페이지 이미지
PDF
ePub

cun des sujets soit au singulier comme lui; car alors, au lieu de les embrasser tous, il répond à chacun en particulier, comme s'il étoit répété : et s'il y en a quelqu'un qui soit au pluriel, entre le verbe et celui-là, il n'y a plus concordance, l'Ellipse est irrégulière. Ainsi lorsque Racine a dit :

Les rois dans le ciel ont un juge sévère,

L'innocence, un vengeur, et l'orphelin, un père.

Voltaire :

(Esther, act. V, sc. dern.)

Vous régnez, Londre est libre, et vos lois, florissantes.
(La Henriade, ch. II.)

Et Montesquieu : Le peuple jouit des refus du Prince, et les courtisans, de ses grâces;

Ces écrivains se sont permis une licence que leur nom peut à peine faire pardonner. ( Marmontel, p. 348. )

Une licence plus grande encore dans l'Ellipse, c'est de supposer la répétition du verbe, lorsque le temps est changé:

J'eusse été près du Gange esclave des faux dieux,
Chrétienne dans Paris, musulmane en ces lieux.

(Voltaire, Zaïre, act. I, sc. 1.)

Car le verbe sous-entendu avant musulmane est je suis, et non pas j'eusse été. (Même autorité.)

Un autre défaut dans l'Ellipse, c'est la différence du pas= sif à l'actif; comme si l'on dit : EN AIMANT on veut L'ÊTRE. J'AIMOIS, je me flattois de L'ÊTRE.

Qui ne sait point aimer n'est pas digne de l'étre.

On se permettoit cette Ellipse du temps de Vaugelas, et récemment encore quelques bons écrivains se la sont permise On ne trompe pas long-temps les hommes sur leurs intérêts; et ils ne haïssent rien tant que de L'ÊTRE. (Vauvenargues.)

Mais, quoique cela s'entende, l'expressión ne répond pas au sens; elle présente un faux régime.

(Th. Corneille, sur la 27 remarque de Vaugelas. Dumarsais, page 92, t. 1. Beauzee, Encyclopédie méthodique, au mot Répétition.)

Cependant l'Ellipse semble bonne à Marmontel, lors= qu'entre deux adjectifs de divers genres, tous deux au même nombre, la désinence est semblable pour tous les deux. Comme lorsqu'un homme dit à une femme: Vous étes sensible, je le suis plus que vous. Vous avez été malade, et moi je le suis. Vous étes jeune, et je ne le suis pas.

Vaugelas (433o rem.) et Th. Corneille ( sur cette rem. ) ne désapprouvoient pas absolument qu'une femme dit: Je suis plus grande que mon frère; et un homme : je suis plus grand que ma sœur ; mais ils sont d'avis que l'on doit éviter ce tour de phrase.

L'Académie, consultée à cet égard, a pensé que ces lo cutions sont fort bonnes, parce que l'adjectif, pour ne regarder qu'un des deux sexes, ne laisse pas de convenir à l'autre par la sous-entente, qui tacitement le fait du genre qu'il faut.

Andry de Boisregard (page 238 de ses réflexions sur la langue françoise), Chapelain (sur la remarque de Vaugelas), Wailly (p. 151 de sa Grammaire), et Lévizac (p. 263), se sont rangés à l'avis de l'Académie, et l'usage l'a confirmé. En effet, St.-Evremond a dit : L'ame des femmes coquettes n'est pas moins FARDÉE que leur visage.

Madame de Maintenon: Je suis aussi LASSE du monde gens de la cour le sont de moi.

que les

La Bruyère: La foiblesse est plus OPPOSÉE à la vertu que le vice.

Lorsque, dans une proposition, l'un des deux membres est affirmatif, et l'autre négatif, on doit répéter le verbe, et ce seroit, d'après l'avis de Beauzée (Encycl. méth., au mot Répétition) et de Dumarsais (p. 217, t. I), une incorrection, une Ellipse irrégulière, que de s'en dispenser.

Lors douc que Corneille a dit (dans le Cid, act. III, sc. 6):

L'amour n'est qu'un plaisir, et l'honneur un devoir.

[ocr errors]

il a fait ce que l'on appelle une Ellipse irrégulière, et il eût évité cette incorrection s'il eût dit :

L'amour n'est qu'un plaisir, l'honneur est un devoir.

(L'Académie, Sentim. sur le Cid.)

Les Grammairiens que nous venons de citer sont d'avis d'appliquer cette règle aux propositions liées par la conjonc= tion mais, et dont l'un des deux membres est affirmatif et l'autre négatif. Suivant eux, c'est une faute que de dire : Notre réputation ne dépend pas du caprice des hommes, mais des actions louables que nous faisons.

M. Lemare pense au contraire que mais, servant à mar= quer une idée d'opposition ou de restriction, annonce assez par lui-même dans quel sens (affirmatif ou négatif) est pris le second membre de la phrase; dès-lors il croit que la répé tition du verbe est absolument inutile, car elle ne serviroit qu'à entraver la marche du style; d'ailleurs, ajoute-t-il, elle est contraire à l'usage des meilleurs écrivains, ainsi qu'on peut s'en convaincre par les exemples suivants :

prit.

