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moyens de vous montrer ma reconnoiffance, je viens, Seigneur, vous affurer que je ne m'oppoferai point à ce que vons croyez qui peut faire votre bonheur, & que je trouverai Dona Elvire heureuse de pouvoir efperer un époux tel que vous. Zéluma, qui ne s'attendoit à rien moins qu'à ce difcours, fut fi faifi de joye & de furprife, qu'il en perdit l'usage de la voix; il voulut fe jetter aux pieds du Duc, qui l'en empêcha. Ces tranfports, & les termes dont il fe fervit pour le remercier, fi rent affez connoître au Duc de l'Infantade la grandeur de fon amour, & le déterminerent entierement à rendre tant d'illuftres perfonnes heureuses.

Dom Alphonfe laifla les deux amis en liberté, & paffa chez la Ducheffe pour l'instruire de cette avanture. Cette tendre mere for

tifia le Duc dans fa réfolution, & le pria de permettre à Dom Alvare de lui amener Zéluma, ce qu'elle obtint facilement.Eleonore fit venir Dona Elvire à la quelle elle parla à peu près comme le Duc avoit fait à fon fils. Cette charmante perfonne rougit plus d'une fois pendant le difcours de la Ducheffe, mais il lui fut aifé de remarquer dans fes yeux la joye de fon cœur; & Dom Alvare ayant été averti de l'intention du Duc, ne voulant pas differer la fatisfaction de fon ami, l'emmena dans ce moment à l'appartement d'Eleonore. Cette entrevûë fe paffa de part & d'autre avec refpect, beaucoup de confiance, de témoignage de joye & de tendreffe; l'amoureux luma fe crut le plus heureux des hommes ; & Dom Alvare, que le même efpoir animoit; faifoit re

marquer une fatisfaction qui n'étoit troublée que par l'absence de Félime. Cette journée fe termina dans ces differentes occupations, & la nuit qui lui fucceda fut la plus agréable que nos amans euffent paffée depuis long-tems.

Le jour fuivant fut emploïé à des affaires moins tendres; mais auffi mémorables, puifqu'il éclaira le fameux Confeil qui devoit décider du deftin du Roi de Grenade. Les sentimens furent partagés; les uns vouloient qu'on profitat de cette occafion pour exterminer les Maures, qu'on entrât à main armée dans Grenade, & qu'on y mît tout à feu & à fang. Les autres plus moderés, confeilloient qu'il falloit renvoyer Boadilly en le liant de façon, que fon Empire fût moins à lui qu'aux Rois de Caftille; d'autant plus que fice Prince venoit à manquer

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à la moindre des loix qu'on lui impoferoit, les Rois feroient toûjours en état de l'en faire repentir, ayant une Armée formidable fur pied, & leurs conquêtes s'étant étenduës jufqu'aux portes de Grenade, dont les differentes factions leur faciliteroient toûjours l'entrée. Comme cet avis s'accommodoit mieux aux grands fentimens de Ferdinand, & qu'il trouvoit par là un moyen d'affujettir les Maures, en cachant fon ambition fous le voile de la Pieté, il fe tint à ce dernier avis, & refolut de renvoyer Boadilly fous les conditions fuivantes.

Premierement. Que le Roi de Grenade rendroit foi & hommage aux Rois de Caftille; qu'il leur payeroit un tribut annuel qui feroit employé à construire les Eglifes qu'il laifferoit bâtir à Grenade, dans lesquelles il per

metroit le libre exercice de la Religion Catholique.

II. Qu'il employeroit ses foins & fon autorité, même par fon exemple & celui de la famille Royale, à la converfion de fes fujets.

III. Que les Rois de Castille établiroient un Confeil à Grenade, fans l'avis duquel Boadilly ne pourroit rien entreprendre.

IV. Qu'il obligeroit les Princes & les Princeffes qui fe convertiroient à ne prendre d'alliance qu'en Espagne,& y apporteroient tous les biens dont ils auroient joüi à Grenade.

V. Que Boadilly donneroit aux Rois de Caftille un Prince & une Princeffe de la Maifon Royale leur fervir d'ôtage. pour

Π

Il y eut encore plufieurs Articles importans,moyennant quoi les Rois de Caftille s'obligeoient

de

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