LIVRE CENT-DIXIE ME.

Endant que tout fe difpofoit à l'extinction du AN. 1449.

Pfchifme, ou à procurer la paix de l'églife qui fut

&

I.

Le roi de France travaille

Comment.

heureusement terminée dans cette année, par la ceffion volontaire d'Amedée de Savoie, & par les foins à la paix de du roi de France, qui, felon le rapport d'Eneas Syl- 'église. vius, y travailla plus que tout autre, & y eut la plus grande part; les électeurs de Tréves, de Cologne, de P 1.1.7. Saxe, & le comte Palatin du Rhin, firent un acte par lequel ils s'uniffoient au roi de France, & fe conformoient au projet de paix qu'il avoit propofé, & qui fut fuivi dans la plupart des articles. Le pape Nicolas fut fi pénétré de reconnoiffance pour le zele que le roi Charles VII. fit paroître en cette occafion, qu'il lui en fit de grands remercimens, & donna à fa pieté les éloges qu'elle méritoit. La joie fut genérale par tout le monde Chrétien, on publioit de toutes parts la modération d'Amedée, la fermeté de Nicolas, & la fagesfe du roi de France. Louis duc de Savoie craignoit tellement que l'affaire ne manquât, qu'étant informé qu'un certain Bolomere tâchoit de diffuader Amedée fon pere de donner fa ceffion; il le fit jetter, une pierre

au cou, dans un lac.

I I.

Fin du fchif me par la cef

Les ambassadeurs de France, fçavoir Jacques patriarche d'Antioche, & évêque de Poitiers, Elie évêque d'Alet, Jean comte de Dunois, Jacques Cœur, Gui fon d'Amedée. Bernardi, Jean le Bourfier, & Thomas de Courcelles, accompagnez d'Alphonfe Segura doyen de Tolede, & député du pape Nicolas V. s'étoient rendus à Lausanne auprès d'Amédée, pour y déliberer avec les députez

tom. XIII.

P. 1333.

AN.1449 fur les moyens de rendre une paix parfaite à l'églife, & d'éteindre entierement le fchifme. Après que les députez d'Amedée eurent promis en fon nom qu'il renonceroit au fouverain pontificat, on convint que Labbe, conc. Nicolas V. expedieroit trois bulles, fçavoir une pour caffer toutes les procedures faites pendant le schifme, une autre pour confirmer tout ce qui avoit été fait dans les deux parties, & la troifiéme pour rétablir tous ceux qui avoient été dégradez de leurs dignitez. Les ambaffadeurs de France s'engagérent par écrit le quatrième d'Avril de remettre à Amedée ou au chapitre de Geneve dans le mois de Juillet fuivant, lefdites bulles en plomb dûment expediées en cour de Rome, conformes à la teneur qui en avoit été preferite, enfuite de quoi le neuvième d'Avril Amedée connu dans fon obedience fous le nom de Felix V. renonça au pontificat, & à tous les droits qu'il y pouvoit prétendre.

III.

Decret des

affemblez à Lausanne.

Concil. gener. x111. p. 1335.

Labbei, tom.

Seq.

Les peres de Bafle de leur côté s'affemblerent pour peres de Bale la derniere fois à Laufanne le feiziéme du même mois, afin d'autorifer davantage cette ceffion, & la revêtir de toutes les formalitez neceffaires, ils y firent deux decrets, où ils difent, qu'afin d'établir une paix folide, qu'il ne reste plus aucun veftige de divifion, & pour fe conformer aux deffeins du pape Felix V. qui venoit de renoncer purement & fincerement au fouverain pontificat, ils déclarent null es toutes les cenfures portées à l'occasion du schifme, & toutes les élections, nominations, provifions bonnes & valables; remettant à ceux qui en ont joui, quoiqu'excommuniez par le concile de Bafle, tous les fruits de leurs benéfices qu'ils ont perçus alors, quoiqu'ils fussent dûs à la chambre apoftolique. Ils maintiennent de part & d'autre tous ceux qui font en poffeffion de dignitez, bené

fices & offices ecclefiaftiques, confirment à cet effet AN 1449. toutes les collations, provisions, poftulations, élections, &c. faites dans chaque obedience, & les difpenfes, indulgences & autres graces accordées par les conciles ou par les papes des deux obediences, aufsibien que les decrets, difpofitions, réglemens qu'ils auroient faits; ils ftatuent encore que les archevêques, évêques, abbez & autres benéficiers demeureront paifibles poffeffeurs des benéfices dont ils font en poffeffion que toutes les fentences, procès & jugemens contraires, feront nuls & révoquez; que les cardinaux de l'une & de l'autre obédience demeureront dans leurs dignitez.

Labbe, conc. gener. tom. XIII.

