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livre des Prejugez, on n'y a pu prevoir ce qu'il y dit, pour juftifier Luther du reproche qui lui avoit été fait de s'être rendu difciple du Diable fur le fujet des Meffes privées, parce que fes réponses font fi furprenantes, qu'il n'étoit pasfa cile de les deviner. Afin néanmoins de ne rien omettre de ce qui regarde ce Dialogue de Luther avec le Diable, on a cru qu'on les devoit raporter ici, pour en examiner la folidité,& que l'on étoit d'autant plus en droit de le faire, que ce Miniftre foutenant hardiment qu'il faut être bien medifant & bien calomniateur, pour en prendre pretexte de dire, que Luther a pris le Démon pour Maître de la verité, & qu'il s'eft rendu fon difciple: Nous ne pourrions pas defavouer, fi ces reproches étoient juftes, qu'ils ne tombaffent autant fur nous que fur l'Auteur des Prejugez, & qu'ainfi nous avons autant de fujet que lui de nous en juftifier.

La voie que M. Claude prend pour défendre Luther, n'eft pas de prétendre que cette Conference de lui avec le Diable ne fe trouve point dans fes Oeuvres; ce n'eft pas auffi de dire qu'elle y ait été ajoutée, ni que cet Ecrit lui foit fauffe

a M. Claude dans fon livre de la Défense de la Réfuta Mation , pag. 138.

fauffement imputé. Il demeure d'accord que Luther en eft Auteur, & nous n'avons aucune question avec lui fur ce fujet.

Il prend donc une autre voie pour mettre Luther à couvert, & il la croit fi plaufible, qu'il ne craint pas de traiter nettement ce reproche de calomnie, & d'accufer fans façon l'Auteur des Prejugez d'être bien calomniateur & bien médifant.

Elle confifte en deux moïens qu'il propofe conjointement, afin que fi l'un lui manque,il puifle avoir recours à l'autre. 3. Lepremier eft de dire, que ce recita n'eft qu'une figure de Rhetorique ou une parabole, c'eft à dire, que Luther ne raporte pas cette Conference avec le Diable comme veritable.

Le fecond eft, que foit que l'on prenne cette narration au pied de la lettre. fait qu'on la prenne pour une espece de figure & de parabole, il n'y a rien en tout cela qui s'éloigne du devoir d'un homme de bien, ni qui ne soit entierement innocent. Ce font les propres termes de M. Claude.

Il s'explique auffi nettement fur le premier moïen, & c'eft l'idée qu'il de

fire

a M. Claude dans fon livre de la Défense dè la Réformation, p. 136 & 137.

M. Claude page $37,

fire imprimer dans l'efprit de fes Lec

teurs.

Pour refuter a cette calomnie, dit-il.il ne faut que reprefenter en peu de mots le fait dont il s'agit. Luther, fuivant le stile des Moines de ce tems-là, qui avoient accoutumé par figure de Rhetorique de remplir les livres de leurs exploits contre le Diable raporte que s'étant une fais reveillé pendant les tenebres de la nuit, le Diable se prit à l'accufer d'avoir fait idolatrer le peuple de Dieu, & d'avoir idolatré lui-même durant quin ze ans qu'il avoit dit des Meßses privées c. Et un peu après : J'avoue bajoute M. Claude, que cette maniere d'expri mer les chofes fous la forme d'un combat contre le Diable, me paroit à la verité un peu éloignée de l'ufage commun, me remet dans la pensée ce que Luther lui-même a dit: PIUM lectorem ore, ut ista legat cum judicio » & feiat me fuiße aliquando Monachum. En effet on ne fe défait pas comme on veut, du caractere du Convent.us 10, en

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. Ilajufte toujours dans la fuite le recir de Luther à ce fens de parabole & de figure, il dit par exemple, que quand Luther raportes que le Diable l'accu fost dans

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dans fon cœur ; cela fignifie, qu'il fe reprefentoit lui-même dans fa con fcience les accufations que le Demon pouroit un jour former contre lui devanɛ le Tribunal de Dien; quel crime Ja t'il en cela?

Il n'y en a point qui foient plus obli gez d'être fideles jufques dans les moindres chofes, que ceux qui accufent les autres de calomnie. Mais c'eft ce que M. Claude n'a gueres foin d'obfever. Car il n'eft point vrai que Luther ait dit, raportant la Conference qu'il avoit eue avec le Diable, que le Diable l'acenfoit dans fon cœur. Voici les propres termes qui font de l'Edition de Wirtemberg: Satana mecum capit ejufmodi difputationem; ou comme Hofpinien les a traduits de l'Allemand. Satan bhujufmodi difputationem in animo meo meeum inftituit. Ily a bien de la difference entre difputer, ou s'entretenir avec une perfonne, & l'accufer. Mais M. Claude a pris ce mot d'accufation à deffein pour celui de dispute, afin de pouvoir mieux ajufter cette accufation du Demon contre Luther avec la qualité d'accufateur que l'Ecriture lui attribuë, & pouvoir ainfi

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a Luther tom. 7. de l'Edition de Vvirtemberg feuillet 228.

Hofpinien dans la feconde partie de fon Hiftoirg Sacramentaire, feüillet 131.

ainfi plus facilement faire paffer cet en tretien, dont Luther nous fait un fi long recit, pour un fimple remors de conf cience. Mais enfin tout cela tend à nous perfuader, que Luther n'a pas cru, & n'a pas voulu faire croire, qu'il ait eu cette Conference avec le Diable, mais qu'il l'a propofée feulement comme une efpece de figure ordinaire aux Moines. Mais il ne prend pas garde, qu'en pretendant juftifier Luther par ce moïen, il donne lieu de former & d'examiner quelques questions affez embaraffantes pour lui.

La premiere, fi une perfonne fenfée peut croire, que ce recit de Luther foit une figure de Rhetorique.

La feconde, fi cette figure eft ordi

naire aux Moines.

La troifiéme, fi M. Claude a cru en effet, que ce fût une figure de Rhetorique, & s'il agit de bonne foi, pour le faire croire aux autres.

La premiere question eft bien aifée à decider, puifqu'il n'y a qu'à confulrer la narration de Luther telle qu'elle est dans fes Oeuvres, & qu'elle eft raportée dans ce traité. Car on ne croit pas qu'il vienne dans, l'efprit d'aucun de ceux qui l'auront luë, que ce ne foit qu'une parabole: & s'il s'en trouvoit

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