페이지 이미지
PDF
ePub

BALS (LES) AU THEATRE.

75

le bal, mais pendant une demi-heure avant qu'il | M. Musard conduisant son orchestre. On ne se lasse commence ces instrumens s'assemblent dans le pas de l'admirer... salon octogone, avec des tymballes et des trompettes, et donnent un concert composé de grands morceaux de symphonie des meilleurs maîtres. On peut assurer que ce bal forme un des plus beaux spectacles que l'on puisse voir, tant par le coup d'œil de la salle où il se donne que par la quantité | de masques qu'il attire pendant tout le carnaval.

La vogue du bal de l'Opéra n'a jamais cessé un instant, et elle a eu des époques de recrudescence remarquables. Telle est celle qui signala le temps où Musard, musicien excentrique mais non sans talent, Musard, qu'on surnommait le Paganini de la danse et le Roi du quadrille, s'installa à la tête de l'orchestre de ce bal, sous le règne de Louis-Philippe. Musard devint alors une des célébrités de Paris, et l'on s'étouffait à l'Opéra, les nuits de bal, pour le voir diriger cet orchestre gigantesque, comprenant 24 violons de chaque côté, des altos et des contrebasses en proportion, où les cuivres étaient représentés par 14 cornets à pistons et 12 trombones, et avec lequel il obtenait des effets de sonorité véritablement curieux, effets qu'il augmentait encore par des excentricités telles que le fracas de plusieurs chaises qu'on brisait en mesure à un moment donné,

ou d'un

A cette époque, les bals de l'Opéra se donnaient régulièrement chaque samedi pendant toute la durée du carnaval, et l'on en donnait un dernier le jeudi de la mi-carême. Après Musard, ce fut M. Strauss qui conduisit l'orchestre. Cela dura jusqu'en 1873, époque de l'incendie de la salle de la rue Le Peletier. Lors

que, deux ans après, la salle du boulevard des Capucines fut inaugurée, il fut question de supprimer les bals, par la crainte qu'on avait qu'ils fussent préjudiciables à la conservation artistique du monument. On finit cependant par les autoriser de nouveau, mais au nombre de quatre seulement par hiver, et leur succès est encore tel que ces quatre bals produisent une recette brute de 150 à 200,000 francs. Aujourd'hui il y a deux orchestres, l'un dans la salle même, dirigé par M. Olivier Métra ou par M. Arban, l'autre dans l'avantfoyer, à la tête duquel est placé M. Farbach, le fameux chef d'orchestre hongrois.

La mode

BALS (LES) AU THÉATRE. des bals, même des bals masqués, ne date pas d'aujourd'hui, et les anciens ne dédaignaient pas plus que nous le plaisir de la danse. Un chroniqueur du siècle dernier s'expliquait ainsi à ce sujet :

pistolet qu'on faisait partir à l'attaque du galop final d'un quadrille. Les danseurs, grisés par l'éclat de ces sonorités si puissantes et si étranges, mis hors d'eux par la verve et la furie que Musard déployait à la tête de ses musiciens, allaient alors le prendre de force sur son estrade, le mettaient sur leurs épaules et lui fai-publics. La danse simple fait le fond de ce specta

saient faire ainsi le tour de la salle en le portant triomphalement, tandis que tous les assistants s'égosillaient à crier sur tous les tons Vive Musard! Un joural d'alors le dépeignait ainsi

Tantôt il se lève, regarde le plafond, mesure le public du haut de sa majesté, se gratte la tête ou se tient les côtes; tantôt il s'asseoit, passe la main sur son front, siège de tant de génie, réceptacle de tant d'harmonie, entrepôt de tant de responsabilité. Dans certains moments, la pointe de son archet plane sur la note jusqu'à son agonie, et l'aide à mourir; dans d'autres, l'archet semble ramasser la note par terre, et la ramener vers le pupitre. C'est un curieux spectacle, je vous assure, que celui de

:

On trouve l'usage des bals établi dès l'antiquité la plus reculée. On en distingue de trois sortes : les bals de cérémonie, les bals masqués et les bals

cle, et il est fort en usage dans les occasions solennelles. Les bals se multiplièrent dans la Grèce, à Rome et en Italie. On n'y paroissoit qu'avec la parure la plus recherchée. C'est dans ces occasions que les personnages les plus graves se faisoient honneur d'avoir cultivé la danse dans leur jeunesse. Socrate est loué des philosophes qui ont vécu après lui de ce qu'il dansoit comme un autre dans les bals de cérémonie d'Athènes. Platon mérita leur blâme pour avoir refusé de danser à un bal que donnoit un roi de Syracuse. Et le sévère Caton, qui avoit négligé de s'instruire dans les premières années de sa vie d'un art qui étoit devenu chez les Romains un objet sérieux, crut devoir se livrer à cinquante-neuf ans aux instructions d'un maître à danser de Rome. Après la destruction de l'empire,

les États qui se formèrent de ses débris retinrent | rent invitées : le cardinal de Mantoue ouvrit le bal, et tous les Pères du concile dansèrent avec autant de modestie que de dignité. Les bals de Louis XIV furent magnifiques; ils se ressentoient de cet air de grandeur qu'il imprimoit à tout ce qu'il ordonnoit.

tous cette institution ancienne. On donna des bals de cérémonie jusqu'au tems où le génie trouva des moyens plus ingénieux de signaler la magnificence et le goût des souverains. Mais ces belles inventions n'anéantirent point un usage si connu; les bals subsistèrent et furent même consacrés aux occasions de la plus haute cérémonie. Philippe II, roi d'Espagne, étant arrivé à Trente durant la tenue du concile, les Pères ordonnèrent un bal pour sa réception. Les dames les plus qualifiées de la ville y fu

