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Paimez, & pourquoi donc obfervez-vous avec malignité fes intentions, toutes fes démarches pour les empoifonner? Pourquoi étudiez-vous le foible, le ridicule de fa vie, pour en faire la vitime de vos cenfures impitoyables ? Pourquoi cachant votre haine, fous des préfaces flatteuses & étudiées, faites-vous gliffer des paroles meurtrieres qui le tuent lors-même que vous le plaignez ? Pourquoi, non content de découvrir impitoyablement toutes les foibleffes, aller quelquefois inhumainement fouiller jufques dans les cendres mênres de fes peres, pour le faire rougir des défauts étrangers que le temps & la pénitence ont effacé? Dans un Sermon attribué à M. l'Abbé Couturier.

Notre a

mour pour être vérita ble doit être bienfaifant.

>

Matth. 5i

Il faut faire du bien à fon ennemi dans la néceffité & dans le befoin, parce que nous devons imiter cette bonté fouveraine de Dieu. C'eft ainfi qu'il en ufe tous les jours à notre égard; & fans parcourir cette multitude de biens naturels dont il vous a donné l'ufage, il fait luire fon foleil, dit l'Ecriture, folem fuum oriri facit, fur les bons & les méchans, & il fait pleuvoir fur les juftes 45. comme fur les injuftes. Que prétend-il par-là ? Sinon de nous faire étendre nos devoirs, indifféremment fur ceux dont nous avons sujet de nous louer, comme fur ceux dont nous avons fujet de nous plaindre ? Et parce que l'Apôtre Saint Jean nous ordonne de prouver notre dilection, non par des paroles, mais par des œuvres : Non diligamus I. Joan. 3. verbo fed opere. C'eft celle-là même qui fe répand 18. en bienfaits, qui eft la plus fidéle interprête du cœur ; & parce que la nature & la grace ont gravé dans le fond de notre ame l'obligation de traiter nos freres comme nous voulons qu'ils nous traitent ; & parce que nous fommes furs de les gagner en les adouciffant par nos foins & nos

La preuve qu'on n'ai

me point

fon

mi,

qu'on ne

cherche pas

à lui faire du bien.

bienfas, en les engageant par le bien que nous leur ferons, à fe répentir du mal qu'ils nous ont fait. Auteur manufcrit anonyme.

Qu'est-ce qu'aimer ? C'eft faire du bien à l'objet qu'on aime; ou lui en vouloir, quand on est enne- véritablement hors d'état de lui en faire. De-là c'est concluons que le même précepte qui m'oblige à aimer mon ennemi, m'oblige à lui faire du bien; & c'eft ce qui condamne la conduite d'un grand nombre de Chrétiens. Je ne veux point de mal, dit-on, à cet homme qui m'a fi fort outragé, je n'en dis point de mal. Parler ainfi, agir de la forte, eft-ce fatisfaire à la Loi qui m'engage à lui faire du bien? Non, parce qu'un tel langage, une telle conduite, fe bornent à l'indifférence, mais Dieu exige ici notre amour, & un amour bienfaisant ; il ne nous dit pas feulement de ne pas haïr, mais d'aimer nos ennemis, de leur Matth. 5. faire du bien. Benefacite illis. Autant donc qu'il a loin de l'indifférence à la dilection, autant y a-t-il loin de la conduite de ces fortes de Chrétiens, à l'observation du précepte qui les oblige d'aimer leurs ennemis, & de leur faire du bien. Le P. Pallu.

44.

Le précepte d'aimer

nos enne

mis & de leur faire du bien, ne fuppofe pas

une certai ne fenfibilités

eux.

pour

L'erreur des Chré

y

Il ne s'agit point d'un amour fenfible, ni d'une affection tendre qui n'est pas commandée, parce qu'elle n'eft pas libre. Heureux qui pourroit aimer affez Dieu, pour aimer ainfi fes plus cruels ennemis ; il ne s'agit que d'une amitié véritable, qui peut fubfifter fans cette fenfibilité qui ne il faut tombe point fous le précepte. En un mot, aimer fon ennemi d'une amour plein de bonté compatiffant, toujours prêt à rendre fervice, toujours bienfaifant. Selon la Loi, & dans toute l'étendue de la Loi, il faut l'aimer en Dieu, en vûe de Dieu, & pour l'amour de Dieu. L'Auteur.

O vous! qui croyez remplir le précepte, en ne

rendant

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d'aimer leurs enne

imis, parce qu'ils ne leur font

rendant point le mal pour le mal, défabufez- tiens qui vous. Eft-il poffible que vous ofiez vous flatter fe flattent d'aimer votre ennemi Cet état de neutralité, cette froide fufpenfion du cœur, eft-elle poffible même, & n'est-ce pas un état imaginaire & chimérique qui ne se trouve point? Car enfin, c'eft la charité qui accomplit la Loi; & l'indifférence quand vous pourriez en demeurer-là, peutelle jamais faire le caractère d'un véritable Chrétien? D'ailleurs n'eft-il pas jufte de vous engager à traiter votre ennemi comme Dieu luimême vous traite? Vous êtes l'ennemi de Dieu, & Dieu ceffe-t-il de répandre à pleines mains, fesbienfaits fur vous? M. l'Abbé Couturier.

