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donnent lieu à plufieurs incidens intereffans, dont il peut réfulter une morale utile. Mais la barbarie d'un pere qui veut facrifier ses enfans à une pas

fion, que

, que la jeuneffe ne sçauroit plus excufer en lui, ne peut être regardée que comme un crime énorme, & tel à peu près que celui de Médée. Si ce crime peut être expofé fur le théatre, s'il peut y donner lieu à une morale utile, c'eft en cas qu'il y paroiffe dépeint avec les couleurs les plus noires, & qu'il y foit enfin puni des châtimens les plus féveres que Melpomene emploïe, mais dont Thalie ne peut pas fe fervir. Il est contre les bonnes mœurs de donner l'idée que cette action n'eft qu'une faute ordinaire, en la faisant servir de fujet à une piece Comique.Qu'on flétriffe donc cette piece odieuse, mais qu'on tombe d'accord en même-temps que les Comédies de Terence, & la plupart de celles de Moliere, font propres à purger les paffions.

SECTION XLV.

De la Mufique proprement dite.

I

L nous refte à parler de la Mufique comme du troifiéme des moïens que les hommes ont inventez pour donner une nouvelle force à la Poëfie & pour la mettre en état de faire fur nous une plus grande impreffion. Ainfi que le Peintre imite les traits & les couleurs de la nature, de même le Muficien imite les tons, les accens, les foupirs, les infléxions de voix, enfin tous ces fons, à l'aide defquels la nature même exprime fes fentimens & fes paffions. Tous ces fons, comme nous l'avons déja expofé, ont une force merveilleufe pour nous émouvoir, parce qu'ils font les fignes des paffions, inftituez par la nature dont ils ont reçû leur énergie, au lieu que les mots articulez ne font que des fignes arbitraires des paffions. Les mots articulez ne tirent leur fignification & leur valeur que de l'inftitution des hommes qui n'ont pû leur donner dans un certain Païs. La Mufique, afin de rendre l'imita

cours que

tion qu'elle fait des fons naturels plas capable de plaite & de toucher, l'a réduite dans ce chant continu qu'on appelle le fujet. Cet art a trouvé encote deux moïens de rendre ce chant plus capable de nous plaire & de nous émouvoir. L'un eft l'harmonie, & l'autre eft le rithme.

Les accords dans lefquels l'harmonie confifte, ont un grand charme pour l'oreille, & le concours des differentes parties d'une compofition musicale qui font ces accords, contribue encore à l'expreffion du bruit que le Muficien prétend imiter. La baffe continuë & les autres parties aident beaucoup le chant à exprimer plus parfaitement le fujet de l'imitation.

Les anciens appelloient rithme em mufique, ce que nous appellons mesure & mouvement. Or la mefure & le mouvement donnent l'ame, pour ainfi dire, à une compofition muficale. La fcience du rithme, en montrant à varier à propos la mefure, ôte de la mufique cette uniformité de cadence, qui feroit capable de la rendre bien-tôt ennuïeufe. En fecond lieu, le rithme fçait mettre -une nouvelle vrai-femblance dans l'imitation que peut faire une compoft

tion musicale, parce que le rithme lui fait imiter encore la progreffion & le mouvement des bruits & des fons naturels qu'elle imitoit déja par le chant & par l'harmonie. Ainfi le rithme donne une vrai-femblance de plus à l'imi

tation.

La mufique fait donc fes imitations par le fecours du chant, de l'harmonie, & du rithme. In cantu tria pracipuè notanda funt, harmonia, fermo & rithmus. Harmonia verfatur circa fonum. Sermo circa intellectum verborum & enuntiationem diftinclam. Rithmus circa concinnum cantici motum. C'eft ainfi que la Peinture fait fes imitations par le fecours du trait, du clair-obscur & des couleurs locales.

Les fignes naturels des paffions que la mufique raffemble, & qu'elle emploïe avec art pour augmenter l'énergie des paroles qu'elle met en chant, doivent donc les rendre plus capables de nous toucher parce que ces lignes naturels ont une force merveilleufe pour nous émouvoir. Ils la tiennent de la nature même.Nihil eft enim tam cognatum mentibus noftris, quàm numeri atque voces, quibus excitamur,& incendimur,& leaimur & languefcimus, dit un des judi

-cieux obfervateurs des affections des -hommes. (a) C'eft ainfi que le plaifir de l'oreille devient le plaifir du cœur. Delà font nées les chanfons; & l'obferva-tion qu'on aura faite, que les paroles de ces chanfons avoient bien une au-tre énergie lorfqu'on les entendoit chanter, que lorsqu'on les entendoit dé-clamer, a donné lieu à mettre des ré-cits en mufique dans les fpectacles, & l'on en eft venu fucceffivement à chanter une piece Dramatique en entier. Voilà nos Opera.

Il eft donc une verité dans les récits des Opera, & cette verité confifte dans l'imitation des tons, des accens, des foûpirs, & des fons qui font propres naturellement aux fentimens contenus dans les paroles. La même verité peut fe trouver dans l'harmonie & dans le rithme de toute la compofition.

La mufique ne s'eft pas contentée d'imiter dans fes chants le langage inatticulé de l'homme, & tous les fons naturels dont il fe fert par inftinct. Cet art a voulu encore faire des imitations de tous les bruits qui font les plus capables de faire impreffion fur nous lorfque nous les entendons dans la nature. 44) Cic. lib. 3. de Or.

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