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DOMINIQUE ZAMPIERI.

DOMINI-
QUIN.

E Dominiquin nommé Zampieri a été contemporain du Guide, tous deux difciples des Carrache, ils ont exercé leurs pinceaux à l'envi l'un de l'autre. Zampieri naquit à Bologne en 1581. dans une condition affez baffe. Son pere qui le deftinoit à la pratique, ne changea d'idée que par les furprenantes difpofitions de fon fils pour la peinture. Il le donna à Denis Calvart. Ce peintre qui le furprit copiant un deffein du Carrache, le frappa très-rudement. C'en fut affez pour paffer de cette école dans celle des Carrache. On appelloit Dominique Zampieri (a) Dominichino à cause de fa grande jeuneffe. Il travailloit touII. p. 4. P. 327. jours écarté des autres éléves, & remportoit tous les prix de

(4) Et parabrevia

tion Menichino.

Malvafia Tom.

l'Académie. Son application à l'étude continuoit même dans le temps que fes camarades fe divertiffoient, & Louis Car- DOMINIrache le propofoit pour modéle.

Perfonne n'étoit auffi long à opérer que le Dominiquin, il méditoit long-temps avant que de fe mettre à l'ouvrage; ce qui le fit nommer par fes camarades il bove della pittura ; prétendant que ce qu'il deffinoit trop lentement étoit lourd & fentoit le joug. Sur quoi Annibal difoit que ce boeuf labouroit un champ très-fertile qui nourriroit un jour la peinture. Le cardinal Agucchi qui le protégeoit le reçut dans fon palais & lui fit faire plufieurs tableaux, entr'autres la prison de faint Pierre & les trois lunettes de l'histoire de faint Grégoire qui font fous le portique de faint Onofre.

L'amitié étroite qui fe lia entre l'Albane & le Dominiquin excitoit leur émulation fans causer entr'eux aucune jaloufie. Ce dernier fut à Modéne, à Reggio, à Parme chercher dans les ouvrages du Corrége & du Parmefan la perfection de fon art. Mais l'ennui de ne point voir fon cher Albane le fit partir fix mois après pour Rome, où fon ami le reçut dans fa maison & le défraya de tout pendant deux ans.

Zampieri vifitoit fouvent le grand Annibal occupé pour lors à peindre la galerie Farnése, à la recommandation de l'Albane il fut employé à ébaucher plufieurs figures & à peindre au-deffus d'une porte une Nymphe qui careffe une Licorne, devife de la maison Farnéfe. Il représenta encore dans la Loge du jardin la mort d'Adonis, & Vénus qui fe jette de fon char pour le fecourir.

Annibal jaloux du mérite du Guide ne fut pas fâché d'avoir le Dominiquin à lui oppofer, il le foutenoit en tout, l'aidoit de ses confeils, & il lui fit donner à faint Grégoire un des deux grands tableaux qui avoient été promis au Guide. Le Dominiquin y peignit en concurrence le martyre de faint André. Les graces du Guide, le fuave de fon pinceau charmoient tout le monde, mais les expreffions naturelles & le coloris du Dominiquin lui gagnérent les fuffrages des véritables connoiffeurs.

Annibal, pendant que le Dominiquin peignoit ce tableau, le furprit dans une action de colére, lorfqu'il deffinoit le foldat qui menace le faint, j'ai, dit-il, en l'embraffant, beaucoup appris de vous en ce moment. Il fut fi content de ce morceau

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qu'il présenta l'auteur au cardinal Farnéfe, dont il reçut orDOMINI- dre de travailler à une chapelle de l'Abbaye de Grotta Ferrata. QUIN. Il y a traité l'histoire de faint Nil Abbé, & la voûte eft peinte en ornemens de Stuc, feints fi-habilement, que les connoiffeurs y font trompés.

Le Prélat Agucchi qui aimoit le Dominiquin fon compatriote, l'introduifit chez le cardinal Aldobrandin neveu de Clément VIII. il l'envoya à fa belle maifon de Frefcati peindre les dix morceaux à frefque de l'hiftoire d'Apollon, qui ornent le falon où l'on voit la fontaine du Parnaffe. Le Dominiquin dans tous ces morceaux ne fe démentit point de la haute eftime qu'on avoit de lui: après la mort d'Annibal il alla peindre à Baffano l'hiftoire de Diane dans une chambre du Marquis Juftiniani, & il y trouva l'Albane qui peignoit la galerie de cette maison. Enfin le tableau de la communion de faint Jérôme qu'il fit pour l'Eglife de la Carità le fit regarder comme un des premiers peintres de fon temps. Ce ta(4) Le Pouffin, bleau eft fi parfait au sentiment de deux grands ( a ) hommes, qu'il peut aller de pair avec la transfiguration de Raphaël.

André Sacchi.

La jaloufie de fes ennemis s'accrut avec fa renomméc. Lanfranc un des plus animés, fit courir le bruit qu'il avoit pris la pensée de fon faint Jérôme, de celui qu'Augustin Carrache avoit fait à la Chartreuse de Bologne, & il le fit graver à l'eau forte par Perrier. La calomnie fut découverte & l'on reconnut la différence des deux tableaux. La chapelle de fainte Cécile dans l'Eglife nationale de faint Louis des François par fa beauté redoubla l'envie de ses compétiteurs, il faifoit des études furprenantes pour chaque morceau, quoiqu'il n'en fût pas payé largement. Enfin il se flatta d'un meilleur traitement dans les autres villes, & il fut chargé d'une chapelle pour la Ville de Fano; enfuite il se rendit à Bologne, il y revit fes parens & fe peignit avec toute fa famille, là le fameux tableau du rofaire l'occupa pendant deux ans; il fe maria enfuite à une femme aimable qui lui fervit toujours de modéle dans fes ouvrages; il en eut plufieurs enfans dont un fut tenu fur les fonds par le cardinal Ludovifi. Les bons peintres de Bologne, & furtout le Guerchin, lui firent sentir la néceffité de retourner à Rome. Dans ce temps-là le cardinal Ludovifi étant devenu Pape fous le nom de Grégoire XV.

le rappella en cette ville, & le déclara fon premier peintre & architecte du Vatican.

