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GUASPRE
DUGHET.

:

le Guafpre, navoit attiré le vent ni l'orage dans les tableaux qui les repréfentoient les feuilles y femblent agitées, les arbres (objets inanimés) ceffent de l'être fous fa main: fes fites font beaux, bien dégradés, avec un beau maniment de pinceau, cependant fes arbres font un peu trop verds, & fes maffes trop de la même couleur : il peignoit fi vite, qu'il finiffoit en un jour un grand tableau avec les figures.

Ce peintre réservé dans fes discours, aimoit fes confrères, & ne méprifoit perfonne : tout lui étoit commun avec fes amis; son air enjoué, fon humeur plaifante lui procurérent beaucoup de compagnie : il ne voulut point fe marier; quoiqu'il eût gagné plus de trente mille écus Romains, le plaifir de régaler fouvent fes amis, enfuite une maladie de deux ans laifférent à peine de quoi le faire enterrer honorablement à fainte Susanne en l'année 1675, à l'âge de soixante & deux ans.

Crefcentius de Onofriis, Jacques de Roofter de Malines & Vincentio né dans les états du Pape, ont été fes éléves.

Les deffeins du Guafpre touchés d'un grand goût, font comme ses tableaux, extrêmement finis: il y en a dont le trait eft fait à la plume, lavé de biftre ou d'encre de la Chine, d'autres font tout au pinceau relevés de blanc, fouvent même avec des touches de pierre noire : les beaux fites du Guafpre, fa belle maniére de feüiller les arbres, leurs figures extraordinaires font les caractéres effentielles de fa main.

On voit à Rome dans l'Eglife des Carmes de faint Martin dei monti de grands païfages peints à frefque dont les figures font affez grandes. Dans le palais Colonna des frifes & des deffus de portes peints à frefque, pour le Prince Borghefe des tableaux à l'huile & des murailles entiérement peintes à l'huile qui font admirer fa belle touche: le Prince Pamphile dans fa vigne de Bel respiro proche faint Pancraffea plufieurs marques de la capacité du Guafpre.

Il peignit pour le Cardinal de Lorraine une bourafque avec un coup de tonnerre qui est un de ses plus beaux tableaux; il a paffé depuis en Allemagne.

Dans le temps que j'étois à Rome, le Cardinal Ottoboni avoit un appartement tout rempli de tableaux du Guafpre; y en avoit plus de cinquante qu'il avoit acheté de la fucceffion d'Antonio Moretti pour qui le Guafpre les avoit peint,

il

A Duffeldorf chez l'Electeur Palatin, un païfage.

GUASPRE

Le Roy a dans fon Cabinet deux beaux païfages de sa DUGHET.

main.

y en

Guafpre a gravé lui-même huit païsages dont il y en a quatre ronds, de Ligny en a gravé deux en travers : il a un autre dans le cabinet d'Aix. Nous avons depuis peu une fuite gravée à Londres par Chatelain, Vivares, Granville, & Wood de vingt-quatre païfages d'après ce maître.

ROMANELLI

FRANÇOIS ROMANELLI.

OUS ne connoiffons guéres de plus gracieux peintre que Jean-François Romanelli né à Viterbe en 1617, il fut éleve de Pietre de Cortone, plus correct que lui, quoiqu'il lui fût inférieur dans plufieurs parties de la peinture. Son pere l'envoya tout jeune à Rome & le recommanda à Guafpre de Angelis fon parent. Romanelli deffinoit continuellement d'après les plus grands maîtres ; il portoit avec lui de quoi manger pour travailler dans les palais jufqu'au foir, & ce travail fui étoit fi infructueux, qu'il étoit obligé de vendre ses deffeins pour fubfifter.

Romanelli fut affez heureux de plaire au Cardinal Barberin qui le reçut dans fon palais, & le plaça chez le Cortone;

fa

fa grande application le fit tomber malade, & il devint éti-
que.
Le cardinal lui donna fon médecin, lui procura tous les
fecours néceffaires à fon retablissement, & l'envoya prendre
l'air à Naples, en le recommandant au cardinal Filomarino ;
pour se retirer de cet état malheureux, rien ne lui étoit plus
nécessaire qu'un auffi grand protecteur : le cardinal fit plus,
à fon retour à Rome, il lui donna un attellier dans le palais de
la Chancellerie, où il établit une académie de jeunes gens.

