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PLACE AU THEATRE !

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Un dictionnaire est un livre que l'on consulte, mais qui, généralement, ne se lit guère. Tous mes efforts ont tendu à ce que celui-ci non seulement fût digne d'être lu, mais encore pût se lire à la fois avec plaisir et profit : j'ai tâché qu'il fût aussi amusant que j'espère qu'il est instructif; à côté des documents historiques les plus sérieux, j'ai donné une large place à l'élément pittoresque et anecdotique; enfin, j'ai fait en sorte qu'il fût tout ensemble utile, intéressant et curieux. Si je n'ai pas réussi, je prie le public, mon maître, de croire que ce n'est pas faute de bonne volonté.

J'ajouterai, en terminant, que sans rien sacrifier jamais de l'agrément de mon sujet, et malgré le côté délicat qu'il pouvait présenter parfois, j'ai voulu que ce livre pût aller dans toutes les mains. Je déclare donc, en conscience, qu'il peut être lu par tous les yeux.

Et maintenant, place au théâtre! Les trois coups sont frappés, et le spectacle

commence.

A. P.

DICTIONNAIRE

DU THEATRE.

A

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ABONNÉ. Depuis la disparition de notre | pressions, on se permet de porter une main Théâtre-Italien, il n'y a plus à Paris que deux théâtres qui aient des abonnés, l'Opéra et la Comédie-Française; encore, à cette dernière, l'abonnement est-il une innovation récente, et réserve-t-on surtout aux abonnés un jour spécial de chaque semaine, le mardi.

A l'Opéra, certaines personnes s'abonnent soit à une loge, soit à un fauteuil d'orchestre, et retiennent cette loge ou ce fauteuil soit pour tous les spectacles de l'année indistinctement (excepté ceux du samedi et du dimanche, qui sont en dehors de l'abonnement), soit pour un jour régulier de chaque semaine. Les abonnés des loges sont des dilettantes; les abonnés des fauteuils d'orchestre sont généralement des amateurs d'un autre genre, qui ne viennent à l'Opéra que pour y contempler la splendeur des jupes des danseuses. Pour la plupart, ils entrent généralement dans la salle au moment précis où commence le divertissement ou le ballet, et s'empressent de partir dès que celuici est terminé. C'est une manière comme une autre d'encourager la musique.

A la Comédie-Française, on encourage la littérature d'une autre façon. Sous le prétexte que les familles abonnées peuvent amener au spectacle de jeunes filles dont les oreilles ne sauraient sans danger entendre certaines ex

DICTIONNAIRE DU THÉATRE.

indigne sur le texte de Molière ou sur celui de Musset, et de faire subir aux œuvres de deux écrivains qui sont, à des titres divers, la gloire et l'honneur de la scène française, des mutilations impies par lesquelles elles sont odieusement défigurées. Nous nous bornons ici à constater le fait, en souhaitant que la cause, c'est-à-dire les abonnés, en disparaisse le plus rapidement possible.

Dans les théâtres des grandes villes de province, les abonnés sont généralement assez nombreux, et la force qu'ils acquièrent par leur nombre les a souvent mis à même d'exercer une tyrannie intolérable. Naguère encore, dans ces villes, où les débuts d'une troupe nouvelle prenaient chaque année une importance aussi ridicule qu'exagérée, les abonnés étaient véritablement omnipotents; ils faisaient la loi à toutes les administrations théâtrales, le prenaient de haut avec le directeur, aussi bien qu'avec les infortunés artistes qui avaient le malheur de tomber sous leur coupe, et faisaient souvent dégénérer les débuts en soirées tumultueuses, couronnées par des scandales indignes. Seuls, les abonnés prenaient voix au chapitre, se considérant comme au-dessus du public entier, s'arrogeaient le droit, de par le scrutin dont ils s'étaient fait les uniques par

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ticipants, de voter l'admission ou l'exclusion | contrat passé entre un particulier et une admide tel ou tel artiste, et cela d'une façon sou- nistration théâtrale, par lequel celle-ci assure à vent brutale, grossière et cruelle. Les annales celui-là la jouissance, pendant un temps dédes théâtres de départements sont pleines de terminé, d'un certain nombre de places fixées faits indignes, véritablement inqualifiables, pour les représentations qui ont lieu dans une dont les abonnés se rendaient à chaque instant salle de spectacle. coupables, et qui sont loin d'être à l'honneur de la courtoisie et de la politesse de gens qui se prétendaient bien élevés. Tout cela, fort heureusement, tend à disparaitre, et la race des abonnés ne sera bientôt. plus qu'un souvenir. ABONNEMENT.