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Le chagrin qu'il eut de fe voir préférer le Guide en plufieurs occafions, ne l'empêchoit point de l'aborder le foir à la promenade, & depuis ils se rendirent service mutuellement. Le cardinal Montalte employa le Dominiquin à peindre les quatre angles de faint André de la Valle & fans la mort de ce cardinal, il auroit peint la coupole dont il avoit fait trois deffeins différens : la brigue du Tiarini, du Geffi, du Colona & du Sementi lui enleva ce morceau pour le donner au Lanfranc. Il peignit encore les quatre angles de faint Charles dè Catenari. Le Dominiquin piqué de cette préférence, & mécontent du peu de fortune qu'il avoit fait à Rome, réfolut de quitter cette ville pour la feconde fois. On lui avoit ôté à la mort du Pape fon employ d'architecte du Vatican, lorfque par fon mérite il pouvoit efpérer celui d'architecte de la fabrique de faint Pierre. Malgré le confeil de fa femme & de fes amis, il partit pour Naples, ayant accepté le grand ouvrage de la chapelle du tréfor que la crainte du poifon avoit fait abandonner fucceffivement à trois (a) fameux peintres. La jaloufie des (a) Le Guide, le Jofepin,& le Gefi. Napolitains étoit telle, qu'ils ne vouloient pas fouffrir qu'un étranger vînt leur enlever un ouvrage qui devoit leur appartenir & les immortalifer.

Arrivé à Naples avec fa famille, on lui donna un logement dans la maison du trésor, & l'on convint d'un honoraire confidérable à tant par figure, avec promeffe d'une récompense proportionnée à la grandeur de l'entreprife. Cette chapelle du tréfor eft fi grande, qu'elle contient fept Autels avec une coupole, elle eft fituée dans l'Eglife Cathédrale qui est dédiée à faint Janvier patron de cette ville. Il repréfenta quelques actions de ce faint dans les angles de la coupole, les députés du tréfor firent abattre l'ouvrage commencé par Belifaire & autres peintres, c'en fut affez pour lui attirer de nouveaux jaloux entr'autres Ribera qui joüiffoit d'une grande faveur auprès du Viceroi.

Auffitôt que le Dominiquin eut découvert une partie de fa chapelle à l'occafion d'une fête, les critiques vinrent en foule, & indifpoférent contre lui les députés de la chapelle & le Viceroi. Ce dernier lui commanda quelques tableaux qu'il refufa de faire fans la permiffion des députés qui le preffoient

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de finir leur chapelle. Il fit ces tableaux, & le Viceroi fuivant l'idée de Ribera qui répandoit de tous côtés que le Dóminiquin à force de travailler fon ouvrage en ôtoit tout l'efprit, lui retiroit les ouvrages à moitié faits & il étoit obligé d'aller les retoucher suivant les remarques de Ribera. Tous ces contretemps le chagrinérent au point qu'il s'enfuit de Naples avec un de fes éléves, fans fonger à la chaleur exceffive de la saifon, & il abandonna fa femme & fa fille qu'on ne voulut point laiffer partir pour l'aller joindre.

Après avoir refte plus d'un an à Rome, occupé à travailler pour le Viceroi, le cardinal Aldobrandin & le cardinal Bon Compagni Archevêque de Naples firent fa paix avec les députés, on envoya au - devant de lui fa femme & fa fille; en. fin il revint à Naples reprendre fon ouvrage & tous les chagrins qu'il y avoit laiffés. On corrompit fon neveu, fes domeftiques & jufqu'au maçon, qui préparoit la chaux, où l'on fit mêler de la cendre pour faire tomber l'enduit & l'ouvrage qu'il faifoit deffus. Il travailla pendant trois ans à la coupole & il ne falloit plus qu'un an pour la terminer, lorfque fes chagrins lui ôtérent toute la force de fon efprit. Il ne fe fioit plus à perfonne, pas même à fa femme; fa nourriture, dans la crainte qu'elle ne fût empoisonnée, étoit apprêtée de fa main, changeant tous les jours de mets; enfin il mourut non fans quelque foupçon de poifon en l'année 1641. à l'âge de foixante ans. On le porta à la Cathédrale, & l'Académie de faint Luc lui fit faire à Rome un fervice magnifique avec une oraison funébre. Ses ennemis firent auffitôt abattre tout fon ouvrage de la coupole que l'on donna au Lanfranc. Il ne refta du Dominiquin que angles & les tableaux d'en bas.

Il est étonnant que ce peintre qui étoit modefte & fincére, ne difant du mal de perfonne, se soit attiré par fon feul mérite tant d'ennemis dans tous les endroits où il a demeuré,

Zampieri deffinoit tout d'après nature, il travailloit pour la gloire, fes modéles, fes cartons, fes études lui coûtoient tant d'argent & tant de temps, qu'il ne lui reftoit prefque rien du prix qu'on lui donnoit. Quand il remarquoit dans une perfonne quelque mouvement particulier, il fe retiroit chez lui pour le deffiner. Les tableaux faits à la hâte n'étoient point de fon goût, & perfonne n'a plus terminé les grands ouvrages. Il fçavoit accorder les mouvemens des bras, des jam

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