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§ VI. Jésus à Jérusalem. Nicodème.

3, 1-21.

3

Il y avait un homme d'entre les Pharisiens, dont le nom était Nicodème, l'un des chefs des Juifs. Il vint à lui pendant la nuit et lui dit : « Nous savons que tu es venu de la part de Dieu comme docteur, car personne ne peut faire les miracles que tu fais, à moins que Dieu ne soit avec lui. » Jésus répondit et lui dit : « En vérité, en vérité, je te dis qu'à moins de naître d'en haut, on ne peut pas voir le royaume de Dieu. » Nicodème lui dit «< Comment un homme peut-il naître étant vieux? Il ne peut pas rentrer dans le ventre de sa mère et naître une seconde fois! » Jésus répondit : « En vérité, en vérité, je te dis qu'à moins de naître de l'eau et de l'esprit, on ne peut pas entrer dans le royaume de Dieu*. 6 Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'esprit est esprit. Ne t'étonne pas de ce que je t'ai dit: il vous faut naître d'en haut. Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit, mais tu ignores d'où il vient et où il va; ainsi en est-il de quiconque est né de l'esprit*. » Nicodème répondit et lui dit : « Comment cela peut-il se faire ? » 10 Jésus répondit et lui dit : « Tu es le docteur d'Israël et tu ignores ces choses! En vérité, en vérité je te dis que nous parlons de ce que nous savons, et que nous attestons ce que nous avons vu, et vous n'acceptez pas notre témoignage. Puisque je vous ai parlé des choses de la terre et que vous ne croyez pas, comment croirez-vous si je vous parle des choses du ciel? 13 Et personne n'est monté au ciel, si ce n'est celui qui est descendu du ciel, le fils de l'homme, qui est dans le ciel. 14 Et de même que Moïse éleva le serpent dans le désert, de même il faut que le fils de l'homme soit élevé,

5. Ν τὴν βασιλείαν τῶν οὐρανῶν.

8. Ν ἐκ τοῦ ὕδατος καὶ τοῦ πνεύματος.

13. Plusieurs mss., entre autres et B, omettent la prop. ó öv v te οὐρανῷ.

15 afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. 16 Car Dieu a aimé le monde au point de donner son fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle. 17 Car Dieu n'a pas envoyé son* fils dans le monde pour qu'il jugeât le monde, mais afin que le monde fût sauvé par lui. 18 Celui qui croit en lui n'est pas jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du fils unique de Dieu. 19Or en ceci est le jugement, que la lumière vint dans le monde, et que les hommes préférèrent l'obscurité à la lumière, car leurs œuvres étaient mauvaises. 20 Car quiconque fait le mal hait la lumière et ne vient pas à la lumière*, afin que ses œuvres ne soient pas blâmées; 21 mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, afin que ses œuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites en Dieu.

15. Nous adoptons la leçon du T. R. eis autóv. Var. lect. N in'aútóv, B év αὐτῷ, L ἐπ' αὐτῷ. D'assez nombreux témoins ajoutent : μὴ ἀπόληται, ἀλλ'. 17. B omettent autou.

20. N omet καὶ οὐκ ἔρχεται πρὸς τὸ φῶς.

Ce paragraphe comprend deux parties, qui se présentent, l'une comme historique, c'est le dialogue entre Jésus et Nicodème, l'autre comme dogmatique. Celle-ci consiste en une suite de considérations sur le salut des hommes par le Fils de Dieu. Ces deux parties s'enchaînent et se compénètrent à tel point qu'il est presque impossible de tracer entre elles une ligne de démarcation. Dès le v. 1, Nicodème est présenté comme l'un des personnages les plus considérables de Jérusalem. Il était de la secte des Pharisiens, observateur rigide de la Loi; de plus, il faisait partie du Sanhédrin (7, 50) et jouissait à ce titre d'une haute influence. Son nom est grec. C'était un usage très répandu parmi les Juifs au temps du Sauveur de prendre des noms étrangers. Nicodème se rend auprès de Jésus à la tombée de la nuit, évitant d'étaler au grand jour ses sympathies pour le thaumaturge de Nazareth, retenu par un sentiment que nous appellerions aujourd'hui respect humain. Pourtant, il a reconnu en Jésus l'Envoyé de Dieu, mais sa connaissance est imparfaite; il est certain que celui qui accomplit les miracles dont il a été le témoin dispose d'une puissance surnaturelle, mais là se borne sa science. Il vient donc pour s'instruire. L'auteur ne rapporte pas la question qu'il dut poser au Maître en

