jette loin de lui, honteux de s'être laiffé tromper par les plus belles

apparences.

De tout ce que nous avons dit jufqu'ici, il réfulte qu'un Miniftre des Autels, n'est parfait dans fon état qu'autant qu'il fçait allier la bonne odeur de fes vertus, aux paroles de vie qu'il porte; que s'il doit fa vigilance & fes foins au prochain, il en est encore redevable à lui-même. S'il ne travaille fans ceffe à devenir comme les Prêtres que choifit Judas Machabée, un homme fans tache & qui fait fes délices de la loi du Seigneur, Sacerdotes fine maculá, vo- I.мach. luntatem habentes in lege Dei, toutes 4. 42. fes fonctions extérieures pafferont, fans laiffer aucune trace: elles ne lui ferviront au plus qu'à fe perdre au milieu de l'éclat d'une réputation toujours chancelante & peu méritée.

Combien le péché mortel eft énorme dans les Eccléfiaftiques.

Q

S. I.

UE le Dieu que nous fervons eft bon, qu'il eft aimable. Hé! pourquoi l'offenfons-nous? Comblés de fes bienfaits, fecourus de fa grace, animés par fes récompenfes, excités par fes menaces, ne devrions-nous pas lui être toujours fideles ? Pouvons-nous dire que nous le fommes? obfervons-nous la Loi du Seigneur? eft-elle l'unique regle de nos defirs & de nos actions?

Quoiqu'il en foit de notre propre conduite, il n'eft que trop vrai de dire que Dieu n'eft pas aimé, qu'il n'eft pas obéi par la plupart des hommes. On le quitte, on l'offense, on l'oublie dès qu'on eft en état de le connoître. Les péchés augmentent avec les années. Chaque jour eft marqué par de nouvelles infidélités.

En cela ce qu'il y a de plus déplo rable, c'est que les Miniftres des faints Autels, établis pour détruire le regne du péché & pour le bannir du cœur des autres, ne le fouffrent que trop fouvent dans le leur. Ils introduifent la défolation dans le lieu faint & l'abomination dans le Sanctuaire. C'eft ce qui afflige l'Eglife, ce qui fcandalife les Fideles & fait triompher l'erreur & le libertinage. Je fçais qu'il eft un grand nombre d'Eccléfiaftiques qui font l'ornement du Clergé par toutes les vertus qu'ils réuniffent en eux. Mais on ne peut diffimuler qu'il s'en trouvé qui bien loin de s'oppofer à l'empire du péché ne fouffrent que trop qu'il domine dans leur ame. Lorfqu'ils font affez aveugles & malheureux pour tomber dans un état fi déplorable, c'eft fans doute parce qu'ils ne penfent pas à la griéveté de l'injure qu'ils font à Dieu en l'offenfant mortellement, tâchons de leur en faire fentir l'énormité. Confidérons- la d'abord en général, nous verrons ensuite ce qui l'augmente dans un Prêtre.

Quel motif & quel prétexte avezyous pour m'offenfer, dit le Seigneur

en parlant au pécheur. Tout grand & tout puiffant que je fuis, tout vil & tout méprifable que vous êtes, je veux bien m'abaiffer jufqu'à écouter vos reproches, voyez fi vous pouvez m'en faire. Qu'eft-ce donc qui peut juftifier l'outrage que je Ifai. reçois de vous: Narra fi quid habes c. 43. ut juftificeris. Je vous ai tiré du néant v. 26. où je pouvois vous laiffer. Dès le

premier inftant de votre vie vous avez été l'objet de mes foins & de ma vigilance. Je vous ai placé dans ce monde où rien ne manque à vos befoins & à vos innocents plaifirs. J'ai éloigné de vous les dangers qui ont été funeftes à tant d'autres. Je vous ai préfervé de l'Enfer où de moins coupables que vous fouffrent, brûlent,gémiffent, fe défefperent depuis tant d'années. J'ai fait mourir mon propre fils pour vous procurer un bonheur éternel. Sont-ce là des motifs pour rejetter mes loix, pour s'opposer à ma volon té, pour me déplaire & fe féparer de moi ainfi que vous le faites toutes les fois que vous m'offenfez? Narra fi quid habes ut juftificeris. Quelle perfection me manque-t-il pour

mériter que vous me foyiez fidele? Grandeur & majefté, puiffance & beauté, fageffe & bonté, ne poffédeje pas toutes ces qualités que vous pouvez chercher ? Dans quel autre que moi les trouvez-vous pour lui donner la préférence que vous me refusez? Votre cœur eft mon ouvrage, n'eft-il pas jufte que je le pofféde? Ne l'ai-je donc formé, ne l'ai - je racheté au prix de mon fang, qu'afin qu'il s'attache à des objets que je détefte & qui font infiniment au deffous de moi? Je ne le veux, ce cœur, je ne le demande que pour le rendre heureux. Je fuis l'unique fource de tous les biens, c'eft de moi feul qu'il peut les recevoir, & vous le livrez au monde, vous l'abandonnez au démon qui ne le veulent que pour le perdre. Qu'est-ce qui peut vous excufer d'en agir de la forte: Narra fi quid habes ut juftificeris.

Vous ne voulez pas obéir à Dieu, vous qui obéiffez aux hommes, de qui vous dépendez? Les Anges, ces Efprits fi nobles & fi fublimes éxécutent fes ordres; les créatures infenfibles fe foumettent aux loix qu'il