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tention fur moi, pour empêcher qu'aucune étincelle du feu qui me dévoroit, ne découvrît mon secret ; cependant, quoique Almoradine ne crût point que je l'aimasse, elle ne douta point que mon cœur ne fût affujetti aux attraits de quelqu'une des Dames de la Cour. Elle m'examina avec foin; mais ne me voyant nul atta chement particulier, elle penfa quelque tems que la feule ambition me caufoit les mouvemens qu'elle avoit attribué à l'amour. Elle feroit encore dans cette erfi au mariage de la Reine, il y a trois ans, je n'euffe été obligé de lui faire connoître mes veritables fentimens.

reur,

Le Prince Zéluma & moi, fûmes choifis du Roi pour être les Tenans des Tournois qui fe firent pendant quatre jours à cette occafion; la Reine donnoit le pre

mier prix, & la Princeffe Almoradinele fecond, l'incomparable Félime étant trop jeune pour être de ces fortes de Fêtes. Le Prince Zéluma eut l'honneur des deux premiers, & j'eus le bonheur de remporter le prix des deux autres; mais malgré notre victoire, & les louanges que Zéluma vouloit bien que je partageafle avec lui, il avoit une fi profonde mé lancolie, & la mienne la fecondoit fi bien, que l'on nous auroit pris plûtôt pour des vaincus, que pour des vainqueurs. J'ignorois la caufe de la douleur du Prince, il n'étoit pas inftruit de la mienne; cette conformité nous rendit inféparables dans toutes les affemblées qui fe firent chez la Reine. J'étois toûjours à fes côtés, & il n'abandonnoit point les miens..

Un de ces jours entr'autres que nous étions le Prince Zéluma &

moi derriere Almoradine, cette Princeffe nous furprenant dans 'une égale rêverie En verité, nous dit-elle, en baiffant la voix, la trifteffe extrême que vous faites voir l'un & l'autre dans des jours de réjouiffances, & où vous avez acquistant de gloire, me fe. roit croire que vous êtes amoureux de la Reine, & que vous vous affligez de la voir paffer dans les bras d'un autre, fi je n'avois oüi dire que deux rivaux ne peuvent être auffi parfaitement unis que vous le paroiffez.

Quoique la Reine foit extrêmement belle, lui répondit Zéluma, & que je veuille bien vous avoüer que l'amour caufe ma trifteffe ; je vous protefte, charmante Almoradine, que malgré toutes les beautés qui éblouiffent mes yeux ici, j'en regrete une qui n'y eft point, & qui fans doute n'y fera jamais.

Pour moi, Madame, dis-je alors, je confeffe comme le Prince, que la paffion la plus vive & le peu d'efperance qui la fuit, fait aujourd'hui ma mélancolie; mais quoique je fois le plus témeraire de tous les hommes, d'avoir té mes vœux jufqu'à celle que j'a-. dore, je jure à la divine Almoradine, que mon crime ne regarde point la Reine.

por

Cela m'affure bien, nous répondit-elle, que vous n'aimez pas Almahide, mais cela ne me prouve point que vous n'êtes pas rivaux. Le Prince, lui repliquai-je auffi-tôt, a déclaré que celle qu'il aime ne peut être ici, & je ne vous ai point dit, Madame, que celle que j'adore n'y étoit pas. Je prononçai ces mots avec une action fi animée, que non feulement la Princeffe vit à l'inftant tout ce qu'elle n'avoit point remarqué,

&

mais Zéluma découvrit auffi ce qui fe paffoit dans mon cœur. Il en fourit, la Princeffe en rougit, par fon filence, nous contraignit de ne pas pouffer plus loin une converfation qui commençoit à l'embaraffer.

Enfin, Seigneur, depuis ce jour je cherchai avec tant de foin l'occafion de m'expliquer plus clairement, que je la trouvai. J'en profitai, je fis un recit fi vif à cette Princeffe de la force de mon amour, du long-tems que je l'avois caché, & de la douleur que je reffentois d'être fi peu digne d'elle; & je l'affurai fi bien, que je réüniffois tous mes defirs à la feule faveur du pardon de ma témerité, que cette feule Princeffe eut pitié de mon fort; en effet, elle me répondit avec une douceur fi fage & fi retenue, que, fans me témoigner ni mépris ni colere,

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