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intérêts de la justice. Le gouvernement use, sous sa responsabilité, de ce droit, auquel est attachée la sanction commune à toute intervention de même nature.

Le pays tiers, ou pays d'origine, n'aura presque jamais affaire à l'État qui réclame l'extradition. Il ne peut être question, en effet, de contester à ce dernier le droit de former cette demande. Si quelques motifs s'opposent à ce que la requête soit accueillie, c'est le pays de refuge, maître de la suite à y donner, qu'il convient d'en saisir. On peut concevoir pourtant des hypothèses exceptionnelles où une demande d'extradition mettrait en rapport l'État requérant et le pays tiers. Tel serait, par exemple, le cas où l'État requérant aurait obtenu la remise de l'inculpé, en dissimulant la nationalité de ce dernier au pays de refuge. L'extradition se trouvant accomplie, et la responsabilité du pays requis étant dégagée par suite de l'erreur où il a été maintenu, le pays tiers n'aurait de recours à exercer que contre l'État requérant; il serait fondé à lui demander compte de son infraction à la bonne foi qui doit présider aux relations des États entre eux, à protester contre l'extradition, et à réclamer l'annulation de la procédure.

A part des cas tout exceptionnels, aucun échange de communications n'aura lieu avec l'État requérant. Le plus souvent, le pays tiers sera informé de la requête d'extradition par le pays de refuge, qui lui demandera, s'il n'a pas de motif particulier pour s'opposer à la remise de son national à la justice étrangère. Pour répondre en parfaite connaissance de cause, le gouvernement consulté est fondé à réclamer des informations qui ne lui laissent aucun doute sur la nature du crime et sur l'identité du prévenu. Toutefois, il ne doit pas oublier qu'il n'est pas juge du fond même de la question; il est tenu de se renfermer dans l'examen des circonstances qui peuvent engager son devoir de protection; il doit tenir compte des garanties dont la procédure d'extradition a été entourée par les conventions conclues entre les deux autres États, et ne pas entraver, sans de justes causes, le fonctionnement de ces traités et l'action de la justice.

Il serait impossible d'énumérer les objections fondées que le pays tiers peut être amené à formuler contre la demande d'extradition. Elles peuvent résulter de causes diverses, variables à l'infini et tenant à la qualité du prévenu, à la nature du crime, à des circonstances politiques, etc.

Indiquons cependant trois objections d'un caractère général, et

qu'on pourrait, au premier examen, croire opposables par le pays tiers à toute demande d'extradition formée à l'étranger contre un de ses nationaux :

1o Le pays tiers pourrait soutenir qu'il doit le même traitement au national réfugié sur le territoire étranger, et au national réfugié sur le sol même de la patrie. Or, d'après une règle généralement admise, le national revenu dans sa patrie n'est pas passible d'extradition. Donc, le pays tiers ne peut donner son assentiment à ce qu'un de ses nationaux, réfugié à l'étranger, soit soumis à l'extradition. La première proposition de ce raisonnement n'est point exacte. Il n'est pas logique de mettre sur la même ligne le national qui, après avoir commis un crime à l'étranger, est revenu dans sa patrie, et celui qui, dans les mêmes circonstances, s'est réfugié sur un autre territoire étranger. Pour le premier, son gouvernement est, jusqu'à un certain point, fondé à refuser son extradition, en raison de la protection qu'il lui doit, et de la souveraineté qu'il exerce sur le territoire encore ce droit est-il contestable, comme on l'a vu ! Quant au second, les mêmes raisons ne peuvent pas être invoquées à son égard: la protection, qui lui est due par son gouvernement, est limitée dans son action par la souveraineté du pays de refuge, maître de l'accusé et seul juge de la suite à donner à l'extradition. L'objection tirée de la seule nationalité de l'inculpé ne constitue donc pas, à moins de circonstances particulières, un motif suffisant pour que le pays de refuge repousse la requête.

