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Permettez que je vous remontre...
DOLIGNI pere.

Doligni, laiffons-là des débats importuns.
Tu vas me débiter les mêmes lieux communs
Qu'autrefois nous avons en pareille rencontre
Chacun de pere en fils employés comme toi.
Va, j'ai paffé par là, tu feras comme moi.
DOLIGNI fils.

Et fi j'aimois ailleurs?

DOLIGNI pere.

Ma foi, tant pis pour elle,

Il faudroit, en ce cas, devenir infidelle.

DOLIGNI fils.

Ce n'est donc pas pour moi que vous me mariez?

DOLIGNI pere.

Pour qui donc ?

DOLIGNI fils.

Je le croirois presque :

Pai compté faire un choix que vous approuve

riez.

DOLIGNI pere.

L'amour dans un jeune homme eft toujours roma,
nefque.
J'aurois été moi-même affez extravagant,
Pour époufer auffi ma premiere amourette,
Si l'on n'eût retenu ma jeuneffe indifcrette.
DOLIGNI fils.

Mais je ne connois point Mademoiselle Argant,

DOLIGNI pere.

Ni moi mais elle aura vingt mille écus de rente,

DOLIGNI fils.

Hé, quand elle en auroit quarante !
DOLIGNI pere.

Ce feroit encor mieux.

DOLIGNI fils.

N'avez-vous pas du bien?

DOLIGNI pere.

Il le faut augmenter à finon il vient à rien,

DOLIGNI fils.

J'ignore comme elle eft d'efprit & de figure.
DOLIGNI pere.

Elle eft riche. A l'égard de l'efprit, je t'affure
Qu'une femme à la longue en a toujours aflez.
Elle est jeune, au furplus; & tout ce que j'en fai,
C'est qu'à quinze ou feize ans on eft du moins jolie.
DOLIGNI fils.

Qui fait fi le rapport d'humeurs...

DOLIGNI. pere.

Autre folie!

En tout cas, tu feras comme les autres font.

Qui s'embarque, eft-il sûr de faire un bon voyage?
A quoi fert l'examen avant le mariage?

A rien. Ce n'eft qu'après qu'on fe connoît à fond.
Las de fe compofer avec un foin extrême,
Le naturel caché prend alors le deffus;
Le mafque tombe de lui-même,

Et malheureufement on ne le reprend plus:
Mais enfin le bien refte; & cet ami fidéle,
Sans compter quelquefois la raifon qui s'en mêle,
Entre époux qui pourroient fe brouiller fans retour,
Sert de médiateur au défaut de l'amour.

DOLIGNI fils.

Il ceffera d'être inflexible.

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Monfieur, ma maîtrefle est visible.

DOLIGNI pere.

Pon. Et Monfieur Argant n'arrive donc jamais? L'œil du maitre eft pourtant chez lui fort nécef

faire.

ROSETTE.

On l'attend tous les jours.

DOLIGNI pere.

Voilà bien des délais !

ROSETTE.

C'est qu'un mari, pour l'ordinaire, N'eft jamais fi preffé de retourner chez lui. Quoi qu'il en foit, on dit qu'il revient aujourd'hui. DOLIGNI pere.

Tant mieux, j'en ai l'ame ravie.

C'eft le meilleur ami que j'aye eu de ma vie.
Mais allons voir fa femme, & lui faire ma cour.
Doligni, tout eft dit. Adieu, jufqu'au retour.

SCENE

I I I.

DODIGNI fils, ROSETTE.

IL

DOLIGNI fils à part..

L m'aime, je le fai; c'eft fur quoi je me fonde.
ROSETTE.

Qu'ef-ce? Vous n'êtes pas le plus content du monde?

DOLIGNI fils.

C'est que je viens d'avoir un entretien fâcheux.

ROSETTE.

Ceux d'un pere & d'un fils font toujours orageux.
DOLIGNI fils.

J'aime ; & mon pere veut que j'en épouse une autre.
ROSETTE.

Il a tort: & fon goût devroit fuivre le vôtre.

J

DOLIGNI fils.

Ce n'eft pas ce qui doit m'embarraffer le plus
Il s'agit de mes feux. Comment font-ils reçus?
Marianne ayant mis en toi fa confiance...

ROSETTE.

Que concluez-vous de cela?
DOLIGNI fils.

Si j'ai plû, tu le fais.

ROSETTE.

Mauvaife conféquence:
Nous ne nous faifons point ces confidences là.
Voyez donc !

DOLIGNI fils.

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Eh que diantre avez-vous à vous dire,
Si l'amour & les cours foumis à votre empire,
De tous vos entretiens ne font pas le fujet?
ROSETTE.

Oh! Ce n'eft pas comme vous autres.
Vous avez vos propos, & nous avons les nôtres.
DOLIGNI fils.

Sur quoi roulent-ils donc, & quel en eft l'objet ?
ROSETTE.

Une mode, une étoffe, une robe nouvelle,
Des gazes, des pompons, des fleurs, une dentelle,
Sont d'abord des fujets qui ne tariffent point.
Quand on eft en gayeté, quelquefois on y joint
Des hiftoriettes de fille,

Des contes de couvent. Enfin, que fai-je, moi?
On parle, on cause, on jase, on caquette, on ba-
bille,

Et l'on rit bien fouvent fans trop favoir pourquoi.
DOLIGNI fils.

Non, jamais on n'a vû de fille fi difcrette.

ROSETTE.

Je fers d'exception.

DOLIGNI fils.

Sois un peu moins fecrette. Le Marquis, par hazard, n'est-il point mon rival?

ROSETTE.

Qui, lui?

DOLIGNI fils.

Sa coufine eft fi belle!...

Il fait profeffion d'être un galant banal.
Il peut s'être avifé d'employer auprès d'elle
Ses talens féducteurs.

ROSETTE.

Ils ne produiroient rien.
DOLIGNI fils.

Ses fuccès ont cent fois couronné fon adreffe.
Il ne poffede que trop bien

L'art de rendre fenfible à fa fauffe tendreffe:
Et tant de cœurs conquis bien ou mal-à-p
-propos,
Troublent le peu d'efpoir qui pouvoit me féduire.
ROSETTE.

Comment, vous érigez ce marquis en héros?
DOLIGNI fils.

Comment puis-je en effet balancer, ou détruire
Tant d'avantages vrais ou faux?
Mon malheureux amour m'éclaire.
Il ne faut que chercher à plaire
Pour connoître tous les défauts.
Peut-être à tort je la foupçonne;
Mais pour une jeune perfonne
L'hommage du marquis eft bien éblouiffant.
Plaise à l'amour que je m'abuse!
ROSETTE.

Il est vrai que l'on nous accuse
D'apporter toutes en naiffant

Ce malheureux levain de la coquetterie,
Et ce goût effréné pour la galanterie.

Nous pourrions à bon titre en dire autant de vous.
Mais, fans récriminer, croyez que parmi nous

Il eft encor des cœurs dignes d'un honnéte homme. D'ailleurs, en vains foupçons votre esprit fe confomme,

Le marquis choifit mieux.

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