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XVII.

tiquité.

l'an

Nous devons donc à Dieu des actions de graces infinies, de nous avoir confervé ce pré-Qu'il faut cieux tréfor, ces écrits des peres, où nous. trouvons le fonds de la doctrine, la maniere de l'enfeigner, les regles & les exemples de la difcipline & des mœurs. N'eft-ce pas un miracle de la providence, que tant d'écrits foient venus jufqu'à nous, au travers de treize ou quatorze fiécles, après tant d'inondations de peuples barbares, tant de pillages & d'incendies, malgré la fureur des infideles, la malice des hérétiques, l'ignorance & la corruption des cinq ou fix derniers fiécles? N'eft-ce pas cette providence, qui depuis près de trois cens ans, a excité tant de perfonnages pieux ou cu-> rieux à rechercher tous les reftes de cette fainte antiquité & à étudier les langues mortes? qui a fait trouver aux Grecs, opprimez par le Turc, des afiles favorables en Italie & en France? & qui en même tems a fait inventer l'imprimerie, pour conferver à jamais tant de livres fauvez du naufrage?

Ne doutons pas que Dieu ne nous demande un compte exact de ce talent, particuliérement à nous autres eccléfiaftiques. L'étude de cette fainte antiquité, doit être l'occupation de notre loifir, ou des intervales de notre travail. Je fçai ce qui en détourne ordinairement: on la croit infinie, & on n'eft pas affez perfuadé qu'elle foit utile. On croit donc gagner du tems, en lifant quelque auteur moderne qui ait recueilli en abregé fur la lecture des anciens, ce qui eft le plus d'usage selon nos mours. Mais ne vous y trompez pas, aucun de ces modernes ne vous fera connoître l'antiquité comme elle eft: chacun, même fans y penfer, y ajoute du fien, & y mêle les préju gez de fon pays & de fon tems, fans compter

que plufieurs des modernes les plus eftimez, n'ont pas eux-mêmes affez connu l'antiquité. De plus leurs ouvrages font remplis de grand nombre de divifions & de queftions fcholaftiques, qui ne nous apprennent point le fonds des chofes. Et quant à ce que l'on dit, qu'il fe faut conformer à l'usage préfent, cela est vrai, pour les pratiques expofées aux yeux du public; comme les cérémonies du service divin, & les formalitez judiciaires: mais chaque particulier peut & doit s'efforcer de mieux vivre que le commun, autrement il faudroit marcher dans le torrent de la corruption générale. Il en eft de même des études, & fans réformer le public, chacun peut fuivre la méthode qui lui paroît la meilleure.

Mais fi nous voulons fonder le fonds de notre cœur : nous craignons l'antiquité, parce qu'elle nous propofe une perfection que nous ne voulons pas imiter. Nous difons qu'elle n'eft pas pratiquable, parce que fi elle l'étoit, nous aurions tort d'en être fi éloignez; nous détournons les yeux des maximes & des exemples des faints, parce que c'eft un reproche continuel à notre lâcheté. Mais qu'y gagnerons-nous ? ces véritez & ces exemples ne feront pas moins, foit que nous y penfions ou non ; & il ne nous fervira de rien de les ignorer, puisqu'étant fi bien avertis, notre ignorance ne peut être qu'affectée. Au contraire fi nous avons le courage de regarder cette fainte antiquité, & de la préfenter aux autres de tous côtez, & de toutes les manieres poffibles, il faut espérer qu'à la fin nous aurons honte d'en demeurer fi éloignez, & qu'avec le secours de la grace nous ferons quelque effort, afin de nous en rapprocher. L'expérience du paffé doit nous encourager. Combien la discipline de l'églife s'eft-elle rele

vée depuis un fiécle, par les réglemens du concile de Trente, les travaux de faint Charles, l'inftitution des féminaires, tant de réformes dans les ordres religieux? D'où font venus tous ces biens, finon de l'étude de l'antiquité, & que ne pouvons-nous point espérer, fi nous fuivons ces grands exemples?

Mais afin que cette étude ne foit pas infinie & par conféquent inutile, il y faut du choix & de l'ordre. Il faut confulter ceux qui ont le mieux lû l'antiquité eccléfiaftique, pour en prendre ce qui nous convient, fuivant la portée de notre efprit & la néceffité de nos emplois. Il faut que cette étude foit férieuse & chrétienne. Gardons-nous de la curiofité & de la vanité. De vouloir montrer que nous avons beaucoup lû, que nous avons découvert le fens d'un paffage, ou déterré quelque antiquité. Ne cherchons dans les peres ni les pensées brillan

tes,

ni les paroles pompeufes, ni ces beaux paffages, dont il y a quelque tems on ornoit les harangues & les plaidoyers. Cherchons-y le vrai fens de l'écriture, les preuves folides des dogmes, les regles sûres de la difcipline & des mours. Cherchons-y la méthode de convertir les infidéles & de combattre les hérétiques: l'art de conduire les ames, les voies intérieurés, la vraie piété. Et tout cela non pour en difcourir, mais pour le réduire en pratique.