l'abordant. Mais la réponse de Jésus la laisse facilement deviner. Elle fut probablement identique pour le fond à celle de l'homme riche des Synopt. (Mt. 19, 16; Mc. 10, 17; Lc. 18,18): que faut-il faire pour avoir la vie éternelle? Pour comprendre le sens général contenu dans la réponse du Sauveur, il faut se rappeler la pensée énoncée plus haut, 1, 12. Avant tout, il faut devenir enfant de Dieu, il faut naître à Dieu. Quant à la manière dont cette filiation divine est ici exprimée, elle est sujette à des interprétations diverses : ἐὰν μή τις γεννηθῇ ἄνωθεν. Le mot vov peut s'interpréter de deux façons; on peut le rendre, comme le fait la Vulgate, par denuo, de nouveau, et alors il s'agit d'une renaissance, d'une palingénésie; ou bien par desursum, desuper, d'en haut, et alors il est question d'une génération surnaturelle. Si l'on considère la terminologie de notre Évang., on sera porté à adopter cette dernière interprétation'. En dehors du verset qui nous occupe, le mot vev est employé quatre fois : 3,7 et 31; 19, 11 et 23. Le v. 7 du chap. 3 ne saurait être pris pour règle, puisqu'il est lui-même en question; il contient la répétition de la phrase énoncée au v. 3. Or, dans les trois autres endroits, le mot žvoεv signifie incontestablement desuper. D'où l'on peut conclure que dans le passage 3, 3-7, il a la même signification. On arrive à la même conclusion si l'on considère le sens attribué à ce mot par l'ensemble des écrivains sacrés 2. Néanmoins, il semble que le contexte favorise l'autre interprétation. Nicodème entend l'affirmation de Jésus d'une renaissance. Mais Nicodème comprend mal, cela est évident; et le Sauveur, dans sa réponse, insiste particulièrement sur le caractère surnaturel de la filiation. Dans ce cas, dira-t-on, pourquoi Jésus, au lieu de dissiper l'équivoque, réitère-t-il son assertion dans les mêmes.

1. On cite en faveur de la re interprétation l'Oneirocriticon d'Artémidore, I, 13, où il est dit du père qu'il se voit revivre dans son enfant, äve Yevvala. Mais la leçon est incertaine. Le mot volev, maintenu dans l'édit. de Leipzig (1805), est supprimé dans l'édit. de Hercher, Artemidori Daldiani Oneirocriticon (1864), p. 17, l. 24.

2. Cf. Mt. 27, 51; Mc. 15, 38; Lc. 1, 3; Act. 26, 5; Gal. 4, 9; Jac. 1, 17; 3, 15, 17. De ces textes, celui de saint Paul est le seul où volev signifie denuo; partout ailleurs, il se rend par desuper ou desursum. Chez saint Luc pourtant, il offre une nuance intermédiaire qui répond à l'expression latine ab initio et marque un point de départ fixé dans le passé et vers lequel on remonte par la pensée.

termes (7)? Cette objection perd toute sa valeur, si l'on considère que l'ambiguïté persiste, quelle que soit d'ailleurs la signification du mot άvooɛv. La repartie de Jésus n'est pas catégorique. Elle a néanmoins pour objet d'éclairer l'esprit de Nicodème. Celui-ci avait compris qu'il s'agissait d'une génération charnelle. Pour le détromper, son interlocuteur distingue entre la naissance par la chair et la naissance

par l'esprit, et conclut en disant ne t'étonne pas de ce que je t'ai dit:

་་

il vous faut naître vosv. Il nous paraît résulter de cette explication que yεvvv voy veut dire, au fond, naître de l'esprit, et, à la lettre, naître d'en haut. Cette expression se rapporte nécessairement à l'un des membres de la distinction. Or Jésus ne distingue pas entre naître et renaître, mais bien entre naissance naturelle (ix ts oxρxós) et naissance surnaturelle (έx тoй îνεúμάтos). La difficulté, du reste, ne tire pas à conséquence. En réalité, la naissance mystique peut s'appeler une renaissance, puisqu'elle produit dans l'homme une nouvelle vie'. Voir le royaume de Dieu signifie «< avoir part au royaume de Dieu ». C'est ici le seul endroit de saint Jean où l'on rencontre cette expression de « Royaume de Dieu » si fréquemment employée dans les Synopt. Ordinairement, le quatrième évangéliste donne la préférence au terme plus abstrait de « Vie ». La plupart des commentateurs voient dans le langage de Nicodème une ignorance affectée, une simplicité simulée en vue de provoquer une explication plus ample; on peut même y découvrir une certaine ironie. Au v. 5, Jésus répète l'assertion déjà produite au v. 3, mais avec deux variantes, dont l'une est particulièrement significative : le mot ἄνωθεν est remplacé par ἐξ ὕδατος καὶ πνεύματος ; au lieu de voir le royaume de Dieu, le second texte porte entrer dans le royaume de Dieu.