2o Le pays tiers pourrait encore s'opposer à la demande du gouvernement requérant, en réclamant lui-même l'extradition de son national, et en offrant de le juger pour les infractions commises à l'étranger. Pour que cette objection puisse être formulée, il faut que la loi pénale du pays tiers punisse les infractions commises à l'étranger par un national: mais une disposition de cette nature ne figure pas dans les législations de tous les Etats. Quoi qu'il en soit d'ailleurs, l'objection n'est pas sans réplique. En effet, la loi pénale est surtout territoriale, et la compétence du juge du lieu du délit passe avant toute autre. S'il a été admis, par certaines nations, que la loi pénale est applicable au national qui s'est rendu coupable d'un crime à l'étranger, cette disposition n'a été introduite que pour faire obstacle à l'impunité qui aurait été acquise au régnicole, une fois rentré dans son pays; mais elle ne porte pas atteinte à la compétence du juge du lieu de l'infraction, compé

tence qui domine en matière criminelle. Le pays de refuge, amené à se prononcer entre ces deux compétences, devra donc faire pré. valoir celle qui provient de la nature même des choses, qui assure la répression et satisfait le mieux aux intérêts de la justice, c'està-dire, la compétence territoriale.

Le pays tiers a, d'ailleurs, intérêt à ne pas maintenir une pareille objection, qui pourrait ensuite, par réciprocité, lui être opposée dans des circonstances analogues par un autre Etat; si les lois de cet Etat n'autorisaient pas la poursuite du national inculpé d'un crime commis à l'étranger, il en résulterait, dans ce cas, que l'impunité se trouverait acquise au coupable.

3o Le gouvernement tiers pourrait s'opposer à ce que son national fût livré au pays requérant, si, après avoir examiné les pièces produites à l'appui de la demande, il ne les trouvait pas suffisantes pour motiver l'extradition d'un régnicole du pays requérant, réfugié sur le territoire même du gouvernement tiers. En d'autres termes, le gouvernement tiers, dirigé par cette pensée que ses nationaux à l'étranger ne doivent pas être moins protégés contre les réclamations du pays requérant que ne le sont les sujets mêmes de ce dernier pays, lorsqu'ils sont réfugiés dans le pays tiers, pourrait appliquer à l'espèce les principes qui régissent ses relations avec le pays requérant, en matière d'extradition. Un pareil raisonne ment se comprend de la part du gouvernement tiers; mais on conçoit aussi qu'il ne soit pas accepté par le pays de refuge. Il ne faut pas oublier, en effet, que la question s'élève entre le pays requérant et le pays de refuge, et doit être résolue d'après les règles adoptées par ces deux Etats, et consacrées par le traité d'extradition qu'ils ont conclu. Le pays de refuge peut donc ne pas s'arrêter au refus de la Puissance tierce, si ce refus est uniquement basé sur l'inobservation d'une convention qui n'est point en jeu, qui, pour le pays de refuge, est res inter alios acta.

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Pour terminer l'étude de cette troisième objection, nous rappellerons une affaire d'extradition, dont les diverses phases sont venues à la connaissance du public. En 1858, le gouvernement français demanda au gouvernement sarde l'extradition du sieur H., sujet anglais, inculpé de complicité dans l'attentat dirigé, le 14 janvier de cette année, contre la vie de l'empereur. Le gouvernement sarde s'empressa d'ordonner l'arrestation provisoire du prévenu; mais, avant d'autoriser son extradition, il s'adressa au gouvernement anglais pour savoir si ce dernier y donnait son as

sentiment. En agissant ainsi, les autorités sardes se conformaient à l'article 1er d'une déclaration échangée, le 29 novembre 1838, entre la France et la Sardaigne; cette déclaration stipule que l'extradition d'un sujet d'un pays tiers « pourra être accordée, toutes « les fois que le gouvernement du pays auquel il appartient y « aura donné son assentiment. >> Après examen de la demande d'extradition, le gouvernement anglais refusa son consentement, et le sieur H... ne fut pas livré à la justice française.

Cette affaire avait préoccupé l'attention publique en Angleterre, au point qu'elle fut l'objet d'une interpellation à la Chambre des communes. Voici en quels termes le Sun rend compte de cet incident, qui occupa une partie de la séance du 16 mars 1858: « M. Horsman interpelle le chancelier de l'échiquier (M. Disraeli) « relativement à l'arrestation de M. H... en Sardaigne, et demande a si le gouvernement de Sa Majesté a des motifs qui l'empêchent ⚫ de faire connaître les circonstances relatives à cette arrestation • Ensuite il demande de quelle nature est la correspondance ‹échangée à ce sujet, entre le gouvernement sarde et le gouvernement anglais.

