de nos villes de Province, à fe livrer å ce genre d'obfervations qui peuvent jetter plus de jour qu'on ne le croit communément fur la nature des maladies de quelque claffe qu'elles foient. En effet, qui fait fi des expériences multipliées & bien faites fur les Arts qui préfervent leurs Ouvriers des maladies contagieufes, ou qui les y expofent, ne pourroient pas conduire à la découverte de la contagion & des moyens propres à s'en garantir. Ce foupçon, nous l'avouons> manque de preuves; mais dans une obfcurité pareille, n'eft il pas permis, n'eftil pas louable même de chercher partout à s'éclairer, & la plus foible lueur que l'œil du philofophe peut appercevoir, ne doit elle pas lui fervir de guide jufqu'à ce que le flambeau de la vérité vienne diffiper entiérement les ténebres qui la déroboient à fes yeux ?

lix

PRÉFACE

I

DE L'AUTEUR.

L y a, dans la fociété, des hommes affez mal - intentionnés pour accufer la Nature, cette mere bienfaifante de tous les êtres, de n'avoir pas veillé fur l'efpece humaine avec affez de prudence & de circonspection; & de n'avoir pas prévu tous les dangers auxquels l'homme eft expofé par les circonftances de fa vie. Ce reproche fe trouve dans des Livres, & eft fouvent répété dans la converfation. Cependant la plus injufte querelle qu'on lui fufcite à ce fujet, & qui lui fait donner fi mal-àpropos le titre de marâtre, c'est d'avoir forcé l'homme à pourvoir суј

chaque jour à l'entretien & à la confervation de fa vie, qui, fans ce secours, feroit bientôt détruite. En effet le genre humain, délivré de cette néceffité, ne connoîtroit aucune loi, & ce Monde que nous habitons changeroit bientôt de face. Auffi Perfe n'a-t-il pas regardé la main comme la plus induftrieuse des parties du corps, & a-t-il fi ingénieufement appellé l'eftomac le maître des Arts ( a ).

Ne feroit-il donc pas permis d'affurer que cette néceffité, qui donne aux animaux, même les moins raisonnables, un inftinct prefque ingénieux, a fait naître tous les Arts, foit méchaniques, foit libéraux, qui malheureufement font altérés par quelques maux, ainfi que tous les biens dont l'homme jouit ? En effet, ne fommes nous pas forcés de convenir

(a) Magifter artis, ingeniique largitor

Venter.

que plufieurs Arts font une fource de maux pour ceux qui les exercent, & que les malheureux Artifans trouvant les maladies les plus graves où ils efpéroient puifer le fourien de leur vie & de celle de leur famille, meurent en déteftant leur ingrate profeffion? Ayant eu, dans ma Pratique, de fréquentes occafions d'obferver ce malheur, je me fuis appliqué, autant qu'il a été en moi, à écrire fur les maladies des Artifans. Mais comme dans les Ouvrages de ces derniers, fi un d'entr'eux a trouvé quelque chofe de nouveau cette découverte eft d'abord très - imparfaite, & demande à être perfectionnée par le travail de fes Confreres, un Ouvrage de Littérature eft abfolument dans le même cas. Mon Trai té doit donc fubir le même fort pour plufieurs raisons, mais principalement parce qu'il contient quelque chofe de neuf. Le champ

que je défriche n'a été parcouru par perfonne que je fache, & il promet une moiffon intéreffante d'obfervations fur la fubtilité & l'énergie des effluves de différentes substances. Cet Ouvrage, tout imparfait qu'il eft, fervira, j'efpere d'aiguillon aux autres Médecins ; & leur fecours contribuera à en faire un Traité complet fur cette matiere qui méritera une place dans les faftes de la Médecine. La condition malheureufe de ces Artifans refpectables, dont les travaux, quoique vils & méprifables en apparence, font fi néceffaires & fi avantageux pour le bien de la République, n'exige t-elle pas ce fervice; & n'eft-ce pas une dette qu'a contractée envers eux cet Art, le premier de tous, qui, comme l'a dit Hippocrate dans fes préceptes, donne ses secours fans intérêt, & s'occupe auffi bien des pauvres que des riches?