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SES DE

DAME.

tiques de devotion, en vifitant les Hôpitaux & les prifons, RELIGIU & foulageant par fes aumônes les pauvres honteux & man- L'ORDRE dians: mais la providence qui l'avoit mise sous la direction DE NOTREdes Jefuites; la fit bien-tôt elle-même Directrice de quelques Filles, dont elle gagna le cœur par l'éclat de fes vertus, & par les charmes de fes entretiens, dans lesquels, quand l'occafion s'en préfentoit, clle leur infinuoit toûjours quelque chofe du deffein qu'elle méditoit.

Les Peres de Borde & Raimond,auffi Jefuites,& du même College de Bourdeaux, cherchant les moïens de remedier au mal que caufoient les Ecoles publiques des Heretiques, où l'on enfeignoit les jeunes filles, fouhaitoient que l'on pût établir un Ordre de Religieufes fur le modele des Jefuites, dont elles imiteroient la fin & les pratiques, afin que cet Ordre fût élevé comme une nouvelle Fortereffe pour réfifter à l'Herefie, & ouvrir par ce moïen un afile de fainteté à toutes les filles qui y feroient appellées, & une Ecole de Doctrine Chrêtienne à toutes les autres. Ces deux Religieux aïant entendu parler des rares vertus de la Marquife de Montferrant, & de l'ardent defir qu'elle avoit pour la retraite & pour l'établiffement d'une Maison Religieufe, allerent la trouver, & lui expoferent leur deffein, & le grand merite qu'elle s'acquereroit auprès de Dieu, fi elle vouloit entreprendre l'établiffement de cet Ordre, dont la fin & l'inftitut feroient fi utiles au prochain & fi avantageux à la Religion Catholique. Cette Dame fut bien furprise de voir fes vœux exaucés: elle leur avoüa qu'il y avoit plufieurs années qu'elle avoit formé le même deffein dont ils lui parloient, & qu'elle n'attendoit que le moment favorable pour l'executer. Elle laiffa toute la conduite de l'entreprise au Pere de Borde, & il fe trouva en peu de tems neuf ou dix filles difpofées à s'unir à nôtre sainte veuve, tant de celles à qui elle avoit déja parlé,comme nous avons dit,que de quelques autres que le Pere de Borde dirigeoit. Elles la reconnurent pour leur Chef, & fe firent un honneur de la fuivre & de lui obéïr. Mais avant que de rien entreprendre, elles firent par le confeil du Pere de Borde une retraite de dix jours, afin d'attirer fur elles les graces dont elles avoient befoin dans cette fainte entreprise.

Tandis que le Saint-Efprit communiquoit fes lumieres &

RELIGIEU. répandoit les graces & les vertus dans les ames de ces faintes ES DE Solitaires, leur Directeur compofoit en particulier les Regles DE NOTRE- de leur Institut fur le modele des Conftitutions de S. Igna

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ce, dont il prenoit la fin, l'efprit, & les pratiques autant qu'elles pouvoient convenir à des filles Religieufes. Le Cardinal de Sourdis tenoit alors le Siége Archiepifcopal de Bourdeaux. Le Pere de Borde alla trouver cette Eminence

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pour lui communiquer le deffein formé par la Marquise de Montferrant, de fonder ce nouvel Ordre. Elle y alla enfuite, munie de deux caïers, dont l'un contenoit la forme de cet Inftitut, & l'autre le fommaire des Constitutions, & les Regles Communes des Jefuites, aufquelles elle avoit fait elle même de fa main les changemens neceffaires, afin que ce Prélat vît en même tems la fin & les motifs de fon entreprife. Le Cardinal de Sourdis donna de grands éloges à fa vertu & à fon deffein, & lui promit de communiquer cette affaire à son confeil, la priant de revenir peu de jours après pour en apprendre la refolution. Le jour de cette entrevûë fut le feptième Mars de l'année 1606. deux ans après le retour de la Marquise du Monaftere de Toulouse. Cette vertueufe veuve se retira pleine de grandes efperances ; & afin qu'elles puffent réüffir, elle redoubla fes jeûnes, fes aumônes, fes Communions, & toutes les actions de pieté. Eile retourna chez l'Archevêque pour apprendre la refolution qu'il avoit prife; mais elle trouva dans l'efprit de ce Prélat un grand changement: car il prit un air fevere, & fans lui parfer de la décifion de fon confeil, qui avoit approuvé fon entreprise, & qui la mettoit en liberté d'agir auprès du faint Siége pour l'executer, il lui dit qu'elle devoit plûtôt penser à la réforme des anciennes Maisons Religieufes qu'à en établir de nouvelles; que les Urfulines de Bourdeaux qui avoient une vocation semblable à la fienne, avoient besoin de fon fecours & de fa conduite, que fon zele trouveroit parmi elles l'emploi qu'elle cherchoit, & qu'elle auroit la gloire de rendre à leur Inftitut fon premier éclat, en qualité de Superieure & de Fondatrice. La Marquife parut d'abord surprise de la réponse du Cardinal, elle lui reprefenta qu'elle n'étoit point appellée à la Congregation des Urfulines, & que Ciel lui avoit toûjours infpiré l'établissement d'une autre Compagnie, fous un autre nom & fous une autre Regle;