Ce peintre encouragé par toutes les libéralités du cardinal, marchoit à grands pas vers la perfection de fon art, il fit plufieurs tableaux que le cardinal envoya en Angleterre, & dont le Roy parut fi content, qu'il voulut voir l'auteur. Le cardinal qui avoit deffein de le préfenter au Pape, n'approuva point ce voyage.

Après avoir peint pour Sa Sainteté le tableau de la piété, il eut ordre de représenter dans un petit appartement du Vatican l'hiftoire de la Comteffe Matilde, & une nativité dans la chapelle fecrete du palais neuf, enfuite il peignit trois tableaux qui font dans faint Pierre; l'un eft faint Grégoire, l'au tre une présentation au temple, le troifiéme eft faint Pierre qui guérit un poffédé.

Sa réputation croiffoit de jour en jour, il inventoít facilement, if deffinoit bien, gracieux dans fes têtes, fa fresque étoit très fraiche, fa compofition, fa pensée n'étoit pas moins élevée que celle de fon maître, mais il étoit plus froid que lui.

Ce peintre fe maria à Rome, & il fut élu Prince de l'académie de faint Luc; le cardinal Barberin qui lui faifoit faire des cartons pour des tapifferies, fut obligé de fe retirer en France à la mort d'Urbin auquel avoit fuccédé Innocent; il propofa Romanelli au cardinal Mazarin pour des ouvrages qui étoient à faire dans fon palais; on l'agréa & on lui envoya trois mille écus pour fon voyage. Par l'entremise de ce protecteur, Romanelli en arrivant à Paris fut reçu favorablement du cardinal Mazarin qui le préfenta à Louis XIIIĮ & à la Reine: fur le champ plufieurs ouvrages lui furent ordonnés, & leurs Majeftés lui faifoient fouvent l'honneur de l'aller voir travailler au palais Mazarin. Toutes les Dames & les Seigneurs de la Cour fuivirent cet exemple.

Comme il étoit d'une humeur enjouée, le Roy lui permit

ROMANELLI

ROMANELLI

rent,

de répéter des traits d'histoire, qu'il avoit récités aux gens de fa Cour. Un jour qu'il peignoit entouré de toutes ces Dames, il s'avifa de représenter dans le plafond celle qui lui parut la plus belle. Le lendemain, comme elles s'en apperçûelles lui firent de fanglans reproches : il ne put les appaifer qu'en les peignant toutes dans fon plafond. Comment voulez-vous, dit-il, Mesdames, qu'avec une feule main je puiffe vous peindre toutes en même temps. Il eut le malheur en parlant de tomber de fon échafaud; toute la Cour prit beaucoup de part à cet accident, qui heureusement n'eut point de facheufes fuites. Il fit le portrait du Roy & de la Reine avant que de retourner en Italie; il avoit obtenu la permiffion de faire ce voyage à condition de revenir promptement. Plufieurs cavaliers François, qui partirent pour ce pays, le défrayérent dans la route. Árrivé à Bologne, les peintures des Carraches le charmérent au point, qu'il voulut y refter quelques jours. Il vint enfuite à Florence, où le Grand Duc le reçut favorablement. En fortant de cette ville, des voleurs l'attaquérent, & lui prirent le peu d'argent qu'il avoit fur lui. Viterbe se trouva fur fa route, & l'Evêque de cette ville lui fit peindre le tableau du maître Autel où eft représenté faint Laurent. Le Grand Duc le manda enfuite & il fit plufieurs ouvrages dans fon palais; enfin il fut à Rome l'objet de la jaloufie de tous les peintres, & fon premier ouvrage fut l'affomption de la Vierge qu'il a exécutée dans le plafond de la facristie de l'anima. Il peignit encore dans la chapelle de faint Eloy un tableau de l'adoration des mages, avec quelques Sibylles qui en ornent les côtés.

Preffé de revenir en France, il paffa à Viterbe pour revoir fa famille, & il fe rendit à Paris où il reçut de nouveaux bienfaits de toute la Cour. Le Roy ordonna à Romanelli de peindre les bains de la Reine au vieux Louvre : fon idée fut d'y représenter des fujets de l'Eneïde; l'ouvrage étoit à moitié lorfqu'il fe laiffa encore tomber de l'échafaud & il se bleffa plus confidérablement que la première fois : le Roy lui fit donner tous les secours néceffaires, & quand il fut guéri, il acheva cet appartement d'une élégance de ftyle qui fit naître l'envie de le retenir en France, mais après deux ans de féjour, fa nombreuse famille fut le motif de fon retour en Italie. Le Roy le récompenfa magnifiquement & le créa Chevalier de faint Michel.

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