페이지 이미지
PDF
ePub

d'admettre ce principe. Mais ils prétendent le déduire de l'étude du livre. Notre opinion, sur ce point, se dégage de notre commentaire on la saisira mieux, croyons-nous, au moyen d'un exposé rapide. On verra que l'allégorie n'a pas, dans le IVe Évangile, les proportions qu'on lui attribue et que, aux endroits où il est permis d'en constater la présence, elle ne va pas jusqu'à ruiner le fond historique du récit.

1° 1, 1-18. Cette première section a un caractère éminemment doctrinal. Néanmoins, au milieu des considérations théologiques qui en occupent la plus grande partie, l'auteur s'attache à préciser le rôle historique de Jean-Baptiste (6-8,15); il rappelle en même temps que le Verbe divin s'est incarné et a fait son apparition parmi les hommes en la personne de Jésus-Christ (14, 17). Il déclare à sa manière que Jean-Baptiste est le Précurseur et Jésus le Messie. Restreinte à ce simple aperçu, la portée historique du prologue est incontestable.

2° 1, 19-2, 12. Nous avons ici, condensés en un récit relativement fort court, toute une série de faits témoignages de JeanBaptiste, vocation des premiers disciples, miracle de Cana. Les déclarations du Précurseur concernant la personne de Jésus sont rapportées à titre rétrospectif. Cela est évident pour ce qui regarde le deuxième témoignage (1, 29-34); c'est également vrai pour le premier. L'évangéliste veut rappeler les paroles de Jean conservées par la tradition et consacrées par les Synoptiques. La démarche des Juifs, qui sert à amener les premières déclarations, rentre parfaitement dans le cadre général du livre. D'un bout à l'autre du IVe Évangile, Jésus est en lutte avec les Juifs. Le ministère du Précurseur devait, logiquement, préluder à cet antagonisme. Pour les circonstances qui accompagnent ce conflit préliminaire, l'auteur nous fait connaître quel était l'état des esprits cultivés, — prêtres et pharisiens, — aux approches de l'ère messianique. Il nous fournit, en même temps, une donnée topographique qui n'est pas à dédaigner. D'après la leçon soutenue par Origène, le lieu où Jean baptisait tout d'abord s'appelait Béthabara et était situé au delà du Jourdain. La relation que l'évangéliste établit entre ce site et Jérusalem nous invite à chercher son emplacement à la hauteur de Jéricho. Cette localisation a son importance à cause des faits qui s'y rattachent, le

--

[ocr errors]

baptême de Jésus et la vocation des premiers disciples. Le passage 1, 29-34 insinue clairement que Jésus a été baptisé à cet endroit, et la suite de la narration montre que la vocation des apôtres a suivi de très près son baptême. Le fragment, 1, 35-51 fait le pendant du récit que nous lisons dans les deux premiers Synoptiques, Mt. 4, 18-22 et Mc. 1, 16-20. Sans nous demander dans quelle mesure l'auteur du IVe Évangile s'accorde avec ses devanciers, nous constatons que la vocation des premiers disciples se présente, chez lui, dans des circonstances tout à fait normales, et éclaire d'un jour spécial le commencement du ministère de Jésus. Il nous présente un groupe de disciples. réunis autour du Précurseur; dans ce groupe, Jésus, d'abord, se distingue par la manifestation surnaturelle qui accompagne son baptême. A partir de ce moment, Jean-Baptiste le reconnaît pour le Messie et s'efface pour se mettre à l'arrière-plan; c'est par son intermédiaire et sur son indication, que les premiers disciples vont à Jésus. Ainsi présentée, la vocation des apôtres n'a pas le caractère d'une conversion soudaine; elle est la conséquence en quelque sorte naturelle du ministère de Jean : les apôtres ont été disciples du Précurseur avant d'être disciples de Jésus. Il n'y a pas lieu de se demander comment des personnages galiléens se trouvent réunis en un endroit voisin de la mer Morte; Jésus était lui-même de Galilée; a-t-on jamais vu dans cette circonstance un motif de révoquer en doute son voyage à Béthabara? Les auteurs modernes nous paraissent avoir trop insisté sur ce fait, que les apôtres étaient de simples pêcheurs du lac de Génésareth, tout entiers à leurs occupations matérielles, le cœur rempli d'espérances messianiques, sans doute, mais l'esprit exempt de préoccupations religieuses. La vraisemblance historique fait supposer, et le IV Évangile atteste, qu'il n'en a pas été ainsi.

