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On leur parle, on reçoit d'eux-mêmes le falaire
Des fervices rendus, ou du zéle à leur plaire;
Et l'amoureux attrait qui régne en leurs bontez,
Leur gagne d'un coup d'œil toutes les volontez.
Pourriez-vous en avoir une plus fûre marque,
Belges? vous le voyez cet illuftre Monarque,
A vos temples ouverts conduire fes vainqueurs,
Pour y bénir le Ciel de vos propres bonheurs..
Eft-il environné de ces pompes cruelles

Dont à Rome éclatoient les victoires nouvelles,
Quand tout autour d'un char elle voyoit traînez,
Des peuples foupirans & des Rois enchaînez?.
Il n'y fait point porter les dépouilles des villes,
Comme fes Marius, fes Métels, fes Emiles,
Et ce refte infolent d'avides Conquérans,
Grands Héros dans fes murs, par tout ailleurs ty-

rans.

Il entre avec éclat, mais votre populace,
Ne voit deffus fon front ni faste, ni menace.
Il entre, mais d'un air qui ravit tous les cœurs,
En Pere des vaincus, en Maître des vainqueurs.
Peuples, repentez-vous de votre réfiftance;
Il ramene en vos murs la joye & l'abondance;
Votre défaite en chaffe un fort plus rigoureux,
Si vous aviez vaincu, vous feriez moins heureux.
On m'en croit, on l'aborde, on lui

plaintes ;

porte

des

Il écoute, il prononce, il fait des lois plus faintes..

CORNEIL

LE.

CORNEIL

LE.

C'eft ainfi que la terre au retour du Printems,
Des graces du Soleil fe défend quelque tems,
De fes premiers rayons veut fuir les avantages,
Et pour les repouffer éleve cent nuages:
Le Soleil plus puiffant diffipe ces vapeurs,
S'empare de fon fein, y fait naître des fleurs,
Y fait germer des fruits; & la terre à leur vûë
Se trouvant enrichie auffi-tôt que vaincuë,
Ouvre à ce Conquérant jusques au fond du cœur,
Et pleine de fes dons adore son vainqueur.
Pourfuis, grand Roi, pourfuis, c'eft par-là qu'on
s'affure

Un respect immortel chez la race future :
C'est par-là que le Ciel prépare ton Dauphin
A remplir hautement fon illuftre destin;
Il y répond fans peine, & fon jeune courage
Accufe inceffamment la pareffe de l'âge :
Toute fon ame vole après tes étendards,
Brûle de partager ta gloire & tes hazards,
D'aller ainfi que toi de conquête en conquête.
Confervez, juftes Cieux, & l'une & l'autre tête;
Modérez mieux l'ardeur d'un Roi fi généreux;
Faites-le fouvenir qu'il fait feul tous nos vœux,
Que tout notre destin s'attache à sa perfonne;
Qu'il feroit d'un faux pas
chanceler fa couronne,
Et puifque fes périls nous forcent de trembler,

Du moins n'en fouffrez point qui nous puisse acca

bler.

La Tulippe au Soleil.

BEL Aftre, à qui je dois mon être & ma beauté,
Ajoute l'immortalité

A l'éclat fans pareil dont je fuis embellie;
Empêche que le tems n'efface mes couleurs ;
Pour trône donne-moi le beau front de Julie,
Et fi cet heureux fort à ma gloire s'allie,
Je ferai la Reine des Fleurs.

ENDROITS CHOISIS DE QUELQUES PIECES
Du Théatre de Corneille.

I

MEDE E.

Une femme qui fe voit abandonnée & trahie,
eft capable des derniers excès.

SOUVERAINS Protecteurs des loix de l'himenée,
Dieux, garants de la foi que Jafon m'a donnée;
Vous, qu'il prit à témoin d'une immortelle ardeur,
Quand par un faux ferment il vainquit ma pudeur,
Voyez de quel mépris vous traite fon parjure,
Et m'aidez à venger cette commune injure.

1 C'eft Médée, fille du Roi de Colchos, & fameufe Magicienne, qui parle; Acte I. Scene IV. Jafon qui, par le fecours de fes charmes, avoit enlevé la toifon d'or, l'époufa par reconnoiffance. Etant venu, peu de tems après à la Cour du Roi de Corinthe, Creüfe, fille de ce Prince, & douée d'un rare mérite, fit bien-tôt oublier à Jafom l'amour & les bienfaits de Médée.

CORNEIL
LI.

CORNEIL

LÉ.

S'il me peut aujourd'hui chaffer impunément,
Vous êtes fans pouvoir, ou fans reffentiment..
Jafon me répudie! Eh! qui l'auroit pû croire?
S'il a manqué d'amour, manque-t'il de mémoire ?
Peut-il bien me quitter après tant de bienfaits?
M'ofe-t'il bien quitter après tant de forfaits?
Sçachant ce que je puis, ayant vû ce que j'ose,
Croit-il
foit fi peu
m'offenfer ce
que

de chofe?

Quoi? mon pere trahi, les élémens forcez,
D'un frere dans la mer les membres dispersez,
Lui font-ils préfumer mon audace épuisée ?
Lui font-ils préfumer qu'à mon tour méprisée,
Ma rage contre lui n'ait pas où s'affouvir,
Et que tout mon pouvoir se borne à le fervir?
Tu t'abuses, Jafon, je fuis encor moi-même:
Tout ce qu'en ta faveur fit mon amour extrême,
Je le ferai par haine, & je veux pour le moins,
Qu'un forfait nous fépare, ainsi qu'il nous a joints..
Déchirer
par morceaux l'enfant aux yeux
du pere,
N'eft que le moindre effet qui fuivra ma colere.
Mais pour exécuter tout ce que j'entreprends,
Quels Dieux me fourniront des fecours affez grands?
Ce n'eft plus vous, Enfers, qu'ici je follicite ;
Vos feux font impuiffans pour ce que je médite.
Auteur de ma naiffance, auffi-bien que du jour,
Qu'à regret tu dépars à ce fatal féjour,

Soleil, qui vois l'affront qu'on va faire à ta race,
Donne-moi tes chevaux à conduire en ta place,

Accorde cette grace à mon défir bouillant :

Je veux cheoir fur Corinthe avec ton char brûlant. CORNEIL

Mais ne crains pas de chûte à l'Univers funefte;

Corinthe confumé garantira le refte.

De mon jufte courroux les implacables vœux,
Dans fes odieux murs arrêteront tes feux.

Créon en eft le Prince, & prend Jafon pour gendre;
C'eft affez mériter d'être reduit en cendre,
D'y voir réduit tout l'Ifthme afin de l'en punir,
Et qu'il n'empêche plus les deux mers de s'unir.

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1 ALBE, où j'ai commencé de respirer le jour,
Albe, mon cher pays, & mon premier amour,
Lorfqu'entre nous & toi je vois la guerre ouverte,
Je crains notre victoire autant que notre perte.
Rome, fi tu te plains que c'est-là te trahir,
Fais-toi des ennemis que je puiffe haïr,

Quand je vois de tes murs leur armée & la nôtre,
Mes trois freres dans l'une, & mon mari dans l'au-

tre,

Puis-je former des vœux, & fans impiété,
Importuner le Ciel pour ta félicité ?

1 C'eft Sabine qui parle, Acte I. Scene I. Elle tenoit à la ville d'Albe par la naiffance, & ne tenoit à Rome que par fon mariage avec l'un des Horaces.

LE.

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