cœur. Mais comme c'eft une impieté de ne pas croire en Dieu, c'eft auffi une impieté de refufer de le confeffer puifque la loi naturelle oblige à l'un & à l'autre.

Ainfi ceux qui font dans ces fortes de confciences erronées pechent toujours, quoiqu'ils faffent. Un Athée demeurant Athée peche, en confeffant & en ne confeffant point Dieu. Un Mahometan demeurant Mahometan peche, en renonçant, & en ne renonçant pas Mahomet. Un Socinien demeurant Socinien peche, en reconnoiffant exterieurement, & en ne reconnoiffant point exterieurement la divinité de Jefus-Chrift. Un Payen demeurant Payen peche, en rejettant l'adoration des idoles, & en les ado

rant.

Il eft donc inutile aux Calviniftes, pour montrer qu'ils ont droit de rejetter les dogmes de l'Eglife Romaine, & que leur feparation négative eft legitime & permife de dire qu'ils croient qu'elle eft engagée dans des erreurs capitales, & qu'elle n'eft nullement in faillible.

Cette conclufion eft très-fauffe, parce que l'erreur par laquelle ils attribuens

buent ces herefies à l'Eglife Catholi que, & defavoüent fon infaillibilité, ne peut les exempter de crime. Ainfi ils pechent & dans les principes, & dans les fuites de ces faux principes. Ils pechent en n'adorant pas Jefus - Christ dans l'Euchariftie, & ils pecheroient en l'y adorant. Dans l'un ils pechent contre ce que la foi veritable ordonne, dans l'autre ils pecheroient contre leur confcience, mais ils pechent toujours.

Ils pechent de même en rejettant les autres dogmes de l'Eglife, & ils pecheroient en ne les rejettant pas, fi leur confcience eft fauffement perfuadée que ces dogmes font heretiques : & il n'y a qu'un feul moyen pour eux d'éviter le peché, qui eft de rendre leur confcience conforme à la verité, en renonçant fincerement à leurs erreurs. Voilà la doctrine commune de tous les Theologiens Catholiques: & Monfieur Claude ne peut la traiter d'opinion particuliere fans ignorance, ni en attribuer une autre à l'Auteur des Préjugez fans une manifefte calomnie.

Car il avoue lui-même dans la pag. 53. de fon Livres que cet Auteur reconnoît l'infaillibilité de l'Eglife, & il en cite

un

a

un paffage où cet Auteur la fupofe comme une chofe conftante,, & dans le lieu même où l'Auteur des Préjugez diftingue ces deux fortes de feparations, il déclare en termes clairs que l'Eglife Romaine n'oblige à la profeffion d'aucune erreur, ni à pratiquer aucune idolatrie..

Le premier fens dit-il page 88. eft. qu'il faut fe feparer negativement de de toute Societé qui oblige à la profef fion de l'erreur, & à pratiquer l'ido-latrie, en ne prenant point de part à ce qui y bleffe la confcience : & ce sens: eft très-mal apliqué à l'Eglife Catho-lique qui ne fait ni l'un ni l'autre ; mais: il n'eft pas nécessaire de l'examiner ici. Et en la page 97. Il eft faux, ajoute t-il, que l'Eglife Romaine foit dans: l'erreur. Il eft faux qu'elle y engage les autres. Il eft faux qu'elle pratiques C 6

Monfieur Claude dans la page 53. de fon Livres raporte un paffage de la Préface du Livre des Préju gez, ou l'Auteur de ce Livre dit: On ne prétend pass prouver dire&ement l'autorité & l'infaillibilité de PEglife Catholique, car quoiqu'il foit très-utile de le faire, & que ceux d'entre les Catholiques qui l'ont fait, ayent fuivi en cela une voye très-jufte & trèslegitime; néanmoins comme les préoccupations a dont les Calviniftes font remplis, en éloignent plu fieurs d'entrer dans ces principes, quelques folides & quelques veritables qu'ils foiens, la charité oblige: de tenter auffi d'autres voies,

&qu'elle faffe pratiquer des cultes idos latres. Il eft faux que l'on puisse refufer de communiquer avec elle.

Ainfi comme non feulement les principes, mais les propres paroles de cet Auteur portent à conclure qu'on ne peut fans crime fe feparer de l'Eglife Romaine, quand ce ne feroit que de cette féparation, qui confifte à ne prendre point de part à fes dogmes, & à fon culte: Monfieur Claude n'a pu fans malignité lui attribuer un autre fentiment, ni conclure qu'il reconnoît pour legitime le refus que les Calviniftes font de faire profeffion de la doctrine de l'Eglife Romaine.

Dira-t-il pour fe défendre de cette accufation de mauvaise foi, qu'il attribue fimplement à l'Auteur des Préjugez d'avoir cru que les Calvinistes étant perfuadez par erreur, que l'Eglife Romaine étoit engagée dans des herefies capitales, leur confcience les obligeoit à refufer de faire profeffion de fa doctrine; puifque la conscience erronée impofe cette neceffité, quoique felon ce même Auteur, ils ne laiffaffent pas de commettre un crime, en fuivant cette fauffe confcience.

C'est ce qu'il auroit dû dire, s'il

avoit voulu être fincere;mais s'il n'avoit voulu dire que cela, pourquoi feroitil un myftere de cette doctrine, puifqu'il n'y a rien de plus commun? pourquoi l'imputeroit-il à l'Auteur des Préjugez, comme une doctrine particuliere, puifqu'il n'y a point de Theologien Catholique qui ne l'enfeigne ? pourquoi concluroit-il expreffément, & abfolument, que felon l'Auteur des Préjugez les Calviniftes ont pu légitimement fe feparer de l'Eglife Romaine, en ne prenant point de part à ce qui y bleffoit leur confcience? Dit-on que les Payens ont pu légitimement & felon leur confcience adorer les idoles ; que les Mahometans honorent legitimement Mahomet; que les Fanatiques tuent legitimement les gens, quand ils le font en fuivant leurs fauffes vifions; & que les Donatiftes fe jettoient legitimement dans les précipices & dans les flames, parce qu'ils s'étoient perfuadez qu'ils étoient obligez de perir en cette maniere plutôt que de fe réunir à l'Eglife Catholique.

Mais il eft vifible que M. Claude ne fe peut excufer par-là. Car il a prévu qu'on pouroit donner ce fens aux paroles de l'Auteur des Préjugez, & il s'eft infcrit en faux contre ceux qui le

don