Etudions furtout leur prudence & la difcrétion des anciens, pour nous accommoder à l'état préfent des chofes, & ne pas rendre odieufes leurs faintes maximes, en les pouffant trop loin, ou les appliquant mal-à-propos. Evitons l'impatience & l'empreffement. Pour bien rétablir l'antiquité, il faudroit la ramener toute entiere: une partie fans l'autre, n'aura point de proportion avec le refte, & fera déplacée.

1

1.

des barba

res.

Attachons-nous d'abord au plus effentiel, à
nous réformer nous-mêmes par une grande
application à la priere, au réglement de notre
intérieur & de nos mœurs. Enfuite faifons part
aux autres des véritez que Dieu nous aura fait
connoître, fans contention, fans aigreur, fans
reproches. Pratiquons les premiers ce que nous
croyons le meilleur, & qui dépend de nous.
Revenons à la priere, & attendons avec pa-
tience qu'il plaise à Dieu d'avancer fon œuvre.
Ce font les meilleurs moyens de rendre utile
la connoiffance de l'hiftoire eccléfiastique.

TROISIE'ME DISCOURS
fur l'Hiftoire Ecclefiaftique.

Es beaux jours de l'églife font passez
mais Dieu n'a pas rejetté fon peuple, ni
oublié fes promeffes. Regardons avec crainte
les tentations dont il a permis que fon église
fût attaquée pendant les cinq fiécles qui ont
fuivi les fix premiers ; & confidérons avec action
de graces les moyens qu'il a employez pour la
foutenir. Ce font des objets dignes de notre
attention.

Rome idolâtre fouillée de tant de crimes &

Inondation enyvrée du fang de tant de martyrs devoit être punie, & la vengeance divine devoit éclater fur elle à la face de toutes les nations. Saint Jcan l'ayant appris de Jefus-Christ même, avoit dépeint dans fon Apocalypfe par des imaApocalyp. affreufes la chûte de cette nouvelle Baby

Mœurs des

Chr. c. 56.

XVII.XVIII.

ges

Ione. L'exécution suivit en fon tems: Rome
ceffa d'être la capitale de l'empire, depuis que
Conftantin en eut tranféré le fiége à Byzance;
& depuis que l'empire fut partagé, les empe

reurs d'Occident réfiderent à Ravenne, à Milan, & par tout ailleurs qu'à Rome. Ainfi elle perdit peu à peu fon éclat, fes richeffes, fon peuple. Nous avons vu la trifte peinture qu'en faifoit faint Grégoire. Cependant elle fut prife Hift. liv. & pillée plufieurs fois par les barbares, qui ra- xxxv. n. 40. vagerent & mirent en piéces tout l'empire d'Occident. Or je compte cette inondation des barbares pour la premiere tentation extérieure de l'églife, depuis les perfécutions des empereurs payens.

Car ces barbares dans les commencemens de leurs courfes rempliffoient tout de fang & de carnage, brûloient les villes entieres, maffacroient les habitans, ou les emmenoient efclaves, jettoient par tout la terreur & la défolation. Les perfecutions les plus cruelles fous l'empire Romain n'étoient ni continuelles, ni univerfelles, & il reftoit un peuple de payens, de méme langue & de même nation que les Chrétiens. Ils les écoutoient fouvent, & fe convertiffoient de jour en jour. Mais où il ne refte plus d'hommes, il n'y a plus d'églises; & comment convertir des brutaux toujours armez, toujours courans au pillage, & dont on n'entend pas la langue?

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Hom. 18. in

Ezech.

De plus ces barbares qui ruinerent l'empire Romain, étoient ou payens ou hérétiques enforte que même après les premieres fureurs, quand ils furent affez apprivoifez avec les Romains pour s'entendre l'un l'autre & fe parler de fang froid, les Romains étoient toujours Hift. liv. odieux, par la diverfité de religion. Vous avez vu la cruelle perfécution des Vandales en Afrique.

Ces barbares, il eft vrai, fe convertirent, les uns plutôt, les autres plus tard; & dans leur converfion Dieu ne fit pas moins éclater fa

xxx. n.

10. &c.

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