Avec le miracle de l'eau changée en vin, nous abordons un terrain un peu plus délicat. La donnée chronologique, par laquelle débute le récit, ne saurait faire aucune difficulté, vu qu'elle est fort vague et que l'évangéliste ne se soucie pas de nous fournir, sur ce point, un renseignement précis. Mais la question est de savoir s'il n'y a pas, dans la narration du fait miraculeux, une ntention symbolique. Ces jarres remplies d'eau destinée à « la purification des Juifs » et dont le contenu, sur la parole du Sau

veur, se change en un vin exquis, donnent à réfléchir. Cependant l'intention allégorique, si tant est qu'on doive l'y reconnaître, n'exclut pas forcément la réalité du fait.

3o 2, 13-3. La scène des vendeurs chassés du temple se présente avec des garanties d'historicité que les critiques les plus exigeants déclarent suffisantes. L'autorité du IVe Évangile se trouve confirmée sur ce point par la tradition synoptique. La divergence chronologique ne fait pas un obstacle sérieux à la concordance. Les premiers Évangiles n'embrassent qu'une période restreinte de la vie publique de Jésus. D'ailleurs, des quatre évangélistes, saint Luc est le seul qui, dans son prologue, semble promettre de s'astreindre à un ordre chronologique rigoureux, et il se trouve précisément qu'il omet de raconter l'expulsion des marchands.

On serait tenté, au premier abord, de voir dans Nicodème un personnage équivoque. Disons plus exactement qu'il joue un rôle double. Son intervention lors de l'ensevelissement du Sauveur (19, 39) prouve assez que, dans l'esprit de l'auteur, il s'agit d'un personnage réel. Néanmoins, on a fait observer avec beaucoup de raison que l'entrevue nocturne, dont il est question dans la première moitié du chapitre 3, ayant eu lieu sans témoin, l'entretien qui s'y rattache ne saurait être pris pour une reproduction rigoureuse. Il est manifeste que Nicodème représente ici une catégorie d'individus, un groupe; sa démarche est signalée en vue du dialogue au cours duquel est proclamée la nécessité de l'initiation par le baptême.

Au milieu des développements dogmatiques, l'auteur sacré ne perd pas de vue la suite des événements. Il nous présente Jésus et Jean-Baptiste exerçant concurremment leurs ministères respectifs. A cette occasion, il a soin de nous dire que le Précurseur n'avait pas encore été emprisonné. Ce détail nous révèle un réel souci de l'exactitude historique. La notice topographique qu'il joint à son récit fait supposer qu'il connaît exactement les lieux dont il parle. Sa description d'OEnon convient parfaitement aux sources nombreuses et abondantes qui se trouvent dans la plaine du Jourdain, au sud de Beisan, et à proximité desquelles on montre une élévation dont le nom rappelle d'une manière assez frappante celui de Salem, Tell-es-Sarem.