Que faut-il entendre par le Royaume de Dieu, † ßxotλsía ros fɛsû?

1. Cette hardie métaphore, que l'évangéliste met dans la bouche de Nicodème se trouve dans la lettre écrite en 178 par les martyrs de Lyon aux églises d'Asie. Les malheureux qui, en face des tortures, ont renié la foi chrétienne, ramenés par le repentir, rentrent dans le sein maternel de l'Église, qui les reçoit avec allégresse, pour les concevoir et les engendrer une seconde fois : Διὰ γὰρ τῶν ζώντων ἐζωοποιοῦντο τὰ νεκρά, καὶ μάρτυρες τοῖς μὴ μάρτυσιν ἐχαρίζοντο. Καὶ ἐνεγίνετο πολλὴ χαρὰ τῇ παρθένῳ μητρί, οὓς ὡς νεκροὺς ἐξέτρωσε, τούτους ζῶντας ἀπολαμβανούσῃ. Δι' ἐκείνων γὰρ οἱ πλείους τῶν ἠρνημένων ἀνεμητροῦντο καὶ ἀνεκνίσκοντο, καὶ ἀνεζῶπυροῦντο, καὶ ἐμάνθανον ὁμολογεῖν, καὶ ζῶντες ἤδη καὶ τετονωμένοι, προσήεσαν τῷ βήματι. (dans Eusèbe, H. E., V, 1, med.).

Disons d'abord que cette expression est synonyme de celle que l'on trouve fréquemment dans Synopt. ἡ βασιλεία τῶν οὐρανῶν, le Royaume des cieux. On remarque, il est vrai, que celle-ci est propre à Mt., tandis que la première est employée de préférence dans les autres Évang.; on ajoute qu'elle est plus conforme au génie et à la langue des Juifs contemporains du Sauveur, et on conclut qu'elle est primitive'. La formule employée par N.-S. aurait donc été « le Royaume des cieux ». Les évangélistes qui écrivirent pour le monde grec, l'auraient modifiée, afin de la rendre intelligible à leur public. De là l'expression que nous lisons dans saint Jean: « Le Royaume de Dieu. »> Ainsi, le mot Basista répondrait à l'hébreu nha. Or, tous les critiques sont d'accord pour affirmer que, dans la littérature juive, ce dernier terme, employé en parlant de Dieu, signifie toujours gouvernement royal et non pas royaume. L'expression i Bastheía to fɛου devrait donc se traduire par le règne de Dieu. Il est néanmoins incontestable que, dans le style évangélique, elle doit se rendre tantôt par la royauté, tantôt par le royaume de Dieu. Ainsi, dans le passage qui nous occupe, s'il est difficile de préciser l'acception du mot Baciela au v. 3, il est évident qu'au v. 5, ce terme ne peut pas signifier autre chose que royaume; et, comme les deux versets sont exactement parallèles, il est aisé de conclure qu'il possède cette même signification dans le premier cas.

L'expression «< naître de l'eau et de l'esprit » est expliquée d'avance par le témoignage de Jean-Baptiste (1, 33) 2. Nous réservant de revenir sur ce verset pour en exposer le sens dogmatique, bornons-nous ici à rappeler que la préposition indique le « terminus a quo» et par conséquent, lorsqu'il s'agit d'une production, le principal actif, la cause.

1. Rev. Bibl., VIII, p. 350 s.

2. Saint Justin reproduit fidèlement cette idée Apol. I, 61 : xaì yżp ó Xpiotós εἶπεν· ἂν μὴ ἀναγεννηθῆτε, οὐ μὴ εἰσέλθητε εἰς τὴν βασιλείαν τῶν οὐρανῶν. Cf. Dial. c. Tryph., 138. De tous les passages du IVe Évang., 3, 5 est celui dont on rencontre les traces les plus nombreuses chez les écrivains ecclésiastiques des premiers siècles. On le trouve reproduit avec une plus ou moins grande exactitude dans les textes suivants: Hermas, Simil. IX, 12, 3, 4, 5, 8; 15, 2; 16, 2, 3 (entrer dans le royaume de Dieu). Hom. Clem., VII, 8; XI, 24, 26. Clem., II Cor., 6, 9. Didasc., II, 26, 33. Const. Ap., VI, 15. Recognit., VI, 9. Epist. ad Diogn., 9, 1. Eclog. proph., 7, 8. Épiphane, Hær. LXXIV, 9; Ancor., 72, fin. Tertullien, De Baptismo, 13.

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