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La doctrine de la grace eft une conféquence de celle de l'Incarnation. Le Fils de Dieu s'eft fait homme pour notre falut; mais s'il ne l'a procuré que par fon exemple, il n'a rien fait que n'eût pû faire un pur homme, tel que Moife & les prophétes. Or Jefus-Chrift a fait plus: il nous a mérité par fon fang, la rémiffion de nos péchez: il nous a envoyé le SaintEfprit, , pour nous éclairer & nous donner fon amour, qui nous fait accomplir fes commandemens, en furmontant la résistance de notre nature corrompue. C'eft ce que faint Paul a fi bien enseigné, & faint Auguftin fi bien foutenu contre les Pélagiens, qui donnoient tout aux forces naturelles du libre arbitre, enforte que felon eux,ils n'éoient pas redevables qu'à euxmêmes de leur falut, ils ne devoient rien à Jefus-Chrift, & s'étoient rendus meilleurs, que Dieu ne les avoit faits. Pour combattre cette erreur, faint Auguftin a fouvent employé les pratiques de l'églife. La priere, qui en général feroit inutile, fi ce qui nous importe le plus, qui eft de nous rendre bons, dépendoit de nous. La forme des prieres, qui a toujours été de demander à Dieu par Jefus-Chrift, de nous délivrer des tentations, de nous faire accomplir ce qu'il nous commande, de nous donner la foi & la bonne volonté. L'ufage de baptifer les petits enfans, pour la remiffion des péchez: preuve évidente de la créance du péché originel. Tous les peres en ont ufé de même, à l'égard de tous les mysteres, & ont employé les pratiques immémoriales de l'églife, comme des preuves fenfibles de fa créance. Ils ont prouvé la Trinité par la forme du baptême, où les trois perfonnes divines font invoquées également; & ils ont infifté fur les trois immerfions qui fe pratiquoient alors, comme une preuv

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n. I.

anath.

homil. de

cana,

Liv. xxv. ". de la diftin&tion des perfonnes. Ils ont tiré de 22. XXVIII, l'euchariftie > une preuve de l'Incarnation : Cyrill. puifqu'il ne ferviroit de rien de recevoir la 11. chair d'un pur homme, & qu'il ne feroit pas permis de l'adorer. Ce qui montre une providence particuliere de Dieu fur fon église, d'avoir attaché à des pratiques & à des cérémonies fenfibles, la créance des myftéres les plus relevez, afin que les fidéles, même les plus fimples & les plus groffiers, ne puffent les ignorer, ni les oublier. Car il n'y a perfonne qui ne fçache comment il a vu toute fa vie prier dans l'église, administrer le baptême & les autres fa

47.

Liv. 111. n.

41. IV.

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n.

XXVII. n. I.

Liv. XX. n.

cremens.

La doctrine des facremens en général a été folidement établie par les difputes contre les Donatiftes, où il a été montré que la vertu Liv. xx. n. des facremens ne dépend point du mérite ou de l'indignité du miniftre, & que qui que ce foit qui baptife à l'extérieur, c'est toujours 26 VI. n. Jefus-Chrift qui baptife intérieurement. La 18. v11. z. créance de l'églife fur chacun des autres facre15. XVIII. mens, & fur l'euchariftie en particulier, eft *. 54. 55. auffi prouvée dans ces premiers fiécles, par ". 14 des autoritez inconteftables, de faint Juftin de faint Irenée, d'Origene, de faint Cyprien, de faint Ambroife, de faint Cyrille de Jéruralem, de faint Gaudence, de faint Cyrille d'Alexandrie. Enfin les mêmes difputes contre les Donatiftes, ont donné occafion d'établir invinciblement l'article de l'églife. On a prouvé contre eux, qu'elle eft catholique ou univerfelle, c'eft-à-dire, répandue dans tous les lieux & dans tous les tems, non pas renfermée dans certains pays, & réduite à une petite société, féparée du refte depuis un tems, mais perpétuelle & infaillible, fuivant la promeffe de Jefus-Chrift. Qu'elle eft fainte & fans tache,

45.47.

mais de telle forte, que les méchans ne font pas exclus de fa fociété extérieure, que le bon grain croît pêle-mêle avec l'ivraye, jufques à la moiffon, c'eft-à-dire, la fin des fiécles. Qu'elle eft apoftolique, c'eft-à-dire, qu'elle fe connoît par la fucceffion des évêques, principalement dans les fiéges fondez immédiatement par les apôtres, & par l'union avec la chaire de faint Pierre, centre de l'unité catholique.

XIII.

