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charme, vous ne lui avez point parlé. Je fuis le plus malheureux des hommes ! Je ne dois plus espérer de la revoir; encore moins d'en être aimé.

DORAN TE.

Je ne vous abuse point: je la connois; je lui ai parlé ; vous la reverrez, & vous en ferez aimé plus que vous ne croyez, & peut-être plus que vous ne voudrez.

P HILIN T E.

Cela ne fe peut pas. Vous vous trompez, vous dis-je. Je fuis au défefpoir. Ah! quel tourment d'adorer ce qu'on ne connoît point, & qu'on ne fçauroit plus retrouver!

DORAN TE.

Je vous trompe fi peu, que je vous la nommerois, fans de bonnes raifons qui m'en empêchent, & que vous en demeureriez surpris vous même. P HILIN T E.

Encore une fois, vous me jouez.

DORANTE.

Soit. Mais qu'aurez-vous à me répondre, fi je vous donne ma parole d'honneur qu'elle viendra ce foir fouper chez vous, & qu'elle fe fera con

noître?

PHIL1N TE.

Ah! ce bonheur paffe mon attente.

DORANTE.

A une condition, toutefois...... Je ne fçais fi vous voudrez y foufcrire.

P HILIN T E.

Parlez, il n'est rien que je ne faffe.

DORANTE.

La perfonne que vous aimez, entre comme moi dans les intérêts de Léandre; ainfi elle ne veut se découvrir à vous, qu'à condition que vous donnerez à notre ami la jeune Angelique dont il eft

amoureux.

PHILIN TE.

Ah! je donnerois ma femme s'il le falloit.

DORANTE.

Oubliez-vous que vous avez la plus belle femme

de Paris?

P HILIN

T E.

Eft-elle comparable à mon inconnue?

DORANTE.

Elle a beaucoup de fon air & de fa taille.

P HILIN T E.

Vous vous moquez; c'est une naine en comparaison. Quand je me représente ma Vénitienne

que je me rappelle fa grace à danfer, fes yeux qui brilloient au travers du mafque, & fes belles mains que j'ai eu le bonheur de baiser, je fuis hors de moi-même, j'extravague de plaifir. Que fera-ce, bon Dieu! quand je verrai tous fes appas à découvert, & que le mafque ne me cachera plus fon vifage, qui eft fans doute le plus beau du monde ? Allez, mon cher; hâtez-vous de me faire voir tant de charmes.

DORANTE.

Si vous l'alliez trouver moins belle?

P HILIN THẺ.

Cela eft impoffible. Allez, vous dis-je.

DORAN TE.

Sur-tout, que le Chevalier ne fe trouve pas ici.

PHIL INTE.

Ne craignez rien ; j'ai laiffé un billet chez lui il n'aura garde de venir. Mais, partez, je vous en conjure.'

DORANT E.

Je vais la trouver de ce pas, & la conduire ici dès qu'il fera nuit. Mais fouvenez-vous de la condition. P HIE IN THE.

Allez, Dites-lui- qu'elle peut faire dreffer le contrat comme elle jugera à propos : elle eft la maî

treffe abfolue de mes volontés ; & je donnerai les mains à tout ce qu'elle aura fait.

DORANT E.

Vous ne rifquez rien; elle ménagera vos intérêts comme les fiens propres. Adieu. Je pars.

P HILIN T E.

Songeons maintenant à nous débarraffer de ma femme. Mais la voici. Qu'elle me paroît enlaidie!

SCENE

X I.

PHILINTE, DORIMENE, LISETTE.

A

P HILI N T E.

H, ah! Madame, vous voilà difpofée à fortir?
Cela me fait plaifir.

DORIM EN E.

Oui, Monfieur, je vais fouper chez la Comteffe.
P HILIN T E.

Vous m'avez prévenu, & je voulois vous le dire. Vous êtes trop fédantaire; il faut vous mettre à la mode, & ne plus vivre fi bourgeoisement.

LISETTE.

C'est ce que je lui représente à tout moment. Il ne convient à une femme de fa qualité, de fe

pas

lever le jour, & de fe coucher la nuit, comme une fimple Marchande de la rue faint Denis,

PHILIN T E.

Allez, Madame ; je vous ordonne de vous bien réjouir.

LISETTE.

Voilà ce qui s'appelle un bon Mari, & vous devez le croire, Madame.

DORIMENE:

Adieu, Monfieur; vous méritez d'être obéi.
PHILIN T E.

Heureusement la voilà partie! Mais j'apperçois la Fleur tout effouflé,

SCENE

XII.

PHILINTE, LA FLEUR,

A

LA FLEUR.

H! Monfieur, je viens d'être témoin d'un spectacle tragi-comique. Les femmes du quartier ont voulu affaffiner Monfieur le Chevalier à

votre porte.

P HILINT E.

Voilà une terrible avanture!

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