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de chacun. La fortune fecondoit à merveille fon intrépidité; les Ruffes, après avoir battu le maréchal de Lehwald près de Jagendorff, s'étoient retirés brusquement & avoient évacué la Siléfie qui leur étoit ouverte. Le général Pruffien n'ayant plus rien à craindre de ce côté, s'étoit porté rapidement en Pomeranie où une petite armée Suédoife étoit entrée ; celle-ci fe retira de même à l'approche des Pruffiens.

Frédéric retranché dans la Saxe, obfervoit de là tous les mouvemens des Autrichiens dont les détachemens pénétroient en Siléfie. Il forma le projet d'aller combattre le prince de Saxe-Hildbourghaufen; il falloit pour cela dérober sa marche à l'œil pénétrant du maréchal Daun, battre l'ennemi, & revenir faire tête aux Autrichiens. Ce deffein hardi, celui de toutes les campagnes du roi de Pruffe qui lui fait le plus d'honneur, fut éxécuté, réuffit & le tira du plus grand danger.

Après bien des mouvemens & des manœuvres favantes, ce prince, à la tête d'un corps confidérable fe dérobe, marche vers la Thuringe, & établit fon quartier général à Er

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furth. Ce ne fut qu'après avoir éprouvé de vives allarmes, qu'il goûta enfin le plaifir du fuccès. Le maréchal Daun s'étoit apperçu de fon abfence & de la diminution de fon armée, qu'il avoit laiffée aux ordres du prince de Bévern pour défendre le terrein en Silésie. Alors le prince Charles s'ébranla, & preffant toujours le prince de Bévern, il l'obligea de fe retirer fous le canon de Breslau & de se retrancher à la hâte dans le faubourg. Pendant ce tems-là, le général Nadafti refferroit Schveidnitz & fe préparoit à en former le fiége.

Une autre entreprise du général Haddick vint encore inquiéter le roi de Pruffe. Ce général Autrichien, à la tête de trois mille quatre cents hommes, étoit allé mettre Berlin à contribution. A cette nouvelle, Frédéric ordonne au prince Maurice d'Anhalt de s'approcher de fa capitale, il vole lui-même à son fecours. Haddick, averti de ces mouvemens, fe hâte de lever deux cents mille écus de contribution, & regagne la Siléfie, fans que le roi de Pruffe ait pu l'atteindre dans fa re traite.

Frédéric retourne camper vis-à-vis l'armée de l'Empire, & le 4 novembre il s'établit à Rosbach, à dix lieues de Dresde. Il prend enfin le parti d'en venir à une bataille dont le fuccès ou la perte devoit avoir pour lui des fuites fi importantes. Pour s'affurer de la victoire, il trompe l'armée impériale par un stra tagême. Il feint de fe retirer avec précipitation du côté de Merzbourg, & cache fes troupes derriere une hauteur qui dérobe aux Impé riaux les difpofitions qu'il alloit faire. Cette manœuvre précipitée en présence d'une armée ennemie, étoit certainement très-dangereuse; mais dans l'extrêmité où il fe trouvoit, il crut devoir rifquer quelque chofe. Le prince de Soubife avoit été d'avis de pourfuivre l'arrieregarde pruffienne, & l'on convient que la victoire n'étoit point douteufe. Mais le général françois n'étant qu'auxiliaire, ne pouvoit que propofer; malheureusement pour les deux nations, son avis ne fut point fuivi. Le lendemain, l'on n'auroit point dû combattre, ou ne le faire qu'après avoir bien examiné la position d'un ennemi qu'on ne pouvoit pas foupçonner de s'être retiré par crainte ; mais dans

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la confiance aveugle où l'on étoit, on ne fit point cette réflexion fi naturelle; on voulut poursuivre un ennemi que l'on croyoit en fuite, & qui attendoit dans la plus grande fécurité l'armée qui le croyoit à demi-vaincu. L'on fe contenta de deviner la pofition des Pruffiens. Enfin l'armée impériale marche à l'ennemi avec confiance, comme à une victoire affurée. Lorfqu'on eft defcendu dans le champ de bataille, la fécurité augmente, on s'apperçoit que les tentes des Pruffiens font encore dreffées, & que rien ne remue; au moment où l'on croit le roi de Pruffe perdu fans reffource, on entend un coup de canon partir de la gauche des ennemis; à ce fignal, les tentes s'abbaiffent & laiffent voir l'armée de Frédéric rangée en bataille; deux batteries formidables placées au côtés du camp fur deux collines voisines, font en même temps un feu terrible; la cavalerie pruffienne accourt à toute bride à droite & à gauche, & prend en flanc les efcadrons des alliés. L'infanterie, étonnée par cet appareil nouveau de combat, & foudroyée par les batteries, s'ébranle & perd fes rangs. On fe raffure cependant, & l'on combat avec la plus

intrépide valeur. Le baron de Bretlach, le marquis de Voghera, le baron de Roth, le prince George de Heffe d'Armftat & le prince de Saxe-Hildbourghaufen, mêlés aux cuiraffiers, firent d'abord plier les efcadrons pruffiens, & culbuterent la premiere ligne. Frédé ric accourt, la reforme & la ramene au combat; elle donne avec une nouvelle impétuofité fur les cuiraffiers, & leur fait perdre du ter

rein.

Le combat ne fut pas long; le désordre avoit été d'abord fi général, que l'on fut bientôt obligé de se servir du corps de réserve. Il fut conduit au feu par le prince de Soubise, fuivi du comte de Revel & du marquis de Caftres. Ce dernier, fans chapeau, ayant reçu deux coups de fabre fur la tête, exhorte fes foldats à tenir ferme & continue à montrer l'exemple. Cependant le corps de réserve alloit être culbuté par la fupériorité du nombre; le prince de Soubife s'en apperçoit en combattant, il vole auffi-tôt à fa gauche, en ramene quatre nouveaux régimens, & à leur tête il s'enfonce dans les efcadrons pruffiens.

Ce renfort rétablit le combat, & fait

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