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Gaifne, à deux lieuës de Lodun. Aïant quitté le Poitou, il ORDRE DE paffa dans le Berri, où il reçut le Monaftere d'Orfan, que RAUD, lui procura l'Archevêque de Bourges. Il en fonda encore deux autres dans l'Evêché de Poitiers, l'un dans les Landes de la Garnache, dont ce Monaftere a pris le nom de la Lande, & l'autre dans la forêt de Tuçon ; & l'Evêque d'Orleans Jean II. l'aïant fait venir dans fon Diocése, lui procura le Monaftere de la Madelaine d'Orleans, qui fut bâti dans une folitude agréable fur la riviere de Loire.

Mais pendant que Dieu répandoit fi abondamment fes benedictions fur fes travaux, il permit qu'il fût humilié par des calomnies atroces que fes ennemis inventerent, & aufquelles Marbodius Evêque de Rennes, & Geofroi Abbé de Vendôme, ajoûterent foi trop aisément. Le premier lui écrivit une Lettre pleine d'aigreur & de reproches, dans laquelle il lui difoit qu'il avoit quitté l'Ordre des Chanoines Réguliers pour courir après des femmes, lui reprochant comme une marque de l'incontinence de ceux de fa fuite, les accouchemens de quelques femmes, les cris des enfans nouveaux nés, & le reprenant de ce qu'il donnoit l'habit Religieux à tous ceux qui le demandoient fans les éprouver, ne fe fouciant pas qu'ils fuffent bien convertis, pourvû que le nombre de fes Difciples augmentât; & qu'après qu'ils avoient donné leur nom, il n'en avoit point de foin, & les laiffoit agir comme ils vouloient: Geofroi de Vendôme lui écrivit que l'on difoit de lui une chofe dans le monde qui ne lui faifoit pas honneur, & dont il devoit promptement fe corriger, fi elle étoit vraïe; fçavoir,qu'il avoit une fi grande familiarité avec les femmes, qu'il leur permettoit de demeurer avec lui, qu'il avoit avec elles des entretiens fecrets, & qu'il n'avoit pas même de honte de coucher avec elles, fous prétexte de fe mortifier en fouffrant les éguillons de la chair: ce qui étoit un nouveau genre de martyre inoti, très dangereux & de mauvais exemple. A la verité ces Lettres font regardées par quelques-uns comme des ouvrages fuppofés. Le Pere Mainferme, Religieux de fon Ordre, dans le Bouclier de l'Ordre de Fontevraud,les rejette toutes les deux. Un de fes Confreres dans une Differtation qu'il fit imprimer à Anvers en 1701. reconnoît pour veritable celle de Geofroi mais Bollandus la rejette; le Pere Sirmond l'admet, auffi

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VRAUD.

ORDRE DE bien que le Pere Alexandre, qui rejette celle de Marbodius. Mais quand elles feroient veritablement de Marbodius & de Geofroi, cela ne détruit pas la fainteté du Bienheureux Robert d'Arbriffel; elles font feulement connoître que Marbodius & Geofroi ont cru trop aifément les ennemis de ce faint Fondateur; Geofroi reconnut dans la fuite la fauffeté de cette calomnie, & devint ami de Robert & de l'Abbaïe de Fontevraud. Il y fit de grandes fondations, & afin de n'y être pas à charge dans les frequentes vifites qu'il y faifoit, il Y fit (à ce que l'on dit) bâtir une maifon pour lui, que l'on a depuis appellée l'Hôtel de Vendôme.

