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Au bord du précipice en butte à leur furie,
Sur l'ombre d'un foupçon, c'eft fait de vôtre vie ;
Etrange impreffion d'un violent amour,

Je ne connoiflois point la crainte avant ce jour,
Et timide à prefent tout m'allarme,& me trouble;
Plus je veux m'affermir, plus ma frayeur redouble;
Je tremble, je friffonne, & n'ofe envisager
Cet abîme où moi-même a sçû vous engager :
Je crains encor pour vous une race fatale,
Vous êtes né du fang d'Atrée & de Tantale,
Le Ciel toûjours armé contre un fang malheureux,
A tous leurs defcendans marque un fort rigoureux,
Et fa haine fouvent confondant fa vangeance,
Il foudroïe à la fois le crime & l'innocence;
Cependant quelque effroi qui puiffe me troubler,
Je ne puis vous porter cher Prince à reculer::
Cent fois plus que vos jours vôtre gloire m'est chere,
D'un fang reçu de lui comptable à vôtre Pere,
Verfé-le, s'il le faut, de vôtre honneur jaloux,
Pleine d'un fi grand Roi, c'est lui que j'aime en ›

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Et quoique pour fon fils prête à donner ma vie, J'aime mieux vous voir mort que couvert d'infa

mic,

3

Le fang d'un pere crie, aveugle à tout danger,
Acheve, Prince, il faut perir ou le vanger.

ORESTE.

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Ah! j'y cours & bravant le coup qui me menace,
Je confens à mourir pour vanger fa difgrace;
Mais que deviendrez-vous fi je fuccombe! helas!!
J'en fremis; expofée au plus cruel trepas;
Ils étendrons für vous leur fureur vangereffe;
Quel fruit de mon retour & de vôtre tendreffe!!

ELEC TR E.

N'ayez point pour mon fort de pitié ni d'effroi, Quand je crains tout pour vous, je ne crains rien pour moi;

Eh! quoi, fi la clarté vous doit être ravie,
Voudrois-je conferver une odieufe vie ;
Non, & la mort du moins rejoindra dès ce jour
Trois cœurs fi fort unis par le fang & l'amour.

PAMEN E.

Efperons tout des Dieux, Madame, leur puiffance
Fatalle aux attentats, veille fur l'innocence.
Pourquoi d'un fier Tyran redouter le couroux,
Si de ces Dieux vangeurs le bras combat pour vous ?
Confondant nôtre orgueil, leur fuprême fageffe,
Dompte à fon gré la force, & foútient la foibleffe,
A leur loix affervis, nos plus puiffans efforts,
De leur jufte deffein deviennent les refforts,
Et fimples inftrumens dans leurs mains redoutables,
On ne fait qu'accomplir leurs arrêts immuables.
Reconnoiffez ici cet abfolu pouvoir,
D'un Tyran foupçonneux flatant l'avide efpoir
Ne l'ont-ils pas furpris malgré fa défiance,
Et frappé de l'efprit d'erreur & d'imprudence,
Par eux-mêmes déja dans le piege entraîné,
A fon aveugle yvreffe ils l'ont abandonné ;
Et demain à nos coups le livrant dans leur Temple,
Leur juftice y prépare un formidable exemp e.
De ce vafte Palais, cet endroit écarté,

2

Eft le plus folitaire & le moins frequenté;
Cependant c'en eft trop on pourroit vous furprendre
31 eft tems de finir un entretien fi tendre,
Separez-vous, les Dieux exauceront vos vœux.

ELECTR E..

Pamene, j'attend tout de ton zele après eux :
Toi-même en nos malheurs m'eft un Dieu tutelaire,
N'as-tu pas à ce Prince helas! fervi de Pere,
Acheve, & conduifant fon deffein & fes pas,
Dans un fi grand peril ne l'abandonne pas.
Daignez punir le crime & fauver l'innocence,
Grands Dieux ! & fi fur elle étendant la vangeance,
La foudre gronde encor contre un fang malheureux
Epuifez fur moi feule un courroux rigoureux.

ACTE V.

SCENE PREMIERE.

ORESTE, PAM EN E..

PAMENE.

OUI, Seigneur, je fremis en ce jour pour vouse

:

Le trépas vous attend, ma frayeur eft extrême,
L'erreur dont le Tyran fe laiffoit éblouir,
Eft prête à difparoître & va s'évanoüir,

Un bruit fourd & confus court qu'Orefte refpire,
On l'a dit à Cleon qui m'en a fait inftruire,

Ce bruit encor fecret, mais bien-tôt répandu,
Viendra jufqu'au Tyran, & vous êtes perdu,
De fes foupçons trompez, la paix mal affermie,
Reveillant fes frayeurs & fa haine endormie,
Et de deffus fes yeux arrachant le bandeau,
Jufqu'à la verité portera le flambeau.

Quel peril tout dépend de vôtre diligence,
Prevenez fa fureur, hâtez vôtre vangeance,
Demain c'eft trop tarder ; vous le voudrez en

vain :

Dès ce foir attaquons un Tyran inhumain,
De fon crime en ce jour renouvellant la joïe,
D'un barbare feftin la pompe se déploïe :
Invitez, attendus, à ce festin cruel,

Effaçons-en l'horreur par un coup immortel,
Enfanglantons les mets fouillez par le carnage,
C'eft dans les grands perils qu'éclate un grand cou-

rage.

Et fuffiez-vous trahi des mortels & des Dieux,
Vous trouverez du moins un trépas glorieux.
Electre à qui je viens, Seigneur, de tout appren-

dre,

Approuvant mon deffein en ces lieux va fe ren

dre,

Et Cleon s'affurant de fes amis fecrets,

A feconder ce coup doit les tenir tous prêts :
Vous ne me dites rien, croyez-moi le mal preffe,
D'où vient cette froideur, qu'elle fombre trifteffe

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SCENE I I.

ORESTE, ELECTRE, PAMENE.

ELECTR E.

HPrince, Lorage approche & croit à chaque

Atez-vous d'accomplir un projet éclatant,

inftant;

Que tardez-vous, courez où l'honneur vous appelle,
A braver tant d'écueils l'occafion eft belle:
Du Fils d'Agamemnon rempliffez le deftin,
Celebrez dignement cet horrible festin;
De cet autre où jadis fe fignala leur rage,
Par des ruiffeaux de fang renouvellez l'image,-
Agamemnon perit en ce funefte jour,
Les Dieux y refervoient vôtre fatal retour s
Et pour mieux fignaler leur terrible juftice,
Marquez le lieu, le jour, & l'inftant du fupplice 3
Prête à mourir du coup qui vous peut opprimer,
S'il en étoit befoin je viens vous animer.

ORES TE..

J'ai toujours même foif, de gloire & de vangeance,
Je brave les perils, la mort, la violence,

Mais....

ELECTRE.

Hé bien...

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