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ont beau essayer, ils n'arrivent à aucune conclusion satisfaisante. S'il en est ainsi, celui qui entreprend loyalement d'exposer ses propres idées sur les preuves de la religion, n'éprouve aucun malaise à se trouver à première vue, un isolé perdu au milieu du désaccord universel.

Quoi qu'il en soit, pour lui, il apporte son faisceau de raisons, les raisons qui le font croire. Il les apporte, parce que ce sont ses raisons à lui. D'autres s'accordent avec lui à trouver les mêmes raisons convaincantes, et c'est là, pour lui, un nouveau motif d'être convaincu. Mais enfin, pour lui, l'évidence essentielle est celle qu'il trouve dans ses propres pensées. C'est celle que le monde lui demande et a droit de lui demander. Il sera donc enfin d'autant moins outrecuidant, d'autant plus modeste, qu'il se défendra plus rigoureusement de réclamer pour ses conclusions un assentiment universel, d'ailleurs chimérique, et qu'il se contentera plus simplement d'exposer sur quoi se fonde sa foi à la religion naturelle et à la religion révélée. Ce n'est pas qu'il doute des fondements de sa foi. Bien au contraire, il les tient pour tellement suffisants qu'à son avis, ce sont les propres fondements de la foi de tous. Ceux qui n'en reconnaissent pas la valeur, ou bien les admettent implicitement et en substance, ou bien les admettraient s'ils prenaient la peine de faire une enquête sérieuse, ou les admettront lorsqu'on les leur exposera, ou enfin sont empêchés de les admettre par des difficultés d'un autre ordre, invincibles ou non, et dans le détail desquelles il n'a pas le droit d'entrer. En un mot, son affaire à lui est de parler pour lui-même, et il peut dire comme disaient les Sama

ritains après avoir eu Notre-Seigneur deux jours avec eux. << Maintenant nous croyons, non plus sur ta parole, mais parce que nous l'avons entendu nous-mêmes, et que nous savons à coup sûr qu'il est le Sauveur du monde (1). »

(1) G. A. chap. X, p. 378-381.

CHAPITRE DEUXIÈME

DE L'ADHÉSION AUX VÉRITÉS RELIGIEUSES

Je suis donc certain de la vérité de ma religion. C'est là un fait qu'il faut que j'explique, que j'interprète et dont je dois presser les conséquences. Or, dès le premier abord, je remarque dans ce fait, deux caractères saillants (1).

Le premier est que, au moment où je prononce cordialement un acte de foi, ma certitude est tout à fait indépendante des raisons qui m'ont amené à croire. Je crois fermement, sans me demander pourquoi je crois. Si on me le demande, à moi prêtre et docteur, comme ma vocation m'a obligé à réfléchir sur ces choses, je ne serai pas embarrassé de fournir mes raisons. Mais ceci est pour les autres, au service desquels ma profession me place, et non pour moi. A ce premier fait, je ne songerais pas à donner une seconde d'attention si la lecture des ouvrages d'apologétique chrétienne ou de la libre pensée ne m'inspirait un commencement d'inquiétude. Dans les deux camps, pour ou contre la foi, on s'acharne à la discussion des motifs de crédibilité. Il semble que tout se concentre là, et que suivant les résultats de la dispute,

(1) Le thème de cette introduction ne se trouve pas explicitement développé par Newman. Il aborde immédiatement l'assent, et ne nous dit pas comment il a été amené à cette étude et sous quelle impression il l'aborde. Néanmoins le lecteur se rendra facilement compte que je ne dis rien ici qui soit de mon cru.

on doive nécessairement croire ou ne pas croire. La foi serait donc essentiellement dépendante de ces motifs. Or, je ne remarque rien en moi qui réponde à cette nécessité. Je crois énergiquement sans penser aux raisons pour lesquelles je crois. Il y a plus, si d'aventure, je rencontre des difficultés sérieuses et de nature à suspendre l'adhésion de ma raison raisonnante, je n'en continue pas moins à croire, comme si de rien n'était. Il y a plus encore, quand j'ai besoin de retremper ma foi, je ne vais pas consulter les apologistes. La prière, le sacrifice, les bonnes œuvres me sont un remède plus simple et plus efficace. Voilà une première expérience, voilà comment ma foi est faite. Arrivé au terme d'une longue vie de foi, voilà ce que mon expérience me force à dire sur les actes par lesquels j'adhère à la religion révélée.

Le second fait n'est pas moins évident. Je sens que cette foi est vivante, je crois de toute mon intelligence et de tout mon cœur. Mathématicien, philosophe, j'adhère à une foule d'autres vérités, mais certes pas de la même manière. De ces vérités de la foi toute ma vie morale découle. Dans ces vérités, toute ma personne est engagée.

Les premiers chapitres de la Grammar qui ne semblent qu'un simple traité de logique, ne sont en réalité que l'interprétation de ces deux premières remarques. Newman appelle assent (I) (assentiment, adhésion) l'acte de l'esprit qui accepte sans hésitation, restriction, ni conditions, une proposition quelconque. Il distingue cet acte, non seulement du doute, mais de l'inférence, c'est-à-dire de l'acte de l'esprit qui perçoit la conclusion d'un raison

(1) Je traduis assent par assentiment. Il importe cependant de faire remarquer qu'aucun mot français ne rend exactement l'assensus latin, l'assent anglais. Adhésion ajoute peut-être une note qui manque au mot assentiment j'emploierai tour à tour ces deux mots, dont aucun n'est satisfaisant. Aucun d'eux n'exprime le caractère actif de l'assent.

nement. Évidemment, la même vérité peut être, soit successivement, soit en même temps, objet d'adhésion et d'inférence, mais ce n'est jamais le même acte qui accepte une vérité et qui reconnaît que cette vérité est logiquement déduite de prémisses antécédentes. Il arrive souvent que c'est l'inférence qui m'a fait découvrir cette vérité et qui me permet de l'affirmer, mais une simple affirmation ne garde plus trace des raisonnements qui l'ont rendue possible. La perception d'une conclusion peut se comparer à une voûte encore munie d'un support provisoire. L'affirmation catégorique de l'esprit qui adhère à une vérité, ressemble à cette même voûte lorsqu'on l'a débarrassée de ses supports. On voit où Newman en veut venir. La foi est un acte d'adhésion, par conséquent elle n'a plus rien d'une inférence.

Une affirmation a pour objet soit des idées abstraites, soit des réalités concrètes. Dans le premier cas, Newman l'appelle adhésion intellectuelle abstraite, notional, dans le second, réelle. Cette distinction va lui servir à grouper les observations qui se rapportent à la seconde remarque. C'est parce que la foi peut être une adhésion réelle, qu'elle est vivante, personnelle et principe d'action. Et ceci encore a dans sa pensée des conséquences incalculables.

Les extraits que je vais traduire paraîtront subtils. Là est pourtant le noeud de la synthèse antiintellectualiste que nous exposerons tout à l'heure. Un lecteur pressé d'aboutir pourrait ne pas aller plus avant dans ce chapitre. Tout ce qui est dit ici, se retrouve implicitement dans le chapitre suivant.

On peut, me semble-t-il, grouper cette série d'observations sous trois chefs et étudier:

1o La différence radicale entre assent et inférence. 2o Les adhésions réelles

et la question de savoir

comment l'acte de foi est une adhésion réelle.

3o La certitude d'une adhésion quelconque et particulièrement des adhésions de la foi.

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