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HISTOIRE JOURNALIÈRE

DE PARIS.

1717.

Q

ARTICLE PREMIER.

UELQUE fimple que foit un fait, sa nouveauté le rend remarquable. Il arriva vers la fin de janvier un vaiffeau marchand portant pavillon & flamme & monté de huit pièces de canon. Il venoit du Havre & étoit chargé de morue. C'étoit un heu, forte de bâtiment hollandois qui tire peu d'eau (1), ