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Hift. 1. XIX. . 38. n. 48.

#. 57.

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Chacun demeuroit en fon ordre, autant que l'évêque jugeoit à propos, & plufieurs y paffoient leur vie. On ne trouvoit pas étrange de voir dans l'églife un homme toujours portier ou lecteur: comme on ne s'étonne point aujourd'hui de voir dans les tribunaux féculiers un huiffier ou un greffier, qui ne devient jamais juge. Les talens naturels font différens & les graces diverfement diftribuées. Tel eft propre à l'action, qui n'est pas propre à l'étude: tel a du zéle & de la prudence, qui n'a pas le don de la parole. La fidélité, l'affiduité & la force du corps, fuffit pour un portier ou facriftain: la charité & la difcrétion fuffit pour un diacre, & ne fuffit pas pour un prêtre, fans la fcience. Au contraire, un prètre fçavant, pieux, éloquent, peut n'avoir pas la force & l'induftrie néceffaire dans les affaires. Les évêques ne faifoient pas lės ordinations pour gratifier les particuliers, mais afin que l'églife fut fervie: ainfi il ne faut pas s'étonner s'ils laiffoient chacun à la place qui lui convenoit le mieux. S'ils les avançoient à un ordre fupérieur, c'étoit à mesure qu'ils en devenoient capables. Un jeune homme n'étoit que lecteur, mais après avoir fait progrès dans la fcience & la piété, il devenoit pretre. Un diacre avoit commencé par être acolyte ou portier.

Ce n'étoit pas le particulier qui fe préfentoit pour demander l'ordination, comme il eût demandé le baptême ou la pénitence. C'étoit le peuple qui demandoit l'ordination de celui dont il connoiffoit le mérite, ou l'évêque qui le choififfoit du confentement du peuple. Le particulier étoit souvent ordonné malgré lui: vous en avez vu plufieurs exemples, faint Auguftin, Paulinien frere de faint Jérôme, faint Paulin de Nole, & tant d'autres. Il en étoit

comme des évêques. On choififfoit les Chrétiens les plus parfaits, par conféquent les plus défintéreffez, qui ne fongeoient qu'à fe cacher, à fe préferver des tentations, à goûter en filence la beauté des véritez éternelles, à s'unir à Dieu par la priere. Il falloit leur faire violence, pour les tirer de ce repos, & les obliger à rentrer dans l'action extérieure & le commerce des hommes, en remédiant à leurs miferes. L'amour de la vérité, dit faint Auguftin, xIx. civit, ne cherche qu'un faint loifir: mais la néceflité c. 19. de la charité fe charge d'affaires juftes.

VII.

des offices,

Hift. I. v1.

Hift. liv.

XVIII. $2.

L'utilité de ce grand nombre d'officiers & de leurs ordres différens, paroiffoit dans les Solemnité affemblées de religion, & principalement au faint facrifice. Car on le célébroit pour l'ordinaire, avec toute la folemnité poffible. Vous avez vu quelques occafions où on faifoit l'o blation en particulier & avec moins de céré monies. Saint-Cyprien parle de celles qui fe faifoient dans les prifons des martyrs, & veut n. 35. qu'il n'y ait qu'un prêtre & un diacre, montrant combien le miniftere du diacre étoit jugé néceffaire. Vous avez vu faint Ambroife 19. 1. XIVA célébrer à Rome dans une maison particuliere, & faint Grégoire de Nazianze le pere, même dans fa chambre. Voilà des meffes particulieres bien anciennes; mais il faut convenir que ces occafions n'étoient pas fréquentes, & que la meffe ordinaire étoit folemnelle c'eft-à-dire, que tous les prêtres ou les évê- Maurs Chr. ques qui fe trouvoient au même lieu, s'af- n. 39. 40. fembloient en une église avec tout le refte du &c. clergé & du peuple, & concouroient tous à une même action, de la maniere que j'ai d'

crite.

On croyoit ne pouvoir jamais affez h rer le fervice divin, l'administration des

n. 16.

puc liv.

cremens, & particuliérement l'euchariftie, Jefus-Chrift fe rend lui-même présent. De-là venoit la magnificence des églifes, dont je vous Fli. I. x. ai donné quelques defcriptions, la multitude *. 3. x1. 45. des vafes d'or & d'argent, l'abondance du lu54. x11. 10. minaire & des parfums. Le grand nombre d'of

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ficiers, portiers, manfionnaires, facriftains, tréforiers, pour garder les vases facrez, & les églifes mêmes, les orner & les tenir propres. Tout cela n'étoit point difficile, même dans les villes médiocres, quand il n'y avoit qu'un feul fervice, & que tout fe raffembloit en un même lieu. Rien n'étoit plus propre à donner au peuple & aux hommes les plus groffiers une haute idée de nos myfteres. Les payens mêmes convenoient que ce facrifice, qu'on leur cachoit avec tant de foin, étoit quelque chofe de grand,puifqu'on le préparoit avec un fi grand appareil. D'ailleurs l'unité de prieres & de facrifice, marquoit mieux l'unité de Dieu, & la communion des faints. Que fi l'on eft en peine comment tout le peuple pouvoit affister à un feul office, il faut s'en rapporter à une expérience de plufieurs fiécles, car on ne dira pas que le nombre des Chrétiens ne fût grand, au moins dès le quatrième. Il eft vrai que l'on célébroit plufieurs meffes de fuite dans la mêEpift. 11. me église quand il étoit befoin, comme le téad Diofc. al. moigne faint Léon. 81.

