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ple, fur les feuls paffages que les Sociniens produisent pour montrer que JESUS-CHRIST étoit un pur homme? Ne traiteroient-ils pas de temeraires ceux qui voudroient juger de la foi par un examen fi defectueux ? Comment pouroient-ils donc demander qu'on pratiquât le même à leur égard, puifqu'ils n'ont aucun titre pour le faire preferer aux autres ; & que prefque, toutes les autres focietez ont au contraire quelque avantage vifible fur la leur? Ainfi s'ils ont tant foit peu de bonne foi & d'équité, ils ne peuvent se difpenfer d'avouer avec Zuingle, que pour juger du fens des paffages de l'Ecri ture fur lefquels on prétend fonder fa foi,il faut confiderer tous ceux qu'on allegue pour & contre, afin de former fon fentiment par la comparaifon de tous.

Mais comme Dieu aiant voulu lier les hommes dans une même focieté de Religion, ne les difpenfe point, par l'aveu même des Miniftres, de recevoir l'interpretation de l'Ecriture par le miniftere des hommes, & que l'experience fait voir que toutes les vues ne viennent pas à toutes fortes d'efprits, & qu'on eft obligé d'emprunter des lumie

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res

res les uns des autres ; ce feroit encore une temerité visible, que de vouloir juger du fens de ces paffages fans confulter ce que les Interpretes de l'Ecriture en ont dit. Et parce qu'il feroit injuste de ne confulter que les Interpretes d'un feul parti, il faudroit en confulter dans tous les partis fur chaque point, ce qui feroit un travail qui n'a plus de bornes, & auquel il n'y a prefque point de vie qui puiffe fuffire.

Un Miniftre de Saumur nommé la Place, a fait trois volumes entiers fur quelques paffages qui regardent la divinité & l'éternité de JESUS-CHRIST; il en destinoit un autre pour la divinité du S. Efprit. On ne pouroit fans doute fe difpenfer de les lire, fi l'on vouloit juger de cette importante matiere par la voie des Calviniftes. Mais comme il ne raporte les raifons de ceux qu'il refute, que d'une maniere fort abregée, ils pretendront de leur côté, qu'on doit lire leurs raifons dans leurs livres mêmes. Et ainfi l'examen de ces feuls articles fera capable d'occuper un homme plus d'une année.

Il en faudra faire de même fur toutes les autres matieres. Les paffages de

M.

M. Daillé ne tiendront lieu que de points à examiner, & non de principes de décifion, jufqu'à ce qu'on fe foit éclairci de toutes les fupofitions qui font neceffaires pour les rendre concluans & démonftratifs.

Et comme l'efprit des hommes eft borné, qu'en s'attachant à une matiere ils oublient fouvent les autres, il fe trouvera que non feulement l'aplication à une queftion effacera de l'efprit les principales preuves qui l'avoient déterminé dans le jugement qu'il avoit porté d'un autre; mais que dans une même question, les dernieres raifons qui ont été l'objet de fa meditation effaceront les premieres. Or quand les raifons font oubliées, & qu'il ne refte dans l'efprit qu'une memoire confufe qu'on les a fçues, l'affurance que l'efprit conferve de la verité de fes jugemens ne peut être que temeraire, comme nous l'avons prouvé ailleurs.

Voilà le fecret que les Calvinistes ont trouvé pour inftruire les hommes de la foi. Voilà le chemin qu'ils leur propofent, & auquel ils les veulent engager; c'est-à-dire, un chemin qui eft non feulement interrompu par des obftacles & P 3

des

des barrieres infurmontables, mais qui eft d'une longueur fi peu proportionnée à l'efprit des hommes, qu'il eft évident que ce ne peut être celui que Dieu a choifi pour les inftruire des veritez par lefquelles il les veut conduire au falut. Car fi ceux mêmes qui font profeffion de paffer toute leur vie dans l'étude de la Theologie, doivent juger cet examen au-deffus de leurs forces, que ferace de ceux qui font obligez de donner la plus grande partie de leur tems à d'autres occupations? Que fera-ce des Juges, des Magiftrats, des artifans, des laboureurs, des foldats, des femmes, dès enfans qui ont encore le jugement -foible? Que fera-ce de ceux qui n'entendent même aucune des langues dans lefquelles la Bible fe trouve traduite ? Que fera-ce des aveugles qui ne fauroient lire? Que fera-ce de ceux qui n'ont aucune lumiere, ni aucune ouverture d'efprit? Comment tous ces genslà pouront-ils examiner tous ces points, dont il eft évident neanmoins que la difcuffion eft neceffaire pour fe déterminer raifonnablement? Il faudra donc par neceffité, que les Calviniftes difpenfent tous ces gens-là de ces recher

ches,

ches, dont ils font fi vifiblement incapables.

Mais s'ils le font, ils renonceront à leurs propres principes, puifqu'ils ne pouront plus dire avec la moindre vraifemblance, Que chacun fe doit déterminer par fa propre lumiere dans le choix d'une Religion, ni qu'ils aient trouvé cette lumiere dans l'Ecriture; & qu'ainfi il faut qu'ils admettent quelqu'autre principe pour fe refoudre dans ce choix. Et ce principe ne peut être que l'autorité.

Car tant s'en faut que les defauts d'efprit, de fcience & de lumiere donnent droit d'examiner avec moins de foin ce qui eft neceffaire pour bien juger d'une matiere importante, qu'ils obligent au contraire d'aporter plus de diligence & d'aplication dans l'examen qu'on en fait pour fupléer à ce qui manque du côté de l'intelligence. Ainfi l'impuiflance où se trouvent toutes cès fortes de perfonnes d'observer toutes les conditions neceffaires à cet examen, ne montre pas qu'elles ne leur foient -pas necessaires; mais elle fait voir feulement que cette voie eft impoffible, & que ce n'eft pas celle que Dieu a donP 4

née

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