Après tous les établiffemens que ce Serviteur de Dieu avoit faits,il crut qu'il étoit neceffaire d'en demander la confirmation au faint Siége, & de faire exemter l'Abbaïe de Fontevraud de la Jurifdiction de l'Evêque: ce qu'il obtint par une Bulle de l'an 1113. adreffée aux Religieufes de Fontevraud, qu'il avoit portées à en faire la demande au Pape. Continuant fes Miffions Apoftoliques dans le Limofin, il y fit deux nouveaux établissemens, l'un nommé Boubou,l'autre le Prieuré de la Gafconiere. Aïant paffé du Limofin dans le Perigord, il fonda le Couvent de Cadouin, qu'il ceda dans la fuite au Bienheureux Giraud de Sales. Enfin le dernier établissement qu'il fit,& l'un des plus célébres de fon Ordre, fut celui de Haute-Bruyere, à huit lieuës de Paris, au Diocéfe de Chartres, qui lui fut donné par Bertrade de Montfort, femme de Foulques de Rechin Comte d'Anjou. Le Roi Philippe 1. aïant fcandaleufement époufé cette femme, du vivant même de fon mari, elle fut enfin convertie par les exhortations de Robert, & fe croïant obligée à reparer le fcandale qu'elle avoit donné, elle fe retira dans ce Temple qu'elle avoit préfenté au Seigneur, où aïant non feulement pris l'habit de Fontevraud, mais encore toutes les aufterités de cet Ordre, qui pour lors étoit dans toute fa ferveur : elle édifia autant l'Eglife par la vie penitente & mortifiée, qu'elle l'avoit fcandalifée par fa vie molle & déréglée. Son premier foin fut de pourvoir ce nouveau Monaftere de tout ce qui étoit neceffaire pour l'entretien des Religieufes, afin que la pauvreté, qui eft la ruine ordinaire de la regularité, ne les empêchât pas d'offrir à leur célefte Epoux des facrifices de Loiange, ni de mediter les grandeurs pendant tout le tems

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de leur vie c'est pourquoi craignant que le revenu qui en ORDRE DE dépendoit ne fût pas Tuffifant pour l'entretien des Reli- FONILgieufes, elle ajouta à ce don ce que le Roi lui avoit affigné dans la Touraine pour partie de fon douaire; ce qu'elle fit agréer par ce Prince, qui y donna fon confentement.

Robert aprés avoir fait tous ces établissemens, prévoïant qu'il n'avoit pas encore beaucoup de tems à vivre, voulut achever le deffein que Dieu lui avoit infpiré pour fon Inftitut. Il fit établir pour Chef & Superieure de fon Ordre Petronille de Craon Chemillé, qui eft recomuë pour la premiere Abbeffe de Fontevraud, & dreffa les Statuts de cet Ordre qu'il mit fous la Regle de faint Benoît. Il ordonna l'abftinence continuelle de la viande n'en permettant pas même l'ufage aux malades. Les Religieufes entr'autres choles devoient garder le filence en tout tems, aller toutes enfemble à l'Eglife & en revenir de même. Leurs voiles devoient toûjours être abaiffés & cacher entierement leur visage. Elles ne devoient être vêtues que de tuniques faites des plus viles étoffes du païs, de la couleur naturelle de la laine, fans être tonduës. Les furplis blancs leur étoient défendus auffi-bien que les gands. Une Religieufe ne pouvoit fortir hors du Cloître pour quelque ouvrage que ce fut fans la permiffion de l'Abbeffe. Quand les Prieures alloient dehors, elles ne devoient mener avec elles aucune Religieufe,& elles devoient être accompagnées pour le moins d'unReligieux & d'un Séculier : nulle autre que l'Abbeffe ou la Prieure ne pouvoit parler dans le chemin, jufqu'à ce que l'on fut arrivé dans l'Hôtellerie. Le Dortoir étoit toûjours gardé le jour par une Converse & la nuit par deux ou quatre : les malades ne pouvoient recevoir le Viatique ni l'Extrême- Onction que dans l'Eglife, & quand on les portoit en terre, elles devoient être couvertes d'un cilice.

Quant aux Religieux ils devoient dire en commun l'Office Canonial, vivre en commun fans avoir rien en propre. Ils ne portoient ni manteaux,ni chemifettes noires : ils avoient une ceinture de cuir, à laquelle étoit attaché un couteau de la valeur de deux deniers & une gaine de la valeur d'un denier. Ce que l'on deffervoit de leur table devoit être rendu aux Religieufes pour être enfuite diftribué aux pauvres, Tous les Dimanches & Fêtes ils devoient aller à l'habit (c'est

VRAUD.

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