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XXI. LETTRE.

Méchanifme felon lequel l'imagination des femmes enceintes peut occafionner des difformités & des maladies dans le corps de l'enfant. La reffemblance. de quelques taches avec un objet apperçu ne peut être que l'effet du hafard. JE vais, puifque vous me l'ordonnez, Madame, apprécier le pouvoir de l'imagination des meres: vous verrez qu'il ne contredit en rien ce que jufqu'ici j'ai eu l'honneur de vous écrire.

Les objets affectent notre ame & en conféquence notre ame agit fur notre corps: nous en ignorons les moyens ; mais il n'en eft

pas

moins vrai que nos paffions font fur nous des impreffions très-vives. Notre fang en est agité, il circule rapidement, il gonfle nos vaiffeaux, & nous fentons l'effort de fon impulfion dans toutes les parties de notre corps. Cette vive impulfion du fang eft quelquefois fupérieure à la résistance que lui oppofent les vaiffeaux destinés à le contenir; & une trifte expérience nous a montré plus d'une fois qu'il en eft furvenu des crachemens de fang, ou une apoplexie, felon que les vaiffeaux qui n'ont pu résister à cet effort étoient placés ou dans la poitrine ou dans la tête. Il y a des paffions dans lesquelles la circulation de no tre fang eft fufpendue; nous l'éprouvons dans quelques inftans de furprife & de terreur: c'eft qu'alors notre coeur fouffre une convulfion, il

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fe refferre plus rapidement & plus long-tems que dans l'état naturel ; le fang en est chaffé avec plus de viteffe vers les parties 'extérieures, & il ne peut y revenir avec liberté, parce que ce refferrement convul fif s'oppose à la dilatation des cavités du coeur dans lesquelles les veines doivent le verfer: une joie exceffive & inopinée peut produire le même effet, le cours du fang peut même en être totalement arrêté ; on peut en mourir.

Dans ces deux extrémités où nous jettent les paffions, je veux dire, dans l'extreme vîteffe de la circulation du fang, ou dans la fufpenfion de fon cours; l'effort du fang agit généralement fur tous les vaiffeaux, & fur chacune de leurs parties: fi quelqu'une cede à cet ef fort, ce n'eft pas qu'il ait agi plus

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violemment contre elle, mais parce qu'elle a été trop foible; ce n'eft pas le mouvement général du fang qui a déterminé le lieu du déchirement, ou de la dilatation du vaiffeau, mais c'est la disposition du vaiffeau qui a déterminé l'effet.

Le fang de la mere paffe à l'enfant, & il revient de l'enfant à la mere. Si fon cours eft précipité, ou s'il eft fufpendu dans le corps de la mere, l'enfant doit participer à ces différens états, & par une fuite néceffaire le fang de l'enfant doit faire un plus grand effort fur tous les vaiffeaux de fon corps, & fur ceux qui forment le cordon par l'extrémité duquel il eft appliqué au sein de la mere. Les effets en font quelquefois funeftes, l'enfant périt, ou unė hémorrhagie cause l'avortement. Les effets de cet effort général

du fang, fi confidérables en certaines occafions fe bornent dans d'autres à la dilatation de quelques vaiffeaux de la peau, ou de quelques glandes miliaires; & il en résulte des grofeilles, des fraises, des meures, ou des taches de vin; mais toujours dépendamment de la difpofition où ces vaiffeaux extérieurs fe font trouvés. Cette difpofition, comme j'ai eu l'honneur de vous le dire, Madame, peut feule déterminer les effets particuliers de cet effort général; elle feule détermine donc le lieu & la figure de la tache: l'imagination n'y a d'autre part que d'avoir excité, ou fufpendu le mouvement général du fang.

Un fait confidérable cité bien fouvent en faveur du pouvoir de l'imagination, prouve clairement ce que j'avance. On affure qu'un en

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