,

Il faut pardonner à fes ennemis, & les aimer; ou il faut être effacé du Livre de vie. Ce n'eft point ici une figure ou un enthousiafme d'Orateur, c'eft une vérité fondée dans tous les principes de notre Religion. Ainfi, avez vous pris votre parti? Etes-vous réfolus de ne point pardonner? Si cela eft, venez avec moi je fuis ici de la part de Dieu pour vous dégrader folemnellement du caractère du Chriftianifme que vous portez indignement. Voyez-vous cet Autel, où tous les jours on immole l'Agneau fans tache, pour la rémiffion des péchés? Cette victime n'eft plus

pour vous. Voyez-vous cette Table, où l'on reçoit le Sacrement de l'unité? Ne préfumez plus d'en approcher. Voyez-vous ces Tribunaux facrés, où par une humble confeffion on obtient pardon de fes crimes? En vain vous en approcheriez-vous. Vos crimes font devenus irrémiffibles; depuis que vous êtes réfolus de ne point pardonner. Portez les yeux fur ce figne facré de votre falut; la même voix qui demande miféricorde pour les bourreaux, prononce l'arrêt de votre condamnation. Vous entendez ce peuple fidéle Tome I. Morale I. Vol. N

point de mal.

Trait frappant, qui peut faire la d'un Difcours.

conclufion

Divifron

générale.

Soudivi

fions de la premiere Partie.

élevant de concert la voix pour offrir leurs prieres au Seigneur, prenez garde d'y mêler la vôtre; leurs prieres fe terminent toutes, par demander à Dieu qu'il leur pardonne, comme ils pardonnent de leur côté à ceux qui les ont offenfés. Prier à votre égard, feroit demander votre condamnation, & preffer l'exécution de votre fupplice.

0000000000000000

PLAN ET OBJET DU SECOND DISCOURS fur l'amour des Ennemis & le pardon des injures.

L'oe

'ON peut dire, que quoique de tous les préceptes que Jefus-Chrift nous a faits, il n'en foit aucun de plus formel & de plus précis, que celui du pardon des injures, il n'en eft point cependant de plus contredit & de plus mal observé; les uns fe récriant contre la Loi, la traitent d'injuste & d'impraticable; les autres, plus dociles en apparence la refferent dans la pratique, & réduifent prefque à rien, un précepte fi fécond & d'une fi grande étendue. Pour détruire ces deux groffieres illufions, j'entreprends de juftifier & d'expliquer la Loi. Ainsi, je me borne aujourd'hui à vous faire voir

,

1o. La justice de la Loi du pardon des injures, contre les fauffes raifons dont on fe fert pour l'attaquer.

2o. L'étendue de cette Loi, contre les vains prétextes qu'on allegue pour la refferrer dans la pratique.

à

Qu'il y ait en nous un penchant violent qui nous porte à nous venger d'une injure reçue, hair nos ennemis, & à régler nos fentimens à leur égard, fur la maniere dont ils en ufent envers

nous, c'est une vérité dont l'expérience ne nous convainc que trop; & fi le vindicatif n'apportoit d'autre excufe que fa foibleffe, on loueroit du moins fa fincérité & fa bonna foi: mais vouloir juftifier ce penchant malheureux, autorifer une paffion cruelle dont les effets font fi funeftes, c'est un aveuglement trop exceffif & trop commun, pour pouvoir le diffimuler. Pardonner les injures, dit le vindicatif, c'eft me priver d'un droit qui m'appartient, c'est m'expofer froidement à la malignité & à la fureur des méchans, c'est renoncer au feul moyen qui me refte pour réparer mon honneur. Et moi je dis que fe venger, c'est ufurper un droit qui n'appartient qu'à Dieu; c'eft introduire le défordre & la confufion dans la fociété ; c'eft fe foumettre en efclave à une paffion tyrannique, qu'il feroit glorieux de réprimer. La vengeance eft donc de toutes les paffions la plus injurieuse à Dieu, la plus oppofée à la tranquillité publique, la plus honteufe & la plus cruelle à l'égard de celui qui l'exerce.

Soudivi

feconde

Partie.

Il y a bien des illufions à combattre contre ceux mêmes qui approuvent la Loi dans la fpé- fons de la culation, & l'éludent dans la pratique. Pardonner les injures felon le monde, & les pardonner felon l'Evangile, font deux chofes bien différentes. A quoi veut-on réduire dans le monde le pardon des injures? à ne point faire paroître fa haine, à ne pas rendre le mal pour le mal, à fe priver du plailir de fe venger: c'eft-à-dire, qu'on veut bien pardonner à fon ennemi, mais qu'on ne peut le réfoudre ni à l'aimer, ni à lui faire du bien, ni à entretenir avec lui cette liaison que la fociété chrétienne demande de nous. Trois illufions faciles à détruire par l'Evangile.

Preuves de

Comprenons que Dieu fans infpirer la malice la pre niere aux méchans, peut la diriger à fes fins fecretes, Partie.

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