4o 4,1-42. L'épisode de la femme samaritaine est un des passages de notre Évangile, où les faits historiques servent de voile à l'allégorie. Comme Nicodème, la femme que l'auteur nous présente conversant avec Jésus auprès du puits de Jacob, est une personnification, un type. Le ministère de Jésus chez les Samaritains est, dans l'esprit de l'évangéliste, le premier pas vers l'universalisme, vers le culte en esprit et en vérité, qui doit réunir toutes les nations de la terre. La femme samaritaine figure le schisme des dix tribus; c'est un point qu'il serait difficile de méconnaître. Il est même possible que le symbolisme pénètre les détails du récit et que les cinq époux, par exemple, soient une allusion aux peuples étrangers que les conquérants assyriens transportèrent en Samarie. Mais il faudrait se garder de pousser trop avant les applications symboliques. Ici comme ailleurs, l'écrivain sacré fait servir l'histoire à l'exposé de ses conceptions théologiques, sans toutefois la lui sacrifier. Que Jésus, dans ses voyages à Jérusalem, ait parfois traversé la Samarie, aucun critique sérieux ne se permettra de le mettre en doute. Le cas se présente dans le troisième Évangile (17, 11), où la présence de Jésus chez les Samaritains ne paraît correspondre à aucune intention doctrinale de l'auteur. Dans la narration johannique, bien que l'enseignement domine l'histoire, plusieurs données précises, notamment celles que nous lisons aux versets 6,8, 35, laissent voir assez clairement que le cadre adopté par l'auteur n'est pas imaginaire. On aurait tort d'insister sur la déclaration de l'évangéliste, quand il nous dit que le Sauveur, pour se rendre de Judée en Galilée, devait passer par la Samarie (4). S'il fallait prendre à la lettre cette assertion, nous dirions que la nécessité dont il s'agit s'explique par l'économie générale du IVe Évangile.

5° 4, 43-54. C'est un des rares morceaux de l'Évangile johannique, où nous lisons de l'histoire pure et simple, sans digressions ni sous-entendus. C'est un passage de transition, un lien dont l'auteur se sert pour relier deux grandes époques de la vie de Jésus. Aussi y trouve-t-on juste les indications nécessaires pour rendre compte des trois mois d'intervalle qui séparent la seconde fête de Pâques du colloque raconté au chapitre précédent. Comme on le voit par les versets 46 et 54, l'évangéliste, sans vouloir

tout rapporter, tient à conserver ininterrompue la trame historique. La guérison du fils de l'officier est exposée en termes très sobres; elle ne donne lieu à aucun commentaire théologique, et il n'en sera plus question dans la suite. Rien n'autorise à voir dans cet épisode autre chose que le fait matériel.

6o 5. Il n'en est pas tout à fait de même pour le miracle de Béthesda. Les détails contenus au verset 2 prouvent que l'évangéliste connaît parfaitement le lieu dont il parle, et la précision qu'il met à localiser le prodige avertit le lecteur qu'il s'agit d'un fait bien réel. Mais le point capital, dans l'intention de l'auteur, n'est pas l'événement en lui-même; il est plutôt dans un détail particulier, à savoir que le miracle a lieu un jour de sabbat. Cette circonstance donne lieu aux récriminations des Juifs, et celles-ci servent de point de départ à un développement doctrinal, dans lequel l'évangéliste donne un résumé de sa théologie. On peut donc affirmer, pour ce qui regarde ce chapitre, que le fait est subordonné à l'enseignement.

7o 6. Le début de ce chapitre est de nature à déconcerter le lecteur. Au chapitre précédent, nous étions à Jérusalem, au milieu des solennités pascales. Voici que tout à coup l'auteur, sans aucune transition, nous transporte sur la rive orientale du lac de Génésareth. En même temps, il franchit un intervalle d'une année entière et se place aux approches d'une autre Pâque, de la Pâque suivante sans doute. On dirait qu'il a hâte d'arriver à un nouveau miracle qui doit servir de thème à de nouveaux développements. Comme dans la section qui précède, l'auteur débute par la narration d'un prodige, qui est la multiplication des pains; et ce prodige est suivi d'une discussion, au cours de laquelle le Sauveur expose une théorie mystique sur le pain de vie. Il est assez étonnant de rencontrer sur les bords du lac de Génésareth les « Juifs », c'est-à-dire cette portion de l'aristocratie hiérosolymitaine que l'auteur du livre nous présente constamment comme l'ennemie acharnée de Jésus. Nous avons vu plus haut le Sauveur, dans un colloque avec Nicodème, exposer la théorie du baptême; ici nous le voyons, dans une discussion avec les « Juifs », développer la doctrine eucharistique. Le IV Évangile raconte la dernière cène en omettant l'institution de l'eucharistie. Ce phénomène singulier trouve son explication la plus

« 이전계속 »