le

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qu'elle ne devoit pas abandonner un ouvrage pour lequel RELIGIEUelle croïoit que la main de Dieu l'avoit deftinée, ni en en- L'ORDRE treprendre un autre, pour lequel elle ne fe fentoit aucune DE Nôr RE vocation. Elle laiffa l'Archevêque avec cette réponse, & fe retira fans perdre l'efperance de le voir bien-tôt revenir à ses premiers fentimens. En effet le 25. Mars de la même année, il lui donna la liberté de s'adreffer au Pape, approuva son Institut, & écrivit même à fa Sainteté pour en avoir la confirmation, & lui fit en même tems l'éloge de la Fonda

trice.

pour

Paul V. gouvernoit pour lors l'Eglife; il reçut favorablement celui qui fut envoïé à Rome folliciter cette affaire ; le Cardinal de Sourdis n'étoit pas le feul qui eut écrit au Pape, plufieurs perfonnes de qualité s'étoient intereffées pour la Marquife de Montferrant, & le Marêchal d'Ornano, Gouverneur de Bourdeaux, avoit joint fa recommandation à celle du Cardinal de Sourdis. Paul V. accorda ce qu'on lui demandoit; & par un Bref du 7. Avril 1607. il confirma l'Inftitut de l'Ordre de Nôtre Dame, pour former les jeunes filles aux bonnes mœurs & aux vertus Chrêtiennes, permettant à la Marquife de Montferrant & à les Compagnes d'être reçues à la profeffion, après deux ans de probation accomplis, conformément aux Statuts de cet Ordre, qu'il approuva par la même Bulle, dont il commit l'execution au Cardinal de Sourdis, tant pour l'érection & l'établissement de cet Ordre, que pour le choix de l'habit de ces Religieufes, & du lieu où le Monaftere devoit être bâti. Ainfi ce Cardinal le 29. Janvier 1608. leur permit de commencer leur Noviciat auffi tôt que la clôture feroit établie dans leur Monaftere, qui fut bâti dans la ville de Bourdeaux; & de prendre l'habit & le voile de Religion de l'Ordre de faint Benoît, comme conforme & propre à cet Inftitut, confentant qu'après qu'elles auroient fait profeffion,elles feroient déclarées Religieufes de l'Institut de la Bienheureuse & toûjours Vierge Nôtre Dame.

y

Tout aïant été difpofé dans ce nouveau Monaftere pour obferver une exacte régularité, le Cardinal de Sourdis donna l'habit de ce nouvel Ordre à la Marquife de Montferrant, & à quatre de fes Compagnes, le premier jour de Mai de la même année 1608.mais il distingua la Fondatrice,

RELIGIEU- en lui donnant d'abord le voile noir, & l'établiffant SupeRrieure des quatre autres Novices. Elle étoit