Voilà le fond de la doctrine. Voyons maintenant la maniere de l'apprendre & de l'enfei- Méthode gner. Je ne vois point dans ces premiers fié- d'étudier. cles, d'autres écoles publiques pour les clercs, que pour le commun des Chrétiens, c'eft-àdire, les églifes, où les évêques expliquoient affiduement l'écriture fainte, & en quelques grandes villes une école établie principalement pour les catécuménes, où un prêtre leur expliquoit la religion qu'ils vouloient embraffer: comme à Alexandrie S. Clément & Origene. Il eft vrai que les évêques avoient d'ordinaire auprès d'eux de jeunes clercs qu'ils inftruifoient avec un foin particulier, comme leurs enfans, & c'eft ainfi que fe font formez plufieurs grands docteurs de l'églife. Saint Athanafe près de l'évêque faint Alexandre, faint Jean Chryfoftome près de faint Melece, faint Cyrille près de fon oncle Theophile. De-là vient qu'il fortit tant de faints évêques de l'école de faint Auguftin & de celle de faint Fulgence.

Il n'étoit point néceffaire, pour être prêtre ou évêque, de fçavoir les fciences profanes c'eft-à-dire,la grammaire, la réthorique, la dialectique, & le refte de la philofophie, la géométrie & les autres parties de mathématique. Les Chrétiens nommoient tout cela les études du dehors, parce que c'étoit les payens qui les

avoient cultivées, & qu'elles étoient étrangeres à la religion. Car il étoit bien certain que les apôtres & leurs premiers difciples ne s'y étoient pas appliquez. Saint Auguftin n'en eftimoit pas moins un certain évêque de ses voiHift. 1. xi. fins, quoiqu'il ne fçût ni grammaire, ni dialectique ; & nous voyons que l'on élevoit quelEp 34. ad quefois à l'épifcopat de bons peres de famille, Efeb.

14. 23.

des marchands, des artifans, qui vraisemblablement n'avoient point fait ces fortes d'étu des. La connoiffance des langues étoit encore moins nécessaire, les payens même ne les étudioient guéres, que pour la néceffité du commerce: fi ce n'eft que les Romains qui vouloient étre fçavans, apprenoient le Grec. On faifoit partout les lectures & les prieres publiques dans la langue la plus commune du pays, ainfi la plupart des évêques & des clercs n'en fçavoient point d'autre. C'eft-à-dire, le Latin dans tout l'Occident, le Grec dans la plus grande partie de l'Orient, le Syriaque dans la haute Syrie, enforte que dans les conciles, où des évêques de différentes nations fe trouvoient raffemblez, ils parloient par interprétes. On trouve même quelquefois des diacres qui ne Hift. liv. fçavoient pas lire : car c'eft ce que l'on appelXVI. . 13. loit alors, n'avoir point de lettres.

Quelle fcience donc demandoit-on à un prêtre ou un évêque? D'avoir lû & relû l'écriture fainte, jufqu'à la fçavoir par cœur, s'il étoit poffible de l'avoir bien méditée, pour y trouver les preuves de tous les articles de foi, & de toutes les grandes regles des mœurs & de la difcipline; d'avoir appris, foit de vive voix, foit. par la lecture; comment les anciens l'avoient expliquée, de fçavoir les canons, c'est-à-dire, les regles de difcipline écrites ou non écrites, de les avoir vu pratiquer, & en avoir foigneu

fement obfervé l'ufage. On fe contentoit de ces connoiffances, pourvû qu'elles fuffent jointes à une grande prudence, pour le gouvernement, & une grande piété. Ce n'eft pas qu'il n'y ait toujours eu des évêques & des prêtres très-inftruits des fciences profanes: mais c'étoit pour l'ordinaire ceux qui s'y étoient appliquez avant leur converfion, comme S. Bafle & faint Auguftin. Ils fçavoient bien enfuite Hift. 1.XX1 les employer pour la défenfe de la vérité, & répondre à ceux qui en vouloient blâmer l'ufage, comme faint Auguftin au grammairien Crefconius.

XIV.

Méthode d'enseigner.

Quant à la maniere d'enfeigner, ils fe conduifoient différemment avec les infidéles, les enfans de l'églife & les hérétiques. Les premieres inftructions pour les infidéles, tendoient à corriger leurs moeurs. Car les peres croyoient inutile de parler de religion à des hommes encore pleins de leurs paffions & de leurs faux préjugez. Ils fe contentoient de prier pour eux, leur donner bon exemple, les attirer par la patience, la douceur, les bienfaits temporels, jufqu'à ce qu'ils viffent en eux un défir fincere de connoître la vérité & d'embraffer la vertu. Quand ils trouvoient des efprits curieux & élevez, ils employoient les fciences humaines, pour les préparer à la vraie philofophie. Voyez Hift. 1. v、 comment Origene inftruifit faint Grégoire". 43. " 57% Thaumaturge.

A l'égard des fidéles, on les entretenoit dans la doctrine de l'églife, les précautionant & les fortifiant contre les héréfies, & leur donnant des regles pour la conduite & la correction des mœurs. C'eft la matiere de tous les fermons des peres, la morale & les héréfies du tems. Sans cette clef, fouvent on ne les entend ou du moins on ne les peut goûter. Et c'es

pas,

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