On s'ennuyoit à Rome dans les bals de cérémonie, et on s'amusoit dans la célébration des fêtes saturnales, sous mille déguisemens différents. Voilà l'origine des bals masqués. Les avantures que le masque servoit ou faisoit naître, les caractères di

[graphic][merged small][ocr errors]

vers de danse qu'il donnoit l'occasion d'imaginer, l'amusement des préparatifs, le charme de l'exécution, les équivoques badines auxquelles l'incognito donnoit lieu firent le succès de cet amusement. Il a été extrêmement à la mode en France pendant l'espace de deux cents ans. Les Grecs n'ont point eu ce genre, et les Romains ne l'ont eu que fort tard. Parmi les moyens d'amusement que ces bals procurent, ils ont des inconvéniens, et ils ont causé des malheurs. Néron, masqué indécemment,

couroit les rues de Rome et déshonoroit sans scrupule les plus honnêtes femmes. Dans un bal mas

qué que la duchesse de Berry donna aux Gobelins, le roi Charles VI, qui y étoit venu masqué en sauvage, faillit à être brûlé vif par l'imprudence du duc d'Orléans; plusieurs courtisans y périrent, et d'autres ne se sauvèrent qu'en se plongeant dans une cuve pleine d'eau qu'un heureux hazard fit rencontrer.

On a vu à l'article Bals de l'Opéra de quelle façon les bals masqués prirent naissance dans nos théâtres, au commencement du siècle dernier. Le succès obtenu sous ce rapport par

BALS (LES) AU THÉATRE.

77

l'Opéra lui suscita aussitôt des rivaux, rivaux | avoient obtenu de M. le duc d'Orléans, régent, la qu'en vertu de son privilège, de sa puissance permission de donner des bals publics sur leur et de la faveur dont il était l'objet, il sut théâtre. Ces bals devinrent si fort à la mode, que bientôt réduire au silence, au moins pour un ceux de l'Opéra se trouvèrent déserts, et furent fertemps. Le même chroniqueur nous renseigne encore sur ce point :

més les trois derniers jours du carnaval de cette année-là. Les directeurs de l'Académie royale de musique, effrayés du préjudice que cette permission Le 26 décembre 1716 les Comédiens François leur causeroit, si elle venoit à subsister, firent de

[graphic][ocr errors]

Ballet où Charles VI faillit être brûlé vif, d après une miniature des Chroniques de Froissart (xve siècle); à la Bibl. nat.

si fortes représentations et employèrent des in- | aussi plusieurs bals. Il y en eut un la nuit du 4 au stances si pressantes, qu'elle fut retirée en 1721.

Les Comédiens Italiens ayant abandonné leur théâtre de l'Hôtel de Bourgogne pour en ouvrir un nouveau à la Foire de S.-Laurent, voulurent aussi, pour grossir leur recette, donner le bal deux fois par semaine, le dimanche et le mercredi; mais les chaleurs de la saison leur firent discontinuer cette entreprise après quelques semaines.

Plusieurs années après, l'Opéra-Comique, qui étoit alors sous la direction du sieur Ponteau, donna

5 octobre sur ce théâtre, au niveau duquel on avoit construit un plancher qui remplissoit toute la longueur de la salle, qui étoit très bien décorée. L'assemblée fut brillante, et les boutiques de la Foire furent éclairées pendant toute la nuit. Ainsi fut terminé l'Opéra-Comique de la Foire de S.-Laurent en 1734. Le succès de ce premier bal engagea le directeur d'en donner les années suivantes, et tous les ans à la fête du roi il y eut un bal dans la salle de l'Opéra-Comique pendant plusieurs années.

Tout le monde sçait que M. Granval, comédien | teurs qui finirent par avoir raison de ses prédu Roi, obtint il y a sept ou huit mois la permission de donner huit bals publics à son profit dans la salle de la Comédie-Françoise. On lui laissa la liberté de choisir les jours qu'il jugeroit à propos pour ces assemblées. Il donna son premier bal le

tentions. Bientôt les théâtres n'eurent plus le monopole des bals, et des établissements se fondèrent où la danse faisait partie des divertissements offerts au public. En 1773, on dansait au Ranelagh, au bal d'Auteuil, au Colysée, au jardin des frères Ruggieri, les fameux arOn voit que l'Opéra avait trouvé des imita- tificiers, au Waux-hall de Torré, autre artifi

dimanche 6 mai 1753.

[graphic][merged small]

cier célèbre. Puis, avec la Révolution, les bals | la Tixeranderie. Et plus de 400 autres qui se publics, comme les théâtres, se multiplièrent nuiront réciproquement, parce que ce n'est pas d'une façon prodigieuse. « Ces divertissements, le désir d'amuser le public qui guide tous les disait un annaliste, se multiplient depuis la Ré- entrepreneurs de ces bals, mais le désir de gavolution. Il y en a un publiquement affiché chez gner de l'argent (1). » M. Blanchard, rue de Saintonge; un au Temple, chez M. Desbordes; un, rue de Lancry, chez un marchand de vin, c'est une fille qui en a l'inspection; un très beau et très suivi, rue de

A l'époque de la Restauration, et surtout sous la monarchie de Juillet, il y avait encore à

(1) Almanach général des Spectacles, 1791.

« 이전계속 »