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lors âgée de pour DE NOTRE- 55. ans.Quoiqu'elle n'eût rien perdu de fa premiere vigueur, la joïe qu'elle eut de fe voir au terme de fes defirs, lui donna de nouvelles forces: elle remercia Dieu avec fes filles d'un fi heureux fuccès, & elle efpera que fa bonté qui s'étoit manifestée en tant de manieres, continuëroit de verser fur elle & fur fa Maison fes benedictions. La Mere de Montferrant fut pendant un tems l'entretien de toute la ville: les uns l'accufoient d'ambition, d'entreprendre la fondation d'un Ordre,après avoir quitté la qualité de fimple Religieufe dans un autre. Il y en avoit d'autres qui difoient qu'il étoit de la charité de détourner cette Dame d'un deffein qui étoit au deffus de fes forces, & qu'elle y fuccomberoit. Quelquesuns s'en mocquoient ouvertement, & fon fils même, le Marquis de Montferrant, ofa faire des railleries de la conduite de fa mere. Mais cette fainte Fondatrice perfeveroit toûjours avec fes filles dans l'oraison & la priere. La confiance qu'elle avoit en Dieu la mettant au deffus des jugemens des hommes & de leurs reproches. Son filence attira l'admiration de ses adversaires, & ils furent bien-tôt obligés de changer de langage, quand ils virent les benedictions dont le Ciel récompenfa le courage de cette femme forte. L'orage commença à fe diffiper par le retour des premieres Difciples de la Fondatrice, qui l'avoient abandonnée, ou par legereté ou par les follicitations de leurs parens. Il y en eut cinq qui vinrent demander l'habit de fon Inftitut; le Cardinal de Sourdis voulut encore faire lui même cette cérémonie, & elles le reçurent des mains de ce Prélat le jour de la Conception de la fainte Vierge, fept mois après la vêture des premieres Novices. Au mois de Mars de l'année suivante 1609. la Fondatrice obtint des Lettres Patentes du Roi Henri IV. qui confirmoient l'établiffement de cet Ordre. Les vœux de Religion étant comme le fceau qui devoit l'affermir, & y donner toute fa perfection, elle les prononça le 8. Decembre de l'année 1610. Fête de la Conception de la fainte Vierge, entre les mains du Cardinal de Sourdis, auffi-bien que les quatre autres qui avoient pris l'habit avec elle. Dès le premier Mai de la même année, le tems de leur probation étoit expiré mais comme ce Cardinal, fuivant la premiere idée,

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vouloit que la Fondatrice & fes Compagnes fe joigniffent RELIGIEUaux Urfulines Congregées, qui vouloient auffi former un L'ORDRE Corps de Religion, leur profeffion fut differée jufqu'au D. NOTREmois de Decembre, que le Cardinal y confentit, & reçut leurs vœux. Les cinq autres Novices aïant enfuite fait profeffion comme les premieres, ces dix Religieufes attirerent par la fagesse de leurs Reglemens, & par l'odeur de leur vertu, un grand nombre de filles qui fe préfenterent, ou pour être inftruites dans les Claffes & parmi les Penfionnaires,ou pour être reçuës dans l'Ordre de Nôtre-Dame. Pendant que le nombre de ces filles augmentoit tous les jours, la Fondatrice travailloit de fon côté pour affermir le bien fpirituel de fon Ordre. Elle pria le Pere de Borde de reduire à une jufte forme les Regles Communes, les Conftitutions, les Inftructions & les Coûtumes de l'Ordre. Il promit d'y mettre la derniere main ; mais il ne le put faire fi promptement que la Mere de Montferrant auroit fouhaité: car fes Superieurs l'envoïerent à Pau, Capitale de la Navarre, pour y travailler à la converfion des Heretiques. Ainfi n'aïant pas reçu le Livre de l'Inftitut,corrigé par le Pere de Borde, qui ne lui fut remis que quelques années après, elle fut obligée à la premiere vifite qu'on fit dans fa Maison, d'en demander une nouvelle confirmation, fur un Exemplaire moins correct qu'elle en avoit, & qui en contenoit la fubftance dans tous les points effentiels. Cette vifite fe fit par ordre de l'Archevêque,qui nomma à cet effet fon Grand- Vicaire, auquel il donna pouvoir de réfoudre quelques difficultés touchant certains Articles du Bref de la fondation. Mais comme cela meritoit quelque réfléxion, le Grand-Vicaire ne voulut pas donner fur le champ une réponse précise. Il affembla quelques Theologiens, & entr'autres quatre Peres Jefuites; il s'agiffoit de l'élection de la Superieure, de la difference des dégrés,qui font dans l'Ordre,& de la promotion à la qualité de Meres. Le Cardinal de Sourdis par un Acte de l'an 1614. approuva les Décifions de cette Affemblée,confirma de nouveau les Constitutions de l'Ordre, & nomma à la qualité de Meres la Fondatrice, & fept autres, pour les mettre en état de pouvoir proceder à l'élection d'une Superieure, quoiqu'elles elles n'euffent pas encore les années marquées par le

Bref.

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