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nourris, & fur-tout bien payés. Que la Compagnie nous traite de méme, & bientôt nous ferons à elle. Il n'y a pas plus loin de Devikottey à Pondicheri que de Pondicheri à Devikottey.Cette converfation fut continuée affez avant dans la nuit, après quoi j'eus la confolation d'en gagner quelquesuns, & peu de jours enfuite plufieurs rejoignirent la Na

tion.

Voilà, Monfieur, comme vous voyez, des triftes commencemens. Je doute que ce que je viens de vous raconter fût arrivé fous Dupleix. Son nom, fa réputation, fa politique fage & foutenue, & principalement fon patriotifme & fon zèle pour la gloire de fa Nation, feront toujours

pour l'Inde Françoife des gages affurés du contraire. Au refte, Monfieur, je ne fuis, dans tout ce narré, que l'écho de l'Indoftan, dont M. Dupleix a emporté tous les regrets. Dans le courant de cette année la Providence, toujours adorable dans fa conduite, ne m'a pas épargné les épreuves. Une maladie épidémique a cruellement attaqué nos Chrétiens. Je vous ai dit que nous n'étions que deux pour environ trois mille perfonnes. Obligés de courir à toutes les heures du jour & de la nuit & fouvent jufqu'à une lieue fans prefque aucun relâche, pendant près de deux mois nous avons enfin plié fous le poids de la fatigue. Je doute que mon Collègue, déja fur l'âge,

car

l'âge, fe rétabliffe d'un épuifement général, fuite néceffaire d'un travail continuel & exceffif. Qu'on eft heureux, Monfieur, quand on meurt dans l'exercice actuel d'une charité qui n'a ici d'autre agrément que celui de s'y livrer uniquement pour Dieu feul! nos pauvres. Chrétiens n'ont rien d'attrayant que leur ame rachetée du fang d'un Dieu immolé par amour. J'envie le fort du P. du Trembloy qui, felon les apparences, fera la victime de fon zèle. Pour moi, la jeuneffe & la force du tempérament m'ont encore fauvé; j'en ai été quitte pour fept accès de la fièvre la plus violente. Heureusement la contagion ne m'a faifi que vers le déclin de la maladie 30o Rec.

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épidemique; d'ailleurs un de nos Frères trouva dans ce tems-là un remède fpécifique qui arrêta dans moi les progrès de ce fléau. Il a péri aux environs de Kareikal plus de quatre mille Payens, dont quelques-uns fe font convertis à l'heure de la mort; nous avons perdu, outre cela, environ trois cens Chrétiens, & quantité d'enfans que nous avons eu le bonheur d'arracher au Paganisme, pour les régénérer dans les eaux falutaires du Baptême. Ici je ne puis m'empêcher de vous raconter un trait de la miféricorde du Seigneur. Obligé de courir à une demi-lieue de l'Eglife pour y exercer les fonctions de mon miniftère, je trouvai fur le bord d'un étang

une petite fille de huit à neuf ans, qui tenoit dans fes bras un enfant de quinze mois réduit au plus affreux état. Contre l'ordinaire des enfans Payens, la petite fille s'arrêta, & je l'abordai. A qui appartient l'enfant que tu portes, lui demandai-je? C'est mon frère, me répondit-elle. Mais pourquoi l'apportes-tu ici? ne voistu pas qu'il va mourir? Ma Mère me l'a ordonné, me repartit-elle. Eh bien, repris-je, je vais lui donner un remède qui lui procurera le véritable bonheur; fuis-moi. La petite fille obéit. Je m'approche de l'étang, je trempe mon mouchoir dans l'eau, & je baptife le mourant. On peut bien goûter à longs traits toute la douceur des confolations qui inon

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