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flots fur le rivage, s'y pétrifie à la longue, fans rien perdre de fa figure naturelle; & lorfqu'il eft parvenu à ce degré de dureté qu'on remarque dans les pierres ordinaires, on le réduit en poudre, & on le fait prendre au malade avec de l'eau, du vin, ou de l'huile, fuivant les cas plus ou moins preffans où il fe trouve. On en use auffi avec fuccès pour les bleffures dangereufes, pour les fièvres & les diffenteries. Cependant, dans ces dernières maladies, on fe fert plus ordinairement de l'Encre de la Chine, mais j'ignore la manière dont on l'aprête. On croit que lorfque les pénétrèrent dans le

Juifs *

*Il y avoit autrefois beaucoup de Juifs à la Chine; mais la Médecine y étoit déja

ils

Royaume de Tonquin y apportèrent des livres de Médecine & de Mathématiques, & qu'ils y enfeignèrent long-tems les principes de ces deux fciences. Je n'examinerai point fi cette opinion eft fondée; ce qu'il y a de certain c'eft que les Médecins du pays n'en conviennent pas ; ils prétendent, au contraire, n'être redevables quà eux-mêmes de l'invention de leur art. Quoiqu'il en foit, ils l'ont porté à un dégré de perfection qui m'a toujours étonné. Il eft peu de maladies qu'ils ne guériffent; & s'ils obfer

parvenue à un haut point de perfection avant qu'ils y pénétraffent. Il fe peut fort bien faire qu'ils y aient porté des livres; mais on ne voit nulle part qu'ils y aient tenu des Ecoles de Mathématique & de Médecine.

vent certains usages fuperftitieux dans l'adminiftration de leur remèdes, ce n'eft, comme je l'ai déjà dit, que pour mériter la confiance du peuple, qui eft fans contredit l'un des plus crédules, & des plus fuperftitieux de l'univers.

Je pourrois vous dire bien des chofes du Gouvernement, des loix, des dignités, des mœurs, & des coutumes de ce Royaume, mais tout cela me mèneroit extrêmement loin d'ailleurs je n'ai pas encore eu le tems de m'informer au jufte de tout ce qu'il y a de remarquable au fujet de ces différens articles. Auffitôt que les travaux de notre Miffion, qui eft très-pénible, me permettront de voir les chofes par moi-même, je faifirai, mon Révérend Père,

l'occafion de vous faire part de ce que j'aurai trouvé digne de votre curiofité.

Je termine cette lettre par un trait de la miféricorde de Dieu , qui fait beaucoup de bruit dans notre Miffion. Il y avoit ici une fameufe Magicienne qui jouiffoit parmi les Infidèles, de la plus haute confidération; elle tenoit une école de magie, & fes difciples, qui étoient au nombre de trois cents, la regardoient comme l'oracle de la nation. Cette femme avoit dans fa maifon plus de cent cinquante Idoles à qui elle offroit des facrifices. Pour rendre odieufe aux Infidèles la Loi de l'Evangile, elle enseignoit qu'après leur mort les ames des Chrétiens Tonquinois étoient envoyées en Europe, par les

Pères de la Compagnie de Jéfus, pour y garder les troupeaux. Un jour qu'elle déclamoit avec plus de fureur qu'à l'ordinaire, contre notre fainte Religion, le Seigneur qui avoit fur elle des vues de bonté & de falut, frappa fon fils d'une maladie mortelle : Je ne vous rapporterai point tout ce que cette Magicienne mit en ufage pour le guérir. Il fuffit de vous dire qu'après avoir épuisé toutes les reffources de fon art fans aucun fuccès, elle prit le parti d'appeller dans fa maifon quelques-uns de nos Chrétiens. Ceux-ci refufèrent long-tems de s'y tranfporter, dans la crainte que cette femme ne leur eût tendu des embûches. Cependant faifant réflexion au danger où se trouvoit le malade,

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