Après l'euchariftie, rien n'étoit plus folemnel que l'adminiftration du baptême, réservé à deux jours de l'année, précédé de longues préparations, accompagné de tant de prieres & de cérémonies, dont nous gardons encore la formule, conféré dans un baptiftere magnifique, avec des vafes précieux. Tout cela ne contribuoit pas peu à faire concevoir l'importance de cette action, & à rendre ce facrement

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vénérable, à ceux qui le recevoient, aux fidéles qui en étoient spectateurs, & aux infidéles qui en entendoient parler.

VIII.

Pénitence;

Maurs Chr.

n. 25.

Il en étoit de même à proportion de la pénitence. Je vous ai rapporté non-feulement les canons pénitentiaux, mais plufieurs exemples de la maniere dont ils étoient mis en pra-. Hift. 1. v. tique. Vous en avez été fans doute étonné › n. 46. l. ix. particuliérement de ce que les plus anciens ca- u. 14. ~.21. nons font toujours les plus rigoureux, & que 1. xv111. %. du tems même des perfécutions, ce n'étoit 14. 15. 16. point par l'indulgence, mais par la févérité iv. XIX. . des peines, que l'on prétendoit retenir les foi- 52. bles. Cependant dès-là que les canons les plus anciens font les plus févéres, il faut conclure que cette févérité venoit de la tradition des apôtres, c'est-à-dire, de Jefus-Chrift, & par conféquent que c'eft notre faute, fi elle nous paroît exceffive.

Mais, direz-vous, tenir des gens en pénitence pour un feul péché, des quinze & vingt ans, & quelquefois toute leur vie? les tenir des années entiéres hors la porte de l'églife, expofez aux yeux de tout le monde: puis d'autres années dans l'églife, mais profternez : les obliger à porter des cilices, des cendres fur la tête ; a fe laiffer croître la barbe & les cheveux, à jeûner au pain & à l'eau, à demeurer enfermez & renoncer au commerce de la vie : n'étoit-ce pas de quoi défespérer les pécheurs, & rendre la religion odieufe? J'en dirois autant à ne confulter que les idées ordinaires. Mais je fuis retenu, premiérement par les faits que je vous ai rapportez. Je ne les ai pas inventez ; ils ne me feroient pas tombez dans l'efprit; ils font conftans, vous pouvez les vérifier vous-même. Sur quoi je raifonne ainfi : Nous n'avons pas fait notre religion: nous l'avons reçue de nos

peres, telle qu'ils l'avoient reçue des leurs, jufques à remonter aux apôtres. Donc il faut plier notre raifon, pour nous foumettre à l'autorité des premiers tems, non-feulement pour les dogmes, mais pour les pratiques.

pe,

Enfaite examinant les raifons que les anciens nous ont donné de cette conduite fur la pénitence, jeles trouve très-folides. Le péché, difent-ils, eft la maladie de l'ame: or les maladies ne fe guériffent pas en un moment. Il faut du tems pour éloigner les occafions, & diffiper les images criminelles, pour appaiser les paffions, faire concevoir l'énormité du péché, fonder à fonds tous les replis d'une confcience, déraciner les mauvaises habitudes, en acquérir de contraires, former des réfolutions folides, & s'affurer foi-même de la fincérité de fa converfion. Car fouvent un homme fe tromfans le vouloir, par une ferveur fenfible, mais paffagere. D'ailleurs la longueur de la pénitence étoit propre à imprimer l'horreur du péché, & la crainte de fa rechûte. Celui qui pour un feul adultere, fe voyoit exclus des facremens pendant quinze ans, avoit le loifir de connoître le crime qu'il avoit commis, & de penfer combien il feroit plus horrible, d'être à jamais privé de la vue de Dieu. Celui રે qui étoit tenté de commettre un pareil péché, y penfoit à deux fois, pour peu qu'il eût de religion; quand il prévoyoit qu'un plaifir d'un moment auroit infailliblement, dès cette vie, de fi terribles fuites, ou de faire pendant quinze ans une rude pénitence, ou d'apoftafier & retourner au paganifme. Car un an de fouffrances préfentes frappe plus l'imagination, qu'une éternité après la mort. L'éclat des pénitences faifoit fon effet, non-feulement fur les pénitens,mais fur les fpectateurs,l'exemple d'un

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