N'en déplaise à ces Fous nommez Sages de Grece Les voyageurs fans guide affez fouvent s'égarent; 7 L'un à droit, l'autre à gauche, & courant vainement, Chacun fuit dans le monde une route incertaine Mais chacun pour foy-mesme eft toûjours indulgent Un Avare idolâtre, & fou de fon argent Rencontrant la difette au sein de l'abondance, Et met toute sa gloire, & son souverain bien, L'un & l'autre à mon fens ont le cerveau troublé, Répondra chez Fredoc, ce Marquis fage & prude, Et qui fans ceffe au jeu, dont il fait fon étude, Attendant fon deftin, d'un quatorze ou d'un fept, Voit fa vie ou fa mort fortir de fon cornet. Que fi d'un fort fâcheux la maligne inconftance Vient par un coup fatal faire tourner la chance : Vous le verrez bien-toft les cheveux heriffez, Et les yeux vers le Ciel de fureur élancez, Ainfi qu'un Poffedé que le Preftre exorcife, Mais laiffons-le plûtoft en proye à fon caprice, Il eft d'autres erreurs, dont l'aimable poison Que feroit-il, helas! fi quelque Audacieux Alloit pour fon malheur luy défiller les yeux: Luy faifant voir ces vers & fans force & fans graces, Montez fur deux grands mots,comme fur deux échaffess Ces termes fans raifon l'un de l'autre écartez, Et ces froids ornemens à la ligne plantez ? Qu'il maudiroit le jour où fon ame insensée Perdit l'heureuse erreur qui charmoit sa pensée ! Jadis certain Bigot, d'ailleurs homme sensé D'un mal affez bizarre eut le cerveau bleffé: S'imaginant fans ceffe, en fa douce manie, Des Elprits bien-heureux entendre l'harmonie, Enfin un Medecin fort expert en fon art, Le guerit par adreffe, ou plûtoft par hazard. Mais voulant de fes foins exiger le falaire : Moi? vous payer? luy dit le Bigot en colere, Vous, dont l'art infernal, par des fecrets maudits, En me tirant d'erreur m'ôte du Paradis. J'approuve fon courqux. Car, puifqu'il faut le dire, Souvent de tous nos maux la Raison eft le pire. C'eft Elle qui farouche, au milieu des plaifirs, D'un remords importun vient brider nos defirs. La Fâcheufe a pour nous des rigueurs fans pareillesz C'eft un Pedant qu'on a fans ceffe à fes oreilles Qui toujours nous gourmande, & loin de nous toucher, Souvent, comme Joly, perd fon temps à prescher. Envain certains Rêveurs nous l'habillent en reine, Veulent fur tous nos fens la rendre fouveraine, Et s'en formant en terre une divinité, Penfent aller par Elle à la felicité. C'eft Elle, difent-ils, qui nous montre à bien vivre. 粥粥 SATIRE V A MONSIEUR LE MARQUIS DE DANGEAU A Nobleffe, Dangeau, n'eft pas une chi mere; Quand fous l'étroite loi d'une vertu fe, vere, Un homme iffu d'un fang fecond en Demi-Dieux, Suit, comme toy, la trace où marchoient les ayeux. Mais je ne puis fouffrir qu'un Fat, dont la molleffe N'a rien pour s'appuier qu'une vaine noblesse, Se pare infolemment du merite d'autruy, de Luy. Et me vante un honneur qui ne vient pas Ait fourni de matiere aux plus vieilles chroniques, |