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Hift. liv.

LXVIII. .

micide, par exemple, devoit être expić .par une pénitence de dix ans : il falloit cent ans pour dix homicides : ce qui rendoit les pénitences impoffibles & les canons ridicules. Auffi n'étoit-ce pas ainfi que l'entendoient les anciens. Je croi bien que le nombre de pechez de même efpece ajoûtoit à la rigueur de la pénitence, qui étoit toûjours foumife à la difcretion des évêques : mais enfin elle se mesuroit à proportion de la vie des hommes, & on n'obligeoit à faire pénitence jufques à la mort, que pour certains crimes les plus énormes.

Depuis que l'on eût rendu les pénitences impoffibles, à force de les multiplier, il fallut ve52. Burch. nir à des compenfations & des estimations lib. VI. c. telles qu'on les voit dans le decret de Burchard Dam. Vita & dans les écrits de Pierre Damien. C'étoit SS. Rod. & des pfeaumes, des génuflexions, des coups de Domin. c. 8. difcipline, des aumônes, des pelerinages : tou

12. 14. Pet.

10,

tes actions que l'on peut faire fans fe convertir. Ainfi celui qui en recitant des pfeaumes ou fe flagellant, rachetoit en peu de jours plufieurs années de pénitence, n'en retiroit pas le fruit qu'elle eût produit: favoir d'exciter & de fortifier les fentimens de componction, par de longues & frequentes reflexions ; & de détruire les mauvaises habitudes, en demeurant long-tems éloigné des occafions, & pratiquant long-tems les vertus contraires. C'eft ce que ne faifoient pas des genuflexions ou des prieres vocales. Les pénitences acquittées par autrui le faifoient beaucoup moins, & les difciplines qu'un faint moine fe donnoit pour un pécheur, n'étoient pas pour ce pécheur des pénitences medicinales. Car le peché n'eft pas comme une dette pecuniaire, que tout autre peut payer à la décharge du débiteur & en quelque monnoye que ce foit: c'eft une maladie qu'il faut guerir en

la perfonne du malade. Auffi un concile natioHift. liv. nal d'Angleterre tenu l'an 747. condamnoit ces xxxvi11. penitences acquittées par autrui, & en appor- 54. tom. 6. toit cette raison remarquable: que par ce moyen cone.p.1565. les riches fe fauveroient plus aisément que les

pauvres,contre la parole expreffe de l'évangile.

Un autre abus furent les penitences forcées. Cone. Tolet ; J'en trouve en Espagne dès le feptiéme fiécle. 6. Enfuite les évêques voyant plufieurs pécheurs Hift. liv. qui ne venoient point fe foumettre à la peni- LIV. n. 23. tence, s'en plaignirent dans les parlemens,

Conc. Tri

prierent les princes de les y contraindre par bur.an. 895. leur puiffance temporelle. C'étoit bien igno- c. 2. rer la nature de la penitence, qui confifte dans le repentir & dans la converfion du cœur : c'étoit mettre le pecheur, qui pour prévenir la juftice divine fe punit volontairement lui-même, au rang du criminel, que la juftice humai

66.

ne punit malgré lui. Je compte entre les peni- Hift. liv, tences forcées, les défenfes que les évêques fai- LI. n. 8. foient à des coupables non penitens, de man- Nic. 1. ep, de la chair, ger de porter du linge, de monter å cheval & d'autres femblables. Si les coupables les obfervoient, j'admire leur docilité : s'ils ne les obfervoient pas, j'admire la fimplicité des évêques.

L'autre remede contre les défordres du dixiéme fiécle furent les excommunications & les autres cenfures eccléfiaftiques. Le remede étoit bon en foi, mais à force de le pouffer on le rendit inutile. Les cenfures ne font des peines que pour ceux qui les craignent: car que ferviroit de défendre à un Juif ou à un Mahometan l'entrée de l'églife, ou l'ufage des facremens? Donc quand un Chrétien eft affez méchant pour méprifer les cenfures, ou affez fort pour les violer impunément, elles ne font que l'irriter fans le corriger: parce qu'elles ne font fondées

XVII.
Cenfures,

que fur la foi & fur le refpect de la puiffance de l'églife. Il n'en eft pas de même des peines temporelles tout homme craint naturellement la perte de fes biens, de fa liberté, de fa vie.

C'eft fur ces principes que les anciens avoient fi fagement reglé l'ufage des peines fpirituelles.. La difcipline ne fut jamais plus févere que du temps des perfécutions. Comme tous ceux qui fe faifoient Chrétiens le faifoient de bonne foi & après de longues épreuves, ils étoient dociles & foumis à leurs fuperieurs. Si quelqu'un ne vouloit obéir, il avoit la liberté de fe retirer & de retourner au paganisme, fans être reAug. 111 tenu par aucun refpect humain; & l'église en cont. Parm. étoit délivrée. Mais en ces tems-là même on évitoit tant qu'il étoit poffible, d'en venir à cette extrêmité, & l'église fouffroit dans fon fein jufques à de mauvais pafteurs, plûtôt que de s'expofer au péril de rompre l'unité.