Auffi-tôt qu'on eût appris cette renonciation de Felix, & qu'on n'étoit plus foumis dans l'église qu'à un feul pape, qu'on reconnoiffoit pour le légitime vicaire de Jefus-Chrift, la joie fut univerfelle parmi tous les Fideles, & l'on entendoit crier dans Rome de toutes parts: Vrve le pape Nicolas. Auffi le faint pere pour témoigner à Dieu fa reconnoiffance d'un fi grand bienfait, ordonna des prieres publiques au Vatican; & l'on fit la P. 1343. même chose dans toute l'Italie. Il ne fe contenta pas d'écrire au roi de France, afin de le remercier des foins qu'il avoit pris pour l'extinction du fchifme, il voulut auffi faire part d'une fi heureuse nouvelle à toute la Chrétienté, par les trois bulles que les ambaffadeurs de France avoient promises à Amedée. La feconde & la plus longue, datée de Spolete du dix-huitiéme de Juin, porte que Dieu ayant rendu la paix à fon églife par les foins des ambaffadeurs des rois de France & d'Angleterre, de René roi de Sicile, & du dauphin; Amedée premier cardinal, évêque de Sabine, légat & vicaire du faint fiége en quelques provinces, qu'on

Qqq iij

I V. Bulles du

pape Nicolas. ceffion de Ec

touchant

lix.

la

Concil. gener.

Labbei,

tom.

L. p. 1347.

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AN.1449. appelloit Felix V. dans fon obédience, avoit renoncé au droit qu'il prétendoit au fouverain pontificat; que ceux qui avoient été affemblez à Bafle, & enfuite à Laufanne fous le nom de concile genéral, avoient ordonné & publié qu'il falloit obéir à Nicolas; comme à l'unique & indubitable fouverain pontife; & qu'ils avoient diffous ladite affemblée de Bafle. " Defirant donc, continue le pape, autant que Dieu nous en donne le pouvoir, procurer la paix à tous les Fideles, nous approuvons, ratifions & confirmons pour le bien de l'union de l'églife, de notre pleine puiffance apoftolique, & du confeil & confentement de ,, nos freres les cardinaux, les élections, confirmations, provifions de quelque église & bénéfice que ,, ce foit; les confécrations, benédictions, absolutions, difpenfes & administrations des biens, droits & fubventions du faint fiége, & tout ce qui regarde en , genéral & en particulier la justice & la faveur dans le for exterieur & interieur faits aux personnes & aux lieux qui obéiffoient à Felix & à ceux qui étoient affemblez à Bafle ou à Lausanne, comme auffi tout ,, ce que les ordinaires ont fait par leur autorité, &c.,, Par la premiere bulle, il rétablit entierement toutes les perfonnes, de quelque dignité, condition & état qu'elles foient, qui ont été privées de leurs benéfices & jurifdictions par le pape Eugene, pour avoir suivi Felix & le concile de Basle. Enfin par la troisiéme il déclare nul tout ce qui a été dit ou écrit contre le même Felix, les peres de Bafle & leurs adherans, voulant que le tout foit effacé des regîtres d'Eugene, & qu'il n'en foit plus fait aucune mention. Ainfi finit entierement le fchifme: & Nicolas V. fut reconnu de tous pour le feul pape legitime.

Labbe, conc.

tom. XIII. P. 3335. Seg.

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رو

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V.

Le pape conferve aux cardileur dignité.

naux de Felix

An. Sylv. in Europ: c. 42.

La réconciliation fut entiere & parfaite entre le AN.1449. fouverain pontife & le cardinal d'Arles, qu'Eugene avoit dépofé. Nicolas le reçut à fa communion, lui affura la poffeffion de fa dignité, & l'envoya même légat dans la basse Allemagne, d'où étant de retour, il fe retira dans fon diocele, & y travailla continuellement à la réforme de fon clergé, & à l'instruction des peuples foumis à fa conduite: mais fes travaux ne durerent pas long-tems, puifqu'il mourut l'année fuivante. Le pape rétablit auffi Jean archevêque de Tarentaife, Louis de Varembon évêque de Maurienne, Guillaume de l'Etang archidiacre de Metz, qui étoient tous François, & que Felix avoit faits cardinaux; les. autres étoient morts, ou avoient renoncé à cette dignité. Entre ces derniers étoit Jean de Ségovie Espagnol, recommandable par fa doctrine & par les mœurs, & qui étant prévôt de l'église de Cesarée, vivoit content dans un petit monaftere au milieu des montagnes. Il compofa deux livres du concile de Bafle, dont Auguftin Patrice chanoine de Sienne a tiré les actes. Il a auffi traduit en latin l'alcoran des Turcs, dont il réfute les rêveries par de folides raifons. Pour Amédée de Savoie, il retourna après fa démiffion à Ripailles, où il paffa le reste de fes jours dans de bonnes œuvres, retire à Ripailavec les chevaliers de l'ordre militaire de faint Mau- les. rice, qui, fans embraffer l'ordre monaftique, y vivoient avec beaucoup d'innocence & de régularité. Il n'y a donc aucun fondement dans ce que quelques auteurs ont avancé, qu'on y vivoit dans les délices & dans la bonne chere, & que c'eft de là qu'eft venu ce proverbe, faire ripailles, c'est-à-dire, se donner du bon tems. Il y avoit déja cinq ans qu'il vivoit dans fa retraite,lorfque les peres de Bale le choisirent pour pape;

V I. Amedée fe