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cours, fut du même pas au Fort des Tours vermeilles, où ayant demandé Ofmin Gouverneur de cette Fortereffe: Genereux Ofmin, lui dit le Prince, on vient de vous amener un prifonnier qui m'eft cher, j'efpere que vous ne me refuferez pas la priere que je vous fais de me le lailler voir.

Le Prince de Grenade, lui répondit Ofmin, fçait bien que mes ordres ne s'étendent pas jufqu'à lui, & que je me ferai toûjours. honneur de lui obéïr. Alors il le fit conduire dans la chambre où l'on avoit mis Dom Alvare, où les ayant laiffé feuls, Zéluma fe jettant à fon col, & le voyant cou vert de fang: Ah! mon frere, lui dit-il, que vois-je,& qu'avez-vous fait ? Ce que l'honneur & mon amour m'obligeoient de faire, luk répondit Dom Alvare. Alors il lui raconta tout ce qui s'étoit paf

fé entre Abenamard & lui; & enfin, continua-t'il, s'il faut que je meure, j'aurai du moins la confolation d'avoir délivré Félime d'un hymen odieux. Hé! ne fçavezvous pas, lui dit Zéluma, l'état où vous avez mis cette Félime, elle vous croit prêt à perdre la vie, & il femble qu'elle veuille que fa mort prévienne la vôtre : deviezyous, mon cher Joraé, fonger à fatisfaire votre jaloufie, en expofant des jours où les nôtres font fi fortement attachés? Mais,répondit Dom Alvare, devois-je souffrir l'arrogance d'Abenamarda Votre crime, lui répliqua Zéluma, n'eft pas de l'avoir tué, c'est d'avoir fait ce funefte combat dans le Palais de l'Alembre;mais enfin fongeons à vous fauver, je ne viendrai plus vous voir que pour vous tirer d'ici. De trop frequentes vifites pourroient nuire à

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mes deffeins, j'enverrai tous les foirs un esclave vous apporter de nos nouvelles & fçavoir des vôtres. Je vais trouver le Roi,je fçaurai quels font fes fentimens fur cette avanture; je ne doute point de fa fureur, mais comptez fur mes foins,mon cherDom Alvare, & foyez affuré que je perirai ou que vous fortirez bien-tôt d'i

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Ce n'eft point ma prison,ni ma mort qui m'inquiéte, lui répondit Joraé. Toutes mes craintes ne fe renferment qu'à la douleur de joindre au peril que je cours, des perfonnes pour lefquelles je voudrois perir mille fois. Sur tout, mon cher Zéluma,s'il eft vrai que ma Princeffe prenne quelqu'interêt à ma vie, employez vos foins pour la ratfurers faites aussi sçavoir mon fort à la genereuse Almoradine, je lui dois trop pour la

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laiffer dans l'inquiétude. A ces mots ils s'embrafferent; & Zéluma ayant pris congé de lui, retourna au Palais de l'Alembre.

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Cependant Almoradine voyant point revenir Dom Alva. re, fe fit mener chez la Reine, & y arriva dans le tems que Zéluma y entroit. Il y avoit tant de monde chez Almahide pour compli

menter Félime fur la mort du Prince de Fez, que celui de Grenade ne put expliquer à Almoradine l'accident de Joraé, que très imparfaitement; mais elle en fçut affez pour en être alarmée.

La Reine ayant fait entendre. qu'on lui feroit plaifir de fe retirer, cette nombreufe Cour la laiffa bien-tôt en liberté. Alors, s'adreffant à Zéluma : Hé bien, lui dit elle, qu'a-t'on fait de Joraé?

LePrince lui raconta tout ce qu'il venoit d'apprendre de fa bouche; mais, Madame, continua-t'il, il faut travailler à le fauver, je me charge de parler au Prince Almenfor, qui fans doute lui fera le plus contraire, & j'efpere que yous voudrez bien adoucir le Roi; peut-être ne voudra-t'il pas faire mourir un Espagnol dans la conjoncture préfente; & enfin fi nous ne pouvons réüffir, nous chercherons les moyens de le mettre nous-mêmes en liberté. Les Princeffes approuverent la pensée de Zéluma, & la Reine y confentit.

Pour ne point perdre de tems Zéluma fut chercher le Prince fon pere:on lui dit qu'il étoit chez le Roi; il s'y rendit, où il le trouva effectivement qui animoit Boadilly à vanger la mort d'Abenamard. Abdelec y étoit auffi, qui

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