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Auffi tôt que les derniers devoirs lui eurent été rendus, la Princeffe Beatrix me fit appeller: Je ne vous fais point fouvenir,me dit-elle des volontés de ma fille ; je fçai avec quelle ardeur vous êtes attaché à fa maifon: voilà, continua-t-elle,une médaille d'or avec fa clef que vous rendrez à Madame la Ducheffe de l'Infantade, elle doit aider à faire connoître le Prince Alonze,il en emporta une pareille lorfque vous le conduifites en Espagne; cette clef ouvrira l'une & l'autre. Enfuite elle me chargea des lettres qu'elle écrivoit à la Reine & à vous, Madame. Après ces inftructions, je fus prendre congé du Roi & je partis.

Jarrivai hier au foir,je fus d'abord chez la Reine qui m'ordonna de ne point paroître encore, voulant vous apprendre elle

même la mort de la Princeffe votre mere. En finiflant ces paroles Dom Sanche présenta à la Ducheffe la boëte d'or avec fa clef, & la lettre dont il étoit chargé.

Ce recit l'avoit touchée fi vivement, qu'à peine eut-elle la force de lire ce que lui écrivoit la Princeffe Beatrix. Pendant qu'elle s'y occupoit, Dom Alvare ayant jetté les yeux fur la boëte que tenoit le Portugais, la regarda avec tant d'attention qu'elle fut remarquée de Dona Elvire. Cette boëte vous trouble, lui dit-elle en baiffant là voix ceux pour lesquels votre cœur s'intereffe y auroient-ils quelque part?

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Ah! ma Sœur,s'écria-t-il avec un tranfport qu'il ne put retenir, que la ville de Grenade nous doit être chere! La Ducheffe qui finiffoit fa lecture, furprise de cet

te exclammation,lui en demanda la caufe avec empreffement. Si vous voulez me permettre, Madame, lui dit Dom Alvare d'examiner cette mysterieuse medaille, peut-être vous rendrai-je une partie de la perte que vous venez de faire, car enfin plus je la regarde, & plus je la trouve femblable à celle que j'ai vûë entre les mains d'un homme à qui je dois la vie & mon retour en ces lieux. A ces mots ayant pris la boëte des mains de Dom Sanche, & y trouvant les mêmes têtes d'homme & de femme, avec la même devife, qui étoient à celle de l'amant d'Almoradine. Il n'en faut point douter, Madame, ditil à la Ducheffe, le brave Ofmin dont je vous ai parlé est le Prince Alonze.

La tendreffe que nous avons pris fi promptement l'un pour

l'autre, la reffemblance de fes traits & des vôtres, l'incertitude de fa naiffance, la medaille qu'il conferve avec tant de foin, & enfin les nobles fentimens de fon ame, me font des preuves certaines quil eft votre frere. Ah! mon cher Dom Alvare, lui dit la Ducheffe, ferois-je affez heureuse pour tenir un frere qui m'est si cher, de la main d'un fils que j'aime avec tant d'ardeur. Dom Alvare ne répondit à ce discours obligeant, qu'en baifant refpectueufement la main d'Eleonore qui le preffa de lui conter l'hiftoire d'Ofmin. Comme elle fe pouvoit dire fans y mêler la fienne, & qu'il crut pouvoir par elle découvrir les fentimens de la Ducheffe fur des alliances avec les Princeffes Maures, il ne balança point à la fatisfaire; il n'oublia aucunes des circonftances necef

faires pour mettre en jour les grandes qualités d'Ofmin ; & mê, lant adroitement dans fon récit les vertus d'Almoradine & la tendre eftime quiles uniffoit, il fit affez connoître que pour revoir Alonze il faudroit confentir à cet hymen.

, que

S'il ne faut, lui dit Eleonore, pour faire venir Alonze lui affurer la poffeffion de fa Princeffe, je puis efperer de l'embraffer bientôt, puifque les alliances font toûjours glorieufes quand elles fe font avec égalité, & qu'il eft de notre devoir d'arra cher, autant que nous le pourrons, des perfonnes de ce rang & de cette vertu, aux erreurs de Mahomet. Ainfi, mon fils, continua-t-elle, c'est votre ouvrage, c'est à vous à nous rendre le Prin cevotre Oncle, puifque c'eft lui qui vous a rendu à votre Patrie.

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