Permettez que je vous remontre... Doligni, laiffons-là des débats importuns. Et fi j'aimois ailleurs? DOLIGNI pere. Ma foi, tant pis pour elle, Il faudroit, en ce cas, devenir infidelle. DOLIGNI fils. Ce n'est donc pas pour moi que vous me mariez? DOLIGNI pere. Pour qui donc ? DOLIGNI fils. Je le croirois presque : Pai compté faire un choix que vous approuve riez. DOLIGNI pere. L'amour dans un jeune homme eft toujours roma, Mais je ne connois point Mademoiselle Argant, DOLIGNI pere. Ni moi mais elle aura vingt mille écus de rente, DOLIGNI fils. Hé, quand elle en auroit quarante ! Ce feroit encor mieux. DOLIGNI fils. N'avez-vous pas du bien? DOLIGNI pere. Il le faut augmenter à finon il vient à rien, DOLIGNI fils. J'ignore comme elle eft d'efprit & de figure. Elle eft riche. A l'égard de l'efprit, je t'affure Qui fait fi le rapport d'humeurs... DOLIGNI. pere. Autre folie! En tout cas, tu feras comme les autres font. Qui s'embarque, eft-il sûr de faire un bon voyage? A rien. Ce n'eft qu'après qu'on fe connoît à fond. Et malheureufement on ne le reprend plus: DOLIGNI fils. Il ceffera d'être inflexible. Monfieur, ma maîtrefle est visible. DOLIGNI pere. Pon. Et Monfieur Argant n'arrive donc jamais? L'œil du maitre eft pourtant chez lui fort nécef faire. ROSETTE. On l'attend tous les jours. DOLIGNI pere. Voilà bien des délais ! ROSETTE. C'est qu'un mari, pour l'ordinaire, N'eft jamais fi preffé de retourner chez lui. Quoi qu'il en foit, on dit qu'il revient aujourd'hui. DOLIGNI pere. Tant mieux, j'en ai l'ame ravie. C'eft le meilleur ami que j'aye eu de ma vie. SCENE I I I. DODIGNI fils, ROSETTE. IL DOLIGNI fils à part.. L m'aime, je le fai; c'eft fur quoi je me fonde. Qu'ef-ce? Vous n'êtes pas le plus content du monde? DOLIGNI fils. C'est que je viens d'avoir un entretien fâcheux. ROSETTE. Ceux d'un pere & d'un fils font toujours orageux. J'aime ; & mon pere veut que j'en épouse une autre. Il a tort: & fon goût devroit fuivre le vôtre. J DOLIGNI fils. Ce n'eft pas ce qui doit m'embarraffer le plus ROSETTE. Que concluez-vous de cela? Si j'ai plû, tu le fais. ROSETTE. Mauvaife conféquence: DOLIGNI fils. Eh que diantre avez-vous à vous dire, Oh! Ce n'eft pas comme vous autres. Sur quoi roulent-ils donc, & quel en eft l'objet ? Une mode, une étoffe, une robe nouvelle, Des contes de couvent. Enfin, que fai-je, moi? Et l'on rit bien fouvent fans trop favoir pourquoi. Non, jamais on n'a vû de fille fi difcrette. ROSETTE. Je fers d'exception. DOLIGNI fils. Sois un peu moins fecrette. Le Marquis, par hazard, n'est-il point mon rival? ROSETTE. Qui, lui? DOLIGNI fils. Sa coufine eft fi belle!... Il fait profeffion d'être un galant banal. ROSETTE. Ils ne produiroient rien. Ses fuccès ont cent fois couronné fon adreffe. L'art de rendre fenfible à fa fauffe tendreffe: Comment, vous érigez ce marquis en héros? Comment puis-je en effet balancer, ou détruire Il est vrai que l'on nous accuse Ce malheureux levain de la coquetterie, Nous pourrions à bon titre en dire autant de vous. Il eft encor des cœurs dignes d'un honnéte homme. D'ailleurs, en vains foupçons votre esprit fe confomme, Le marquis choifit mieux. |