vous refufez de fubir fon jugement, il le rendra malgré vous, vû principalement qu'il s'agit d'herefie. Je prétends auffi empêcher que vous n'excitiés du fcandale dans l'églife, principalement contre le roi & le roïaume de France, & c'eft par ces motifs que je vous donne des gardes pour la défense de la foi & l'interêt de l'églife: non pour vous faire infulte ni à aucun autre. Sciarra Tho. ValColonne qui étoit prefent chargea le pape d'injures, fing. hist.p. & voulut l'obliger de renoncer au pontificat: mais il le refusa constamment difant qu'il perdroit plutôt la vie, & offrant sa tête à couper. 87. Dans le tumulte qui se fit en forçant la maison du pape, on pilla ses meubles & fon trefor qui étoit grand; & fa perfone demeura à la garde des François le refte du famedi, le dimanche entier jour de la nativité de la Vierge & le lundi neuviéme de Septembre jufqu'à l'heure de prime ou fix heures du matin. Alors les habitans d'Anagni fe repentant d'avoir abandoné le pape, se fouleverent contre les François, prirent les armes & fe mirent à crier : Vive le pape & meurent les traîtres; & comme ils étoient en c.63. J. Villani.. bien plus grand nombre, ils les chafferent aisément AN. 1303. du palais & de la ville: non toutefois fans refiftance, en forte que plufieurs François y furent tués. Le pape se voïant ainsi delivré & fes ennemis chaffés, n'en fut pas plus réjoüi, tant il étoit outré du dépit d'avoir été pris. Il partit auffi-tôt d'Anagni avec toute fa cour & vint à Rome à S. Pierre, où il prétendoit af-. fembler un concile & fe vanger hautement contre le roi de France de l'injure faite à lui & à l'église. Mais il tomba malade de chagrin & mourut le onzième d'Octobre 1303. aprés avoir tenu le S. fiége huit ans neuf mois & dix-huit jours. Il fit en mourant fa proRain. n. 42. feffion de foi, & fut enterré à S. Pierre dans une riche chapelle qu'il avoit fait faire à l'entrée de l'églife. XXXV. pape. 2.45. Le S. fiége ne vaqua que dix jours, c'est-à-dire le Benoift XI. moins qu'il étoit poffible. Car alors on obferva pour Papebr.p.69. la premiere fois le reglement prefcrit par Gregoire Rain. 1303. X. renouvellé par Celestin V. & confirmé par Boniface VIII. de n'entrer en conclave pour l'élection du pape que neuf jours aprés la mort du prédecesseur. Or en cette occafion dés le lendemain que les cardinaux y furent entrés, c'est-à-dire le vingt-deuxième d'Octobre, ils élurent tout d'une voix Nicolas de Trevife cardinal évêque d'Oftie, qui fut facré le Dimanche fuivant vingt-feptiéme du même mois, & prit le nom de Benoist XI.mais il ne tint le S. fiége que huit mois. J.Vill. VIII. Il étoit de petite naiffance fils d'un notaire de Trevife nommé Boccafio Boccafini, & fut élevé à Venife, où étant jeune clerc il gagna fa vie pendant quelque temps à inftruire des enfans. Puis il entra dans l'ordre des freres Prêcheurs où il se distingua tellement C. 66. S.Anton.to. 3. P. 263. |