페이지 이미지
PDF
ePub

lameilleure voie de defcription quand il s'agit des chofes qui tombent fous le fentiment. Il colorie à peu près comme un tel, difons-nous, il deffine comme celui-là; il compofe comme l'autre. Or nous n'avons pas fur les ouvrages des anciens Peintres de la Gréce, le fentiment de perfonne qui ait vû les ouvrages de nos Peintres modernes. Nous ne fçavons pas même quelle comparaifon, on pouvoit faire autrefois entre les fragmens de la peinture antique qui nous reftent, & les beaux tableaux des Peintres de la Gréce qui ne fubfiftent plus.

Les Ecrivains modernes qui ont traité de la peinture antique, nous rendent plus fçavans fans nous rendre plus capables de juger la queftion de la fuperiorité des Peintres de l'antiquité fur les Peintres modernes. Ces Ecrivains fe font contentez de ramaffer les paffages des Auteurs anciens qui parlent de la peinture, & de les commenter en Philolo gues, fans les expliquer par l'examen de gues,fans ceque nos Peintres font tous les jours,& même fans appliquer ces paffages aux morceaux de la peinture antique qui fubfiftent encore.Jepenfe done que pour fe former une idée auffi diftincte de la

peinture antique qu'il foit poffible de l'avoir, il faut confiderer féparément ce que nous pouvons fçavoir de certain fur la compofition, fur l'expreffion & fur le coloris des Peintres de l'antiquité.

Nous avons crû à propos de divifer l'ordonnance en compofition Pittorelque & en compofition poëtique. Quant à la compofition pittorefque, il faut avouer que dans les monumens qui nous reftent, les Peintres anciens ne paroiffent pas fuperieurs, ni même égaux à Raphaël, à Rubens, à Paul Véronefe ni à Monfieur le Brun. Suppofé que les anciens n'aïent fait rien de mieux dans ce genre que les bas reliefs, les médail les & les peintures qui nous font demeurées, ils n'ont pas égalé les modernes. Pour ne point parler des autres défauts des compofiteurs anciens, leur perfpec tive eft ordinairement mauvaife. Monfieur de la Chauffe, (a) dit en parlant du païfage des Thermes de Titus: Da quefta Pittura fi conosce che gli Antichi fono ftati altretanto infelici nella Profpettiva, ch' eruditi nel disegno.

Quant à la compofition poëtique, les anciens fe piquoient beaucoup d'exceller dans fes inventions, & comme ils $ (a) Pittur. Anti, pag. 13.

étoient grands deffinateurs, ils avoient toutes fortes de facilité pour y réuflir. Pour donner une idée du progrès que les anciens avoient fait dans cette partie de la peinture qui comprend le grand' art des expreffions, nous rapporterons ce qu'en difent les Ecrivains de l'antiquité. De toutes les parties de la peinture, la compofition poëtique eft celle dont il eft plus facile de donner une idée avec des paroles. C'eft celle qui fe décrit le mieux.

Pline qui nous a parlé de la peinture encore plus méthodiquement que les autres Ecrivains, compte pour un grand mérite dans un Artifan les expreffions & les autres inventions poëtiques. Il eft fenfible par fes récits que cette partie de l'art étoit en honneur chez les anciens, & qu'elle y étoit cultivée autant que dans l'école Romaine. Cet Auteur raconte comme un point d'hiftoire inportant, que ce fut un Thébain, nommé Ariftide, qui fit voir le premier qu'on pouvoit peindre les mouvemens de l'ame, & qu'il étoit poffible aux hommes d'exprimer avec des traits & des couleurs les fentimens d'une figure muerte, en un mot, qu'on pouvoit parler aux yeux. Pline parlant encore d'un tableair

d'Ariftide qui reprefentoit une femme percée d'un coup de poignard, & dont l'enfant fucçoit encore la mammelle, s'énonce avec autant de goût & de fentiment que Rubens l'auroit pû faire en parlant d'un beau tableau de Raphaël. On voit, dit-il, fur le vifage de cette femme,abatuë déja & dansles fimptômes d'une mort prochaine, les fentimens les plus vifs & les foins les plus empreffez de la tendreffe maternelle. La crainte que fon enfant ne fe fit mal en fucçant du fang au lieu de lait, étoit fi bien marquée fur le vifage de la mere, toute l'attitude de fon corps accompagnoit fi bien cette expreffion, qu'il étoit facile de comprendre quelle penfée occupoit la mourante.

On ne parle pas de l'expreffion auffibien que Pline & les autres Ecrivains de l'antiquité en ont parlé, quand on n'a pas vû un grand nombre de tableaux riches dans cette partie de la peinture. D'ailleurs il falloit bien que des ftatuës où il fe trouve une expreffion auffi fçavante & auffi correcte que celle du Laocoon, du Rotatenr, &c. rendiffent les anciens connoiffeurs, & même difficiles fur l'expreffion. Les anciens qui outre les ftatues que j'ai citées, avoient enco

re une infinité d'autres pieces de compariifon excellentes, ne pouvoient pas fe trompet en jugeant de l'expreffion dans les tableaux, ni prendre le médiocre en ce genre pour l'exquis.

Nous lifons encore dans Pline un' grand nombre de faits & plufieurs détails qui prouvent que les Peintres anciens fe piquoient d'exceller dans l'expreffion, du moins aurant que les Peintres de l'école Romaine fe font piquez d'y exceller. La plupart des foüanges que les Auteurs anciens donnent aux tableaux dont ils parlent, font l'éloge de l'expreffion. C'eft par-là qu'Aufonne vante la Medée de Timomache, où Medéé étoit peinte dans l'instant qu'elle fevoit le poignard fur fes enfans. On voit, dit le Poëte, la rage & la compaffion mêlées enfemble fur fon vifage. A travers la fureur qui va commettre un meurtre abominable, on apperçoit encore des reftes de la tendreffe maternelle.

Immanem exhaufit rerum in diverfa laborem, Fingeret affectum matris ut ambiguum, Ira fubeft lacrimis, miferatio non caret ira Alter utrum videas ut fit in alter utro.

On fçait avec quelle affection Pline

« 이전계속 »