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que fa perte étoit infaillible, s'il ne tentoit un coup de vigueur. Son projet n'étoit pas feulement de fe tirer de prifon; il vouloit de plus aller lui-même intéreffer le Prince de Kouei & fes partifans à lui fournir de puiffans fecours, avec lefquels il pût dégager Nanchang, après avoir défait les Tartares. Il fort donc une nuit à la tête de deux cens hommes, les plus braves de fa garnifon, & tandis qu'une autre troupe va par fon ordre infulter une des redoutes, il se présente avec fes gens au bord du foffé dans un endroit qui lui parut favorable à fon deffein. La résistance qu'il y trouva ne fut que médiocre; toute l'attention des Mancheoux s'étant tournée du côté de

la fauffe attaque: ainfi Kinchinhoan franchit le foffe.

chin

Cependant le Général Tartare Mort ne tarda pas à être informé que de Kinfa proie lui échappoit. Auffi-tôt hoan & il fait partir plufieurs troupes de prife de cavaliers pour aller battre la chang: campagne de tous côtés, avec pro

Nan

armée des Manchcoux n'étoit pas encore à portée de le fecourir en cas de fiége, il voulut gagner du temps, & ne pas irriter par un refus abfolu un homme du caractère de Lychintong. Il répondit donc poliment à fa fommation; lui faifant entrevoir des fentimens femblables aux fiens, une forte d'impatience dé reconnoître le Prince de Kouei pour Souverain; & ne différant, difoit-il, cette démarche que pour la faire plus à propos.

Le Général ravi de joie que fa lettre eût fi bien opéré fur l'efprit du Mandarin, fe retira à une journée ou deux de Kantcheou, pour ne point donner lieu aux Tartares de foupçonner fon intrigue avec le Commandant de la Place. Mais un grand mois s'étant écoulé, fans en recevoir aucunes nouvelles, il fe rapprocha fubitement, & réïtéra fa fommation. L'art d'une réponfe étudiée auroit été affez inutile au Gouverneur qu'on preffoit de fe rendre. Il le comprit ; & c'eft ce qui l'engagea à joindre un peu

de perfidie à la diffimulation dont il avoit ufé auparavant. Venez dans trois jours à minuit avec la moitié de vos troupes, écrivit-il à l'impatient Lychintong, la porte de l'ouest vous fera ouverte. Contenez bien votre monde, jufqu'au moment où vous fe rez au centre de la Ville. C'eft-là que j'irai me joindre à vous en toute fûreté.

On ne comprend pas comment le Général Chinois, militaire de profeffion dès fa jeuneffe, & qui certainement n'avoit point été regardé jufqu'alors fur le pied d'un homme fimple, ne douta pas un feul inftant de la fincérité du Gouverneur. Le troifiéme jour venu, ce vieux guerrier, tel qu'un jeune préfomptueux qui veut devenir conquérant à quelque prix que ce foit, fe rend à minuit au lieu marqué avec la meilleure partie de fon monde, & il trouve effectivement la porte ouverte. On entre auffi-tôt en grand filence, tirant droit vers le milieu de la Ville : mais la réception qu'on fit à ces

Mort

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tong.

nouveaux hôtes, ne fut pas celle qu'ils attendoient. Lychintong & fes gens filoient le long de la rue uniquement attentifs à ne point troubler le fommeil des Bourgeois; quand à la lueur de plufieurs flambeaux qui paroiffent tout à coup ils fe voient affaillis de côté & d'autre, attaqués de front, pris en queue & coupés. Le Général fut d'abord furpris & indigné, autant qu'il eft naturel de l'être en pareil cas; mais fa tête ne l'abandonna point. Il fit des prodiges de valeur; & avec une poignée de braves qui s'étoient ferrés autour de lui il vint à bout de s'ouvrir un paffage. Cette petite troupe heureufement dégagée, coula par différentes rues jufqu'à une porte, qu'on enfonça pour fortir de la Ville. Tout le refte fut pris & massacré.

Cependant le malheur de Lyde Ly- chintong n'étoit pas encore à fon comble; mais il y touchoit de près, comme on va le voir. A peine futil arrivé dans fon camp, qu'on l'y accabla de reproches. Les dupes

ont toujours tort, & à la guerre plus qu'ailleurs, vû les terribles fuites qu'une imprudence bien marquée entraîne ordinairement avec elle. Un grand nombre de foldats déferta d'abord, ne pouvant plus compter, difoient-ils, fur un Général fi mal avifé; & ce jour-là même on décampa pour prendre la route du Koantong. Au bout de cinq jours de marche on se trouva en fûreté dans un vallon abondant en vivres; où Lychintong jugea à propos de s'arrêter quelque temps. Dans un grand feftin qu'il y voulut donner aux Officiers de fa petite armée , pour fe réconcilier pleinement avec eux, & noyer, ainfi qu'il leur fit entendre, leurs communs chagrins dans les plaifirs de la table; ce Général but beaucoup, & perdit la raison. Le terrein qu'on occupoit étoit bas, & tout à coup il furvint une grande pluie qui fit craindre une inondation. Les domeftiques de Lychintong ayant mis leur maître à cheval, fe hâtèrent de gagner une

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