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MADAME

DES HOULIERES.

NTOINETTE DU LIGER DE LA
GARDE, épouse de Guillaume Des HOU-
de la Fond, Seigneur de Bois- LIERES.
Guerin & des Houlieres,

Lieutenant de Roi de la Citadelle de
Dourlens.... mourut à Paris le 17 Février
1694. âgée de cinquante-fix ans. Il y a
peu de nos Poëtes qui ayent fait autant
d'honneur à la Poëfie Françoife que Ma-
dame DES HOULIERES. Ses Idylles furtout,
& fes Réflexions diverfes & morales font
d'une grande beauté.. Elle étoit en com-
merce de Lettres (commerce auffi fpiri-
tuel qu'innocent) avec les perfonnes de
la Cour les plus diftinguées par leur mé-
rite; & entre autres, avec les Ducs de la
Rochefoucault, de Nevers, de Saint
Aignan, de Vivonne & de Montaufier.
LOUIS XIV. l'honora de fes bienfaits,
Qq

Tome II.

--- & de fon approbation, plus flateuse pour DIS Hou-elle que les bienfaits même. Egalement LIERES. douée des graces de l'efprit & du corps,

elle n'en fentit pas moins le néant des chofes du monde; & elle eut le bonheur de finir une vie, remplie de fouffrances depuis douze ans, par une mort toute chrétienne.. On a gravé au bas de fon portrait qui eft à la tête de fes Œuvres les Vers fuivans.

Si CORINNE en beauté fut célébre autrefois,
Si des Vers de Pindare elle efface la gloire ;
Quel rang doivent tenir au Temple de Mémoire
Les Vers que tu vas lire, & les traits que tu vois ?

Madame DES HOULIERES étoit de l'Aca-
démie d'Arles, & de celle des Ricovrati
de Padouë.. Elle avoit eu deux filles,
dont l'une fut Religieufe à Nions en
Dauphiné, & l'autre eft demeurée dans
le monde héritiere des talens de Madame
fa mere pour la Poëfie, & encore plus de
Les malheurs,

RONDE A U.

CONTRE

DES HOU

ONTRE l'Amour voulez-vous vous dé- LIERES.

fendre ?

Empêchez-vous & de voir & d'entendre

Gens dont le cœur s'explique avec efprit.
Il en eft peu de ce genre maudit,

Mais trop encor pour mettre un cœur en cen-
dre.

Quand une fois il leur plaît de nous rendre
D'amoureux foins, qu'ils prennent un air ten-
dre, ·

On lit en vain tout ce qu'Ovide écrit
Contre l'Amour.

De la raison il ne faut rien attendre :`

Trop de malheurs n'ont fçû que trop appren

dre,

Qu'elle n'eft rien dès que le cœur agit.

La feule fuite, Iris, nous garantit ;

C'est le parti le plus facile à prendre
Contre l'Amour.

IDYLLE S.

Les Fleurs.

QUE votre éclat eft peu durable,

Charmantes fleurs, honneur de nos jardins! Souvent un jour commence & finit vos deftins,

Et le fort le plus favorable

DES HOU- Ne vous laiffe briller que deux ou trois matins.
LIERES. Ah! confolez-vous-en, Jonquilles, Tubéreufes ;
Les médifans, ni les jaloux,

Ne gênent point l'innocente tendreffe
Que le Printems fait naître entre Zéphire & vous :
Jamais trop de délicatesse

Ne mêle d'amertume à vos plus doux plaisirs.
Que pour d'autres que vous il pouffe des foupirs,
Que loin de vous il folâtre fans ceffe ;
Vous ne reffentez point la mortelle trifteffe
Qui dévore les tendres cœurs,
Lorfque pleins d'une ardeur extrême

On voit l'ingrat objet qu'on aime,

Manquer d'empreffement, ou s'engager ailleurs.
Pour plaire, vous n'avez feulement qu'à paroître :
Plus heureufes que nous, ce n'eft que le trépas
Qui vous fait perdre vos appas;

Plus heureufes que nous, vous mourez pour renaî

tre.

Triftes réflexions, inutiles fouhaits:

Quand une fois nous cessons d'être,
Aimables fleurs, c'eft pour jamais!

Un redoutable instant nous détruit fans réserve;
On ne voit au-delà qu'un obfcur avenir.
A peine de nos noms un léger fouvenir
Parmi les hommes fe conferve:

Nous entrons pour toujours dans un profond repos,

D'où nous a tirez la nature,'

Dans cette affreufe nuit qui con fond les héros
Avec le lâche & le parjure,

Et dont les fiers Deftins par de cruelles lois
Ne laiffent fortir qu'une fois.

Mais hélas ! pour vouloir revivre,
La vie eft-elle un bien fi doux ?

Quand nous l'aimons tant, fongeons-nous
De combien de chagrins fa perte nous délivre ?
Elle n'eft qu'un amas de craintes, de douleurs,
De travaux, de foucis, de peines.
Pour qui connoît les miferes humaines,
Mourir n'eft pas le plus grand des malheurs.
Cependant, agréables fleurs,

Par des liens honteux attachez à la vie

Elle fait feule tous nos foins;

Et

nous ne vous portons envie

Que par où nous devons vous envier le moins:

Les Moutons.

HE'LAS, petits Moutons, que vous êtes heureux! Vous paiffez dans nos champs fans fouci fans al larmes ;'

Auffi-tôt aimez qu'amoureux,

On ne vous force point à répandre des larmes ;-
Vous ne formez jamais d'inutiles défirs.

Dans vos tranquilles cœurs l'amour fuit la nature
Sans reffentir les maux vous avez fes plaifirs:

Qq. iij

DES HOU

LIERES

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