« Le chancelier de l'échiquier répond qu'il existe entre les gou« nements de France et de Sardaigne un traité d'extradition en « vertu duquel M. H... a été arrêté, sur quelques rapports qui se « rattachent au dernier attentat commis sur la personne de l'empereur des Français. On a demandé qu'il fût livré au gouverne«ment français; mais il paraît que, d'après ce traité, la Sardaigne « n'a pu satisfaire à cette demande sans obtenir, au préalable, l'adhésion du gouvernement anglais.

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«En cet état de choses, il a été fait au gouvernement de Sa

Majesté une demande tendante à ce que M. H......... fût livré à la

« France par le gouvernement sarde. Le gouvernement de Sa Majesté demanda, en conséquence, que les papiers saisis sur la « personne de M. H....., et sur lesquels se fondait la demande, « fussent envoyés en Angleterre. C'est ce qui eut lieu.

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« Le gouvernement de Sa Majesté, après avoir examiné les papiers, et trouvant qu'ils ne suffisaient point pour autoriser « l'arrestation légale de M. H..... en Angleterre, a refusé d'ac«cueillir la demande du gouvernement français... »

Le refus de l'Angleterre était donc fondé sur ce que les preuves, relevées à la charge de l'inculpé, n'auraient pas été suffisantes pour motiver son arrestation en Angleterre, si le crime y avait

été commis. C'est l'application du système consacré dans l'article 1er de la convention d'extradition conclue entre la France et la Grande-Bretagne, le 13 février 1843: « Il est convenu que les « hautes parties contractantes... seront tenues de livrer en justice « les individus qui, accusés de crime..., chercheront un asile ou << seront rencontrés dans les territoires de l'autre, pourvu que << cela n'ait lieu que dans les cas où l'existence du crime sera << constatée de telle manière que les lois du pays où le fugitif ou « l'individu ainsi accusé sera rencontré justifieraient sa déten❝tion et sa mise en jugement si le crime y avait été commis. - Tel est bien le principe que l'Angleterre a cru devoir étendre au cas où il s'agissait de l'extradition d'un sujet anglais réclamée par la France de la Sardaigne.

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<< Cela se pouvait-il? » se demande le Journal des Débats (numéro du 29 mars 1857). « La règle établie par la convention de « 1843, qui fixe les conditions de l'extradition réciproque des « malfaiteurs entre la France et l'Angleterre, était-elle applicable « à un cas spécifié dans la convention et dans la déclaration de 1838, relativement à l'extradition des malfaiteurs entre la « France et la Sardaigne? Les jurisconsultes anglais l'ont pensé « et l'ont déclaré, se fondant sur ce que le droit de demander au » gouvernement anglais l'extradition des malfaiteurs n'a été attri« bué à la France que par la convention de 1843. Si cette con« vention n'existait pas, a-t-on dit à Londres, le gouvernement français ne pourrait pas demander l'extradition d'un Français réfugié en Angleterre, qui se serait rendu coupable d'un crime « commis en France. Toute demande d'extradition adressée au << gouvernement britannique par le gouvernement français, dans « de pareils cas, doit être soumise en Angleterre à de certaines « vérifications. Il est juste que les sujets anglais, aussi bien à « l'étranger qu'en Angleterre, soient protégés contre les réclama«tions du gouvernement français, comme le sont les Français << eux-mêmes. Le gouvernement britannique ne doit pas consentir, ne peut pas consentir à l'extradition de M. H..... par le « gouvernement sarde, si le gouvernement français ne justifie pas « sa demande, comme il serait tenu de la justifier s'il s'agissait <«< d'un Français réfugié en Angleterre.

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« On pourrait répondre cependant qu'il ne s'agissait pas d'une << demande faite par la France directement à l'Angleterre; ce " n'est point à l'Angleterre, c'est à la Sardaigne que la France

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