L'harmonie NE frappe pas simplement l'oreille, MAIS l'es(Boileau, Traité du Sublime.) Les Richesses engendrent le Faste et la Mollesse, qui ne SONT point des enfants bátards, MAIS leurs vrais et légitimes productions. (Ibid. Tr. du Subl., ch. 35.) Le flambeau de la critique NE doit pas brúler, MAIS éclai= (Favart.)

rer.

Il n'est pas dans l'esprit humain de se mettre à la place des gens qui sont plus heureux, MAIS seulement de ceux qui sont plus à plaindre. (J.-J. Rousseau, Émile. )

Curius, à qui les Samnites offroient de l'or, répondit que son plaisir N'ÉTOIT pas d'en avoir, MAIS de commander à ceux qui en avoient. (Bossuet, Hist. univ., 3o pie. )

Quand on a besoin des hommes, il faut bien s'ajuster à eux; et puisqu'on ne sauroit les gagner que par les louanges, ce N'EST pas la faute de ceux qui flattent, MAIS de ceux qui veulent étre flattés. (Molière, l'Avare, act. I, sc. 1.)

Ce NE SONT pas les places qui honorent les hommes, MAIS les hommes qui honorent les places. (Mot d'Agésilas.)

Enfin, comme le fait observer Marmontel (Grammaire, p. 358), dans la langue usuelle le besoin que l'on a communément de dire vite, a introduit infiniment plus de ces abréviations que dans la langue soigneusement écrite; c'est pour cela que le style familier en admet, dans toutes les langues,'beaucoup plus que dans le style noble. Combien y a-t-il moins de tours elliptiques dans Racine et dans Fénélon que dans Molière, La Fontaine et madame de Sévigné!

Mais en revanche, la langue noble, surtout la langue poé= tique, a bien d'autres licences et d'autres hardiesses. Racine, le modèle dans l'art d'écrire la tragédie, Racine, le plus pur, le plus élégant de nos poètes, s'est permis souvent ce qu'on ne passeroit à aucun écrivain de nos jours.

Ainsi, au défaut de l'usage, l'analogie l'a autorisé à dire : l'effroi de ses armes, comme on dit, la terreur de son nom. Il a pu dire: Il prend l'humble sous sa défense, comme on dit, sous sa garde, sous sa protection, puisque l'un comme les deux autres, présentent l'image d'un bouclier. Il a pu dire; persécuter le père sur le fils, comine on diroit, se ven= ger du père sur le fils, puisque l'action est oppressive, et que sur la peint mieux que dans. Il a pu dire: Mon ame inquié tée d'une crainte ; et, dans le même sense

[ocr errors][merged small][merged small][merged small]
[ocr errors]
[ocr errors]

(Andromaque, act. I, sc. 11.), «to. I

[ocr errors]

puisque cette expression inquiétée a plus d'énergie qu'in= quiète; elle signifie troublée, agitée, ce qu'inquiète ne dirait pas; car on ne dit pas inquiète en faveur de quelqu'un, ➡ Enfin il a été permis à Racine de dire: En votre main, au lieu de, en vos mains,

717

[ocr errors]

!!!!! Savez-vous si demain

Sa liberté, ses jours seront en votre main? (Bajazet, act. I, sc. 7.)

II.

66.

et en ma main, au lieu de, en mes mains :

J'en dois compte, madame, à l'empire romain,
Qui croit voir son salutou sa perte en ma main.
(Britannicus, act. I, sc. a)

parce qu'en image, et familièrement parlant, dans ma main, est plus vif, plus fort, que dans mes mains: Je tiens Je tiens sa fortune dans ma cette affaire dans ma main.

main.

Il y a encore, ajoute Marmontel, une foule de locutions elliptiques, dont la plupart ne sont susceptibles d'aucune construction analytique, mais que l'usage autorise, et qui, reçues dans le langage, ne sont plus soumises à aucun

[merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Cette seconde figure de construction est le contraire de l'ellipse. Dans celle-ci on supprime des mots nécessaires à la plénitude de la phrase, mais dont on peut aisément suppléer la valeur; dans celle-là, on ajoute des mots superflus qui pourroient être retranchés sans rien faire perdre du sens.

Lorsque ces mots superflus quant au sens, donnent au discours ou plus de grâce, ou plus de netteté, ou enfin plus de force et d'énergie, le Pléonasme est une figure autorisée et même nécessaire.

(Dumarsais, Encycl. méth., au mot Construction, et sa Logique, p. 116.)

mérita

Quand on dit: Louis XII, LE BON ROI LOUIS XII, le glorieux surnom de Père du Peuple; ces mots le bon roi Louis XII marquent encore plus expressément la bonté de sans réce prince, que si l'on eût dit le bon roi Louis XII,

« 이전계속 »