Cypr. ferm.

de laps.

c. 2. n. 8.

pas

Depuis que les Chrétiens furent devenus le plus grand nombre, l'église fut encore plus réfervée à ufer de fon autorité ; & faint Auguftin nous apprend, non comme une difcipline nouvelle, mais comme l'ancienne tradition,qu'elle bid. n. 13. toleroit les pechez de la multitude, & n'em14. &c.

ployoit les peines que contre les particuliers: lorfqu'un méchant fe trouvant feul au milieu d'un grand nombre de bons, il étoit vrai femblable qu'il fe foumettroit, ou que tous s'éleveroient contre lui. Mais, ajoûte-t'il, quand le méchant eft affez fort pour entraîner la multitude, ou quand c'eft la multitude qui eft coupable, il ne refte que de gémir devant Dieu & d'exhorter en général, profitant des occafions où le peuple eft mieux difpofé à s'humilier, comme dans les calamitez publiques.

Suivant ces fages maximes, le pape Jules prit la défense de faint Athanafe perfécuté &

écrivit

écrivit en fa faveur ; & le pape Innocent en ufa de même à l'égard de faint Chryfoftôme : mais

Hift. liv XII. n. 4.

ils fe garderent bien de prononcer ni dépofi- 24. liv. xxi. tion, ni excommunication contre les évêques . 49. 50. qui avoient condamné injuftement ces grands faints fçachant bien qu'ils n'euffent pas été obéis, & que c'eût été commettre inutilement leur autorité. On étoit encore bien plus éloigné d'excommunier les empereurs fuffent-ils hérétiques & perfécuteurs de l'églife, comme Conftantius & Valens : au contraire, faint Ba- liv. XVI., file reçut à l'autel l'offrande de ce dernier. 48. C'eft qu'on voyoit clairement, qu'une autre conduite n'eût fait que les irriter davantage. Il eft vrai que faint Ambroife défendit à Theodofe l'entrée de l'églife, parce qu'il connoiffoit les pieufes difpofitions de ce prince, & fçavoit qu'il l'ameneroit par cette rigueur à une pénitence

falutaire.

de

L. n. 4. 1.

52.

Mais je ne comprends pas ce que prétendoit Nic. 1. p. obtenir le pape Nicolas I. par les lettres du- 8.9 hift. l. res qu'il écrivoit à l'empereur Michel, protecteur de Photius; & furtout par la menace, faire brûler publiquement à Rome la lettre de ce prince. Ne favoit-il pas que c'étoit un jeune extravagant & un impie, comme je viens de le marquer? A quoi bon ufer de cenfures contre Photius, dont il connoiffoit l'audace & la puiffance? Dès-lors, c'est-à-dire, vers le milieu du neuviéme fiécle, on avoit oublié la difcrétion de la fage antiquité. Il fembloit qu'il ne fut queftion que de parler & d'écrire, fans en prévoir les conféquences: les formules ordinaires d'excommunications étant ufées, comme trop fréquentes, on en ajouta de nouvelles pour les rendre plus terribles: on employa les noms de Coré, Dathan & Abiron & de Judas, avec toutes les malédictions du pleaume cent

K

huitiéme, accompagnées de l'extinction des chandelles & du fon des cloches. Je m'imagine voir un foible vieillard, qui se sentant méprifé de fes enfans, & ne pouvant plus fortir de fon lit pour les châtier comme auparavant; leur jette ce qu'il rencontre fous fa main, pour fatisfaire fa colere impuiffante, & forçant le ton de fa voix, les charge de toutes les imprécations dont il fe peut avifer. On s'éloigna de plus en plus de l'ancienne moderation pendant le dixiéme & l'onziéme fiécle. Les évêques ne confideroient point l'effet, mais feulement leur pouvoir & la rigueur du droit: comme s'ils euffent été forcez par une neceffité fatale à prononcer les peines canoniques contre tous ceux qui les avoient meritées. Ils ne voyoient pas que ces foudres fpirituels portent à faux contre ceux qui ne veulent pas en avoir peur. Que loin de les corriger on ne fait que les endurcir, & leur donner occafion de commettre de nouveaux crimes, que les cenfures au lieu d'être utiles à l'églife lui deviennent pernicieuses attirant le plus grand de tous les maux, qui eft le fchifme & la défarmant à force de prodiguer fes armes. Enfin que vouloir retrancher de l'églife tous les pécheurs, c'eft faire comme un prince infenfé, qui trouvant la plupart de fes fujets coupables, les feroit paffer au fil de l'épée, au hazard de dépeupler fon état. Vous ne verrez que trop dans la fuite de l'histoire les effets de cette conduite.

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Les papes, il faut l'avouer, fuivirent les préjugez de leur tems: & poufferent encore plus loin que les autres l'ufage des cenfures: à cause de l'autorité de leur fiege, très-grande en ellemême, & étendue au-delà des anciennes bornes par les fauffes décretales. Les plus grands papes & les plus zelez, pour rétablir la difcipline

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