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A Paris, où l'abonnement est fort rare aujourd'hui, il n'entraîne de la part de la direction d'un théâtre aucune concession sur le prix des places, et assure seulement au locataire la possession de ces places pour toutes les représentations d'abonnement. Il n'en est pas de C'est une sorte de même en province, où les prix d'abonnement

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sont fort au-dessous des prix courants, et où, | baraques de saltimbanques, on trouve toujours, particulièrement, les officiers en garnison peuvent jouir d'un abonnement en échange du montant d'une journée de solde par mois.

soit parmi ceux qui font la parade, soit en dehors d'eux, un individu spécialement chargé de faire le boniment et d'amorcer les spectateurs. Il fait connaître la nature du spectacle, détaille aux badauds les merveilles qui vont

Le directeur se réserve, dans les contrats d'abonnement, la faculté de donner, dans le cours de son exploitation, un certain nombre de représen-être offertes à leur admiration, et, d'une voix tations dites « en dehors de l'abonnement ». Il doit prendre alors la précaution de faire inscrire sur ses affiches et sur ses programmes la mention: Abonnement suspendu, qui vient remplacer celle inscrite d'ordinaire: Abonnement courant.

à la fois puissante et enrouée, les incite à franchir le seuil de ce paradis enchanté. C'est l'aboyeur, bien connu par la péroraison devenue classique de son discours: Entrez, Messieurs et Mesdames, ça ne coûte que dix centimes, deux sous! et l'on ne paie qu'en sortant, si l'on est ABOYEUR.-Dans les foires, à la porte des content. Naguère encore, et grâce à la régle

ACADÉMIE DE DANSE.

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mentation tyrannique qui pesait sur nos théâ- | danse, et, par lettres patentes en date de 1661, tres, tous dépendants de l'autorité, certains d'entre eux, considérés seulement comme spectacles, étaient tenus, pour affirmer euxmêmes leur infériorité, d'avoir à leur porte un aboyeur qui les distinguait de leurs grands confrères. C'est ainsi que, sur l'ancien boulevard du Temple, le théâtre de Mme Saqui, les Funambules, le Lazari avaient chacun un aboyeur.

ACADÉMIE DE DANSE. - Louis XIV, qui avait, on le sait, la manie de tout réglementer, voulut organiser régulièrement jusqu'à la

constitua une Académie royale de danse, dont
ces lettres, qui forment un document vraiment
singulier, justifiaient ainsi la création :
« Bien que l'art de la danse, disait le souverain,
ait toujours été reconnu l'un des plus honnêtes
et plus nécessaires à former le corps, et lui
donner les premières et plus naturelles disposi-
tions à toute sorte d'exercices, et entre autres
à ceux des armes, et par conséquent l'un des
plus avantageux et plus utiles à notre noblesse
et autres qui ont l'honneur de nous approcher,
non seulement en temps de guerre dans nos
armées, mais même en temps de paix dans le

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divertissement de nos ballets: néanmoins il s'est, pendant les désordres et la confusion des dernières guerres, introduit dans ledit art, comme en tous les autres, un si grand nombre d'abus capables de les porter à leur ruine irréparable, que plusieurs personnes, pour ignorans et inhabiles qu'ils aient été en cet art de la danse, se sont ingérés de la montrer publiquement.... » C'est pour remédier à un inconvénient si grave et qui sans doute aurait pu faire courir à l'État de cruels dangers, qu'était créée une Académie royale de danse, composée des artistes que voici, nommés par le roi en personne « Savoir, François Galland, sieur du

Désert, maître à danser de la reine, notre très chère épouse; Jean Renauld, maître à danser de notre très cher et unique frère le duc d'Orléans; Thomas Levacher; Hilaire d'Olivet; Jean et Guillaume Reynal, frères; Guillaume Queru; Nicolas de l'Orge; Jean-François Piquet; Jean Grigny; Florent Galand-Désert ; et Guillaume Renault; lesquels s'assembleront une fois par mois, dans tel lieu ou maison qui sera par eux choisie et prise à frais communs, pour y conférer entre eux du fait de la danse, aviser et délibérer sur les moyens de la perfectionner, et corriger les abus et défauts qui peuvent avoir été ou être ci-après introduits.... >> Cette

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