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dre conte à la Reine & aux Princeffes, du fuccès de la lettre de' Félime, qui en reçut la réponse avec plaifir, mais elle s'oppofa fortement au deffein qu'il avoit de la voir; Almahide fut de fon fentiment & remontra le danger où ils s'expoferoient par cette enrevûë. Mais Zéluma qui ne vouloit pas que fon ami partît fans cette confolation, leur fit entendre qu'il n'y avoit rien de plus aifé & de moins dangereux ; que la Reine pouvoit témoigner ne vouloir pas être témoin de la mort d'un homme qui étoit d'une nation où elle avoit été élevée, & fe retiter ce même jour avec les Princeffes à fa maifon de plaifance, qui étoit à deux mille de' Grenade, & par laquelle il falloit néceffairement que Dom Alvare paflât pour fe rendre en Efpagne, & que dans la nuit il pour

roit les voir fans péril. Almora dine, qui vouloit engager Ofmin à quitter Grenade, appuya fortement cette propofition, & fit réfoudre la Reine à partir auffitôt après fon dîné. Ainfi elle ordonna tout pour ce petit voyage qu'elle fit fçavoir au Roi, qui, craignant plus fa pitié que fon abfence, lui manda qu'elle étoit libre de faire ce qu'elle voudroit. Cette Princeffe ayant fait avancer l'heure de fon repas, monta auffi-tôt après dans fon chariot accompagnée des Princeffes Félime & Almoradine, ne menant avec elle qu'un petit nombre de Gardes, Hefperence de Hita & quelques femmes abfolument neceffaires.

Cependant Ofmin ne negli geoit rien pour la fuite de fon prifonnier; la garde de la Fortereffe étant à fa devotion, il ne craignoit

craignoit rien pour en faire fortir Dom Alvare. La feule journée du lendemain lui donnoit de l'embarras; il falloit representer Joraé, ou dire de quelle façon il s'étoit pû fauver, & il connoiffoit trop Boadilly, pour ne pas voir le péril où il alloit mettre ceux qui le fervoient dans cette évafion.

Comme il étoit dans cette perplexité, on vint l'avertir qu'un Renegat Efpagnol qui avoit perdu l'efprit depuis quatre ans, & qu'il nourriffoit par bonté, venoit de fe tuer contre des barres de fer qui étoient à la fenêtre de la chambre ou où le tenoit enfermé. Ofmin, dont le cœur étoit genereux, fut touché de la mort cruelle de ce malheureux; mais comme il n'avoit que Dom Alvare dans l'esprit, il résolut de profiter de cette avanture pour garantir la vie de tant de gens qui

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s'empreffoient à fuivre fes volon tés. Pour cet effet il ordonna qu'on tînt la mort du Renegat fecrete, qu'on portât fon corps dans la chambre de Joraé, & que l'on publiât que ce dernier étoit à l'extrêmité par une fiévre ar dente caufée fans doute par la crainte du fupplice. Il étoit trop aimé pour n'être pas promptement obéi.

Après ces précautions, il fut trouver Dom Alvare pour lui apprendre fon ftratagême, & le prier de paffer dans fon appartement le reste du jour. Tous fes ordres donnés & executés, il fe retira avec fon prifonnier en attendant l'heure de le faire partir fans danger,

Mais comme il femble que les mauvaises nouvelles fe fçavent plus promptement que les bonnes, le bruit de la maladie de

Pefclave Espagnol parvint bientôt aux oreilles de Zéluma. Quoiqu'il l'eût vû le matin, fa crainte lui fit croire que ce ce mal pouvoit l'avoir pris après s'en être féparé; il en fut allarmé, & pour en fçavoir la verité, il envoya fon fidele efclave à Ofmin, pour le prier de ne point fortir du Fort quil n'eût de fes nouvelles ; que quand tout feroit dans l'accablement du fommeil au Palais de l'Alembre, il fe rendroit près de lui, & qu'il falloit que Dom Alvare partît en quelque état qu'il fût.

Ofmin & Joraé fe divertirent un moment de l'inquiétude du Prince; ils lui firent réponse & l'inftruifirent du fecret de cette feinte maladie, en l'affurant qu'ils ne partiroient point fans lui. Zéluma remis de fon apprehenfion, attendit avec impatien

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