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Vous gardent d'outrages,

Et vous font avoir
Du matin au soir
De gras pâturages,
J'en conserverai,
Tant que je vivrai,
La douce mémoire,
Et que mes chansons,
En mille façons
Porteront sa gloire,
Du rivage heureux,
Où, vif et pompe ux,
L'astre qui mesure
Les nuits et les jours,
Commençant son cours,
Rend à la nature

Toute sa parure,
Jusqu'en ces climats
Où, sans doute las
D'éclairer le monde,

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Et son nom est trop grand pour la champêtre églogue.

1. La mer, dans les flots de laquelle le soleil fatigué se couche chaque soir, pour en sortir le lendemain plus jeune et plus ardent. Les piètes ont confondu

Néréide Thétis, mère d'Achille, et Thétys, femme de l'Océan.

2. On appelait ainsi une pièce de vers dont les rimes, souvent bizarres, étaient imposées à l'avance. C'est un poète oublié, Dulot, dont le nom nous a été conservé par un petit poème de Sarrasin, qui aurait mis à la mode ces tours de force, vers 1648: «Un jour Dulot se plaignit, en présence de plusieurs personnes, qu'on lui avait dérobé quelques papiers, et particulièrement trois cents sonnets, qu'il regrettait plus que tout le reste. Quelqu'un ayant témoigné sa surprise qu'il en eût fait un si grand nombre, il répliqua que c'étaient des sonnets en blanc, c'est-à-dire des bouts-rimés de tous les sonnets qu'il avait à remplir. Cela sembla plaisant, et depuis on commença à faire, par une espèce de jeu, dans les compagnies, ce que Dulot faisait sérieusement. » (Menagiana, III.) Pour augmenter la difficulté, on imposait le sujet en même temps que les rimes. Mmo Deshoulières excella dans les bouts-rimés.

3. La flûte de l'idylle.

4. Les dix commandements que Dieu lui-même donna à Moïse sur le Sinaï. 5. L'aigle impériale; aigle est du féminin dans les armoiries.

6. Tout petit oiseau; de même La Fontaine (le Chêne et le Roseau) :

Un roitelet pour vous est un pesant fardeau.

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Le calme à l'univers par ses soins pro
Tout enfin met sa vie au-dessus des plus

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curé ;
belles.

Hellespont répond, nouvelles.

BOILEAU
(1636-1711)

Nicolas Boileau, onzième enfant de Gilles Boileau, greffier à la grand'chambre du parlement de Paris, naquit le 1er novembre 1636. Après une enfance triste et sombre, il fut reçu avocat le 4 septembre 1656, se dégoûta du barreau, et obtint le prieuré de Saint-Paterne, qu'il abandonna en restituant les revenus qu'il avait touchés, lorsquc la mort de son père le rendit libre de suivre sa vocation poétique. Avec la témérité de la jeunesse, Boileau entreprit de démontrer à ses contemporains que la raison leur ordonnait de brûler ce qu'ils admiraient, où du moins d'en rire; et il parvint à les convaincre, mais en se faisant beaucoup d'ennemis. On peut partager sa vie en trois périodes. Dans la pre

mière, il attaque tous ceux qui ont faussé le goût public, et jouissent dans les Lettres d'une réputation usurpée; c'est le temps des Satires et des premières Epitres, où l'élément satirique tient encore une place importante. Dans la seconde période, après avoir déblayé le terrain, Boileau construit; après avoir fait justice des mauvais rimeurs, il trace dans son Art poétique des préceptes pour les vrais poètes. En même temps, il écrit des Epitres d'une inspiration élevée, et les quatre premiers chants du Lutrin, chef-d'œuvre étincelant du genre héroï-comique, qui grandit les petites choses, à l'encontre du genre burlesque, qui rapetisse les grandes. troisième période est moins brillante. Boileau, vieilli et aigri par les luttes religieuses, revient à la satire, mais à la satire

La

1. On rendait la justice au grand Châtelet; le petit Châtelet était une prison. 2. Voir dans nos extraits de Balzac une note du morceau sur Démosthènc. 3. Attendre docilement son bon plaisir. Voir plus haut la Lettre de Voiture au marquis de Pisani.

morale; c'est le temps de la Satire sur les Femmes et de la Satire sur l'honneur, où l'on pressent la décadence, des deux derniers chants du Lutrin, parfois peu dignes des premiers, et des Satires sur l'Amour de Dieu et sur l'Equivoque, où Boileau se retrouve à peine. Parmi les œuvres en prose de Boileau, il faut citer la traduction du Traité du sublime de Longin, et deux Dialogues, l'un intitulé les Héros de roman, l'autre dirigé Contre les modernes qui font des vers latins. En 1685, l'ordre du roi fit admettre Boileau à l'Académie, et, peu de temps après, il était nommé, ainsi que Racine, historiographe de Louis XIV. Il s'éteignit le 13 mars 1711, après avoir survécu à tous ses amis, et fut enterré dans l'église basse de la Sainte-Chapelle; ses cendres reposent depuis 1819 à Saint-Germain des Prés.

UN AVOCAT BAVARD

MINOS, sortant du lieu où il rend la justice, proche du palais de Pluton. Maudit soit l'impertinent harangueur qui m'a tenu toute la matinée ! il s'agissait d'un méchant drap qu'on a dérobé à un savetier en passant le fleuve, et jamais je n'ai tant ouï parler d'Aristote. Il n'y a point de loi qu'il ne m'ait citée.

PLUTON.

Vous voilà bien en colère, Minos.

MINOS.

Ah! c'est vous, roi des enfers. Qui vous amène ?

PLUTON.

Je viens ici pour vous en instruire; mais auparavant peut-on savoir quel est cet avocat qui vous a si doctement ennuyé ce matin ? Est-ce que Huot et Martinet sont morts?

MINOS.

Non, grâce au ciel; mais c'est un jeune mort qui a été sans doute à leur école. Bien qu'il n'ait dit que des sottises, il n'en a pas avancé une qu'il n'ait appuyée de l'autorité de tous les anciens; et, quoiqu'il les fit parler de la plus mauvaise grâce du monde, il leur a donné à tous, en les citant, de la galanterie, de la gentillesse et de la bonne grâce. << Platon dit galamment dans son Timée. Sénèque est joli dans son Traité des bienfaits. Ésope a bonne grâce dans un de ses apologues. >>

PLUTON.

Vous me peignez là un maître impertinent; mais pourquoi le laissiez-vous parler si longtemps? Que ne lui imposiez-vous silence?

MINOS.

Silence, lui! c'est bien un homme qu'on puisse faire taire quand il a commencé à parler! J'ai eu beau faire semblant vingt fois de me vouloir lever de mon siège; j'ai eu beau lui crier « Avocat, concluez, de grâce; concluez, avocat 1, » il a été jusqu'au bout, et a tenu à lui seul toute l'audience. Pour moi, je ne vis jamais une telle fureur de parler; et, si ce désordre-là continue, je crois que je serai obligé de quitter la charge.

(Dialogue des Héros de roman.)

L'OPÉRA DE PHAÉTON

Madame de M... et madame de T... 2, sa sœur, lasse des opéras de M. Quinault, proposèrent au roi d'en faire faire un par M. Racine, qui s'engagea assez légèrement à leur donner cette satisfaction, ne songeant pas dans ce moment-là à une chose dont il était plusieurs fois convenu avec moi: qu'on ne peut jamais faire un bon opéra, parce que la musique ne saurait narrer; que les passions n'y peuvent être peintes dans toute l'étendue qu'elles demandent ; que d'ailleurs elle ne saurait souvent mettre en chant les expressions vraiment sublimes et courageuses. C'est ce que je lui représentai quand il me déclara son engagement, et il m'avoua que j'avais raison; mais il était trop avancé pour reculer. Il commença dès lors un opéra dont le sujet était la chute de Phaéton 3. Il en fit même quelques vers qu'il récita au roi, qui en parut content; mais comme M. Racine n'entreprenait cet ouvrage qu'à regret, il me témoigna résolument qu'il ne l'achèverait point que je n'y travaillasse avec lui, et me déclara avant tout qu'il fallait que j'en composasse le prologue. J'eus beau lui représenter mon peu de talent en ces sortes d'ouvrages, et que je n'avais jamais fait de vers d'amourettes, il persista dans sa résolution, et me dit qu'il me le ferait ordonner par le roi, Je songeai donc en moi-même à voir de quoi je serais capable en cas que je fusse absolument obligé de travailler à

1. Comparer les Plaideurs (III, 111) :

Homme, ou qui que tu sois,

Diable, conclus; ou bien que le ciel te confonde !

2. Mesdames de Montespan et de Thianges.

3. On connaît l'histoire tragique de Phaéton, qui, ayant obtenu par surprise de son père Apollon l'autorisation de conduire son char (le char du soleil), perit victime de son imprudence.

un ouvrage si opposé à mon génie et à mon inclination. Ainsi, pour m'essayer, je traçai, sans en rien dire à personne, non pas même à M. Racine, le canevas d'un prologue, et j'en composai une première scène.

Nous étions occupés à ce misérable travail, dont je ne sais si nous nous serions bien tirés 1, lorsque tout à coup un heureux incident nous tira d'affaire. L'incident fut que M. Quinault s'étant présenté au roi les larmes aux yeux, et lui ayant remontré l'affront qu'il allait recevoir s'il ne travaillait plus au divertissement de Sa Majesté, le roi, touché de compassion, déclara franchement aux dames dont j'ai parlé qu'il ne pouvait se résoudre à lui donner ce déplaisir. Sic nos servavit Apollo 2.

(Avertissement au lecteur en tête du Fragment d'un prologue d'opéra.)

LA MEDISANCE ET LA FRANCHISE

Est-ce donc là médire, ou parler franchement 3?
Non, non, la médisance y va plus doucement,
Si l'on vient à chercher pour quel secret mystère
Alidor à ses frais bâtit un monastère :

« Alidor, dit un fourbe, il est de mes amis;
Je l'ai connu laquais avant qu'il fût commis:
C'est un homme d'honneur, de piété profonde,
Et qui veut rendre à Dieu ce qu'il a pris au monde 5.
Voilà jouer d'adresse, et médire avec art;

Et c'est avec respect enfoncer le poignard.
Un esprit né sans fard, sans basse complaisance,
Fuit ce ton radouci que prend la médisance.
Mais de blâmer des vers ou durs ou languissants,
De choquer un auteur qui choque le bon sens,
De railler d'un plaisant qui ne sait pas nous plaire,
C'est ce que tout lecteur eut toujours droit de faire.
(Satire IX, 157-172.)

1. La scène conservée par Boileau semble prouver que non, au moins pour ce qui le concerne.

2. « C'est ainsi qu'Apollon m'a sauvé. » Dernier vers de la neuvième Satire (livre I) d'Horace, dirigée contre les fâcheux.

3.

L'ennuyeux écrivain! Le maudit traducteur !

vient de s'écrier le poète.

4. «< Allusion à un maltòtier ou collecteur d'impôts, nommé Dalibert, qui avai été laquais. » (M. AUBERTIN.)

5. « Un financier, nommé Pinette, avait fait bâtir rue d'Enfer la maison de 'Institution de l'Oratoire, qu'on appelait la Restitution. » (M. AUBERTIN.)

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