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qu'elle a été compofée avec le même ef prit qui a dicté à l'Eglife fes Canons. Parmi tous les préceptes qu'elle contient, elle renferme fur-tout l'obligation de travailler des mains; car les premiers Fondateurs d'Ordres defiroient que leurs difciples vécuffent comme les Apôtres en s'appliquant à des travaux qui leur procuraffent les moyens de fubfifter.

S'ils ne firent pas toujours des ouvrages méchaniques, c'eft, qu'encouragés par un plus noble objet, ils crurent devoir diffiper les ténebres de l'ignorance qui couvroient prefque la Terre aux neuvieme & dixieme fiecles, où, malgré les vérités de la Religion, qui font toujours les mêmes, la plupart des Eccléfiaftiques croupiffoient dans la plus honteufe oifiveté.

On vit alors les Bénédictins employer tout leur temps à faire reparoître la lumiere, & à la répandre eux-mêmes dans les Villes comme dans les campagnes, qu'ils rendirent habitables par de continuels défrichements. Il y a nombre de villes en Europe qui doivent leur exiftence aux difciples de S. Benoît, qui eurent un zele infatigable, quand il fut queftion d'améliorer les terres & les efprits.

Avec des points de vue différents, les Regles de S. Dominique & de S. François ne furent pas moins fages. Ces illuftres Saints qui vinrent ranimer l'efprit de pénitence dans un temps où il fembloit entiérement perdu, penferent fagement,

que pour, feconder le zele des Eccléfiaftiques, ou pour fuppléer à leur petit nombre, l'Eglife avoit befoin d'un corps de réferve, d'où l'on pût tirer des troupes auxiliaires, quand on le jugeroit à propos.

C'eft fous cet afpect que les Souverains; Pontifes approuverent l'Ordre des Freres Prêcheurs, & celui des Francifcains; & il faut avouer que ces Religieux rempliffent leur tâche avec fuccès; & qu'une mul titude de Diocefes, jufqu'aux extrémités du monde, font le théâtre de leurs travaux apoftoliques.

François d'Affife, cet homme pauvre & fimple, dont plufieurs efprits-forts ont cru faire un objet de dérifion, en tâchant de ridiculifer fa fimplicité, a composé une Regle pleine de fageffe, & dont tous les articles, qui fe réduifent à peu de mots, renferment un fens admirable. Il ne falloit pas être un idiot, pour recommander à fes enfants, comme il a fait, de ven dre jufqu'aux vafes facrés, pour foulager les malades, au cas que les facultés de lai Communauté ne puffent fuffire à ce des. voir; & pour dire que Dieu étoit beau coup plus fatisfait de voir les pauvres afr fiftés, que fes autels parés.

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Il n'y a rien d'outré dans les Loix qu'il établit, n'ayant jamais eu d'autre langage que celui de l'Evangile. Il connut les défagréments de la direction des Religieufes & dans un Chapitre général il prit le ton, Les airs, la démarche du Frere Elie qui

avoit des manieres affectées, afin d'en faire connoître le ridicule; quoique le Frere Elie fût un Religieux très capable de gouverner. 2: Si, dans tous les Ordres, on ne s'eft pas toujours tenu à la Regle, en donnantdans quelques excès de rigorifme ou de relâchement, c'eft qu'aucun Corps, excepté l'Eglife, n'a le privilege de l'infaillibilité; & que les hommes font fujets à varier. D'ailleurs eft-il étonnant que les Chrétiens de ce fiecle, étant fi différents des premiers, les Inftitutions Religieufes aient décliné? Je conviens qu'on les a trop multipliéés, & que le Concile de Latran fit très-fagement quand il travailla à en reftreindre le nombre; par la raison qu'il eft fort difficile qu'une multitude de perfonnes fe conferve dans la ferveur; & qu'on ne doit pas dépeupler un Etat, pour peupler des Communautés.

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Je n'entre point ici dans le détail de toutes les Regles qui font la bouffole des Monafteres & des Couvents; je defire feulement qu'on les examine avant de faire le procès à aucun Ordre Religieux. Le' monde ne juge que fur les apparences; autrement il ne crieroit que contre les abus" clauftraux; &, loin d'attaquer l'effence desinftitutions régulieres, il en approuveroit le but & les motifs.

Ce n'eft pas feulement la Religion Catholique qui compte parmi les fiens des en fants confacrés à la retraité d'une maniere toute particuliere: la Chine, qu'on cite

fans ceffe comme le modele d'un excellent Gouvernement, a fes Bonzes, & la Turquie fes Derviches. Il feroit cruel qu'un Etat ne permît pas à ceux qui ont un goût tout particulier pour la folitude, de fuivre un pareil attrait. Il eft vrai que c'eft aux Souverains à examiner fi le nombre n'en eft pas trop grand, & à le réduire, au cas que cela fût,:

L'Inftitut de S. Ignace n'auroit jamais été attaqué, s'il n'avoit été que l'ouvrage de ce pieux Fondateur qui ne refpira que le falut des ames; mais les Généraux qui lui fuccéderent y mirent la main, & ils amalgamerent une politique toute humaine avec des réglements très-édifiants. On corrompt quelquefois le texte, en paroiffant l'expliquer.

Il y eut fans doute des Conftitutions trèsfages qui fuppléerent à tout ce que les Chefs d'Ordres n'avoient pas dit; mais j'en connois qui ont plutôt obscurci la Regle qu'ils ne l'ont éclaircie, & qui ont fait dif paroître le véritable efprit des Fondateurs.

L'homme, naturellement inquiet ou vain, veut toujours mettre quelque chofe de lui-même dans tout ce qui l'intéreffe. Il n'aime pas qu'on le conduife par la main; & cependant on ne peut rien defirer.de -mieux qu'un bon guide. ' bas

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Tous les Ordres Religieux furent fondés fur le défintéreffement; & les moyens qu'ils ont pu employer pour fe procurer des poffeffions, n'ont point été confeillés

par les Fondateurs. Cela eft fi vrai, qu'ils mirent pour bafe de leurs Regles le vœu de pauvreté, S. Augustin refufa nombre de donations qu'on vouloit faire à fon Monaftere; & fi par la fuite on en a reçu fans difficulté, c'est qu'on a connu que la mendicité expofoit à bien des inconvénients, fur-tout dans un fiecle où l'on ne cherche qu'à ridiculifer ceux qui portent les livrées de la pénitence, & qui retracent les Apôtres par leur grande fimplicité.

C'eft une injuftice de prétendre que les Religieux qui poffèdent des fonds confidérables, n'en devroient plus jouir, par la raifon qu'ils ne rendent plus les mêmes fervices qu'autrefois. On récompenfe tous les jours dans les fils les vertus de leurs aleux; & le privilege de la Nobleffe don't jouiffent les Gentilshommes, eft une faveur accordée en mémoire de leurs An¿cêtres.

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Il ne doit y avoir qu'une feule & même maniere de juger; mais, à l'égard de certaines perfonnes, il fuffit d'être Religieux, pour avoir tort. On s'attache à quelques Ecrits particuliers, à quelques fcandales inévitables dans des Corps nombreux; & l'on charge tout un Ordre des vices de quelques individus.

Quand la raifon prendrá la balance, & pefeta les chofes avec impartialité, elle verra fans doute des vices dans les Cloîtres; mais elle y verra en même temps la vertu furabonder elle y verra des vic

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