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mediatement après la fondation. Quand les deux Brutus donnerent aux Romains le premier combat de Gladiateurs qu'ils euffent vû dans leur ville, les Romains étoient déja civilifez mais loin que l'humanité & la politeffe des fiecles fuivans aïent dégoûté les Romains des 1pectacles barbares de l'amphithéatre, au contraire elles les en rendirent plus épris. Les Vierges Vestales avoient leur place marquée fur le premier degré de l'amphithéatre dans les tems de la plus grande politeffe des Romains, & quand un homme paffoit pour barbare, S'il faifoit marquer d'un fer chaud fon efclave qui avoit volé le linge de table, (a) crime. pour lequel les loix condamnent à mort dans la plupart des païs Chrétiens, nos domeftiques qui font des hommes d'une condition libre. Mais les Romains fentoient à l'amphithéatre une émotion qu'ils ne trouvoient pas au cirque ni au théatre. Les combats de Gladiateurs ne cefferent à Rome qu'après que la religion chrétienne y fut devenue la religion dominante, & que Conftantin le grand les eut défendus par une loi expreffe. (b)

Juvenal. Sat. 14.

(b) Cod. Juft. lib. x. tit. 44. leg. unica.

L'attrait du fpectacle des Gladiateurs le fit aimer des Grecs auffi-tôt qu'ils le connurent: ils s'y accoutumerent, quoiqu'ils n'euffent point été familiarisez avec fes horreurs dès Fenfance. Les prin cipes de Morale où les Grecs étoient alors élevez, ne leur permettoient pas d'avoir d'autres fentimens que des fentimens d'averfion pour un fpectacle où, dans le deffein de divertir l'affemblée, on égorgeoit des hommes qui fouvent n'avoient pas merité la mort.

fon

Sous le regne d'Antiochus Epiphane, Roi de Syrie, les arts & les fciences qui corrigent la ferocité de l'homme, & qui même quelquefois amoliffent trop courage, fleuriffoient depuis longtems dans tous les païs habitez par les Grecs. Quelques ufages pratiquez autrefois dans les jeux funebres, & qui pouvoient reffembler aux combats des Gladiateurs, y étoient abolis depuis longtems. Antiochus qui formoit de grands projets, & qui mettoit en œuvre pour les faire réuffir le genre de magnificence qui eft propre à concilier aux Souverains la bienveillance des Nations, fit venir de Rome à grands frais des Gladiateurs pour donner aux Grecs amou reux de toutes les fêtes un fpectacle

nouveau. Peut-être penfoit-il auffi qu'en affiftant à ces combats, on conçut le mépris de la vie qui avoit rendu le foldat des Legions plus déterminé que celui des Phalanges dans les guerres, où fon pere Antiochus le grand & Philippe Roi deMacedoine avoient été battus par les Romains. D'abord, dit Tite-Live, l'aréne ne parut qu'un objet d'horreur. Qu'on s'imagine ce que les Grecs, toujours ingenieux à fe vanter, comme à tabaiffer les Barbares, purent dire fur la ferocité des autres Nations; Antiochus ne ferebuta point. Afin d'apprivoifer peu à peu les peuples avec fon nouveau fpectacle, il y fit combattre les Champions feulement jufqu'au premier fang. Nos Philofophes regarderent avec plaifir ces combats mitigez, mais bientôt ils ne détournerent plus les yeux des combats à toute outrance, & ils s'accoutumerent à voir tuer des hommes uniquement pour les divertir. Il fe forma même des Gladiateurs dans le païs. (a) Gladiatorum munus Romana confuetudinis primo majore cum terrore hominum infuetorum ad tale fpectaculum, quam cum voluptate de dit. Deinde fæpiùs dando & vulneribus tenus, modo fine miffione etiam, & (4) Livius lib. 41.

familiare oculis gratumque id fpectaculum fecit, & armorum ftudium plerifque ju venum accendit. Itaque qui primo à Roma. paratos Gladiatores magnis præmiis arceffere folitus erat, jam fno.

Nous avons dans notre voifinage un peuple tellement avare des fouffrances des hommes, qu'il refpecte encore l'humanité dans les plus grands fcelerats. Il a mieux aimé que les criminels échapaffent fouvent aux châtimens que l'interêt de la focieté civile demande qu'on leur faffe fubir, que de permettre qu'un innocent pût être jamais expofé à ces tourmens dont les Juges fe fervent dans les autres païs chrétiens pour arracher aux accufez l'aveu de leurs crimes. Tous les fupplices dont il permet l'ufage, font de ceux qui tuent les condamnez fans leur faire fouffrir d'autre peine que la mort. Neanmoins ce peuple, fi refpectueux envers l'humanité, fe plaît infiniment à voir les bêtes s'entre-déchirer. Il a même rendu capables de fe tuer ceux des animaux à qui la nature a voula refufer des armes qui puffent faire des bleffures mortelles à leurs femblables, il leur fournit avec induftrie des armes artificielles qui bleffent facilement à mort. Le peuple dont je parle con

temple encore avec tant de plaifir des hommes, païez pour cela, fe battre jufqu'à fe faire des bleffures dangereufes, qu'on peut croire qu'il auroit de veritables Gladiateurs à la Romaine, fi la Bible défendoit un peu moins pofitivement de verfer le fang des hommes horsles cas d'une abfolue neceffité.

On peut dire la même chofe d'autres Nations très-polies & qui font profeffion de la religion ennemie de l'effufion du fang humain. Les fêtes les plus cheres à nos ancêtres, les tournois n'étoient-ils pas des fpectacles où la vie des tenans couroit un veritable dan

ger; il y arrivoit quelquefois que la

lance à roquet bleffoit à mort auffi-bien que la lance à fer émoulu: la France no le fçut que trop quand le Roi Henri II. fut bleffé mortellement dans une de ces fêtes. Mais nous avons dans nos Annales une preuve encore plus forte que celle-là, pour montrer qu'il eft dans les fpectacles les plus cruels une elpece d'attrait capable de les faire aimer des peuples les plus humains. Les combats en champ clos, entre deux ou plufieurs champions, furent long-tems en ufage parmi nous; & les perfonnes les plus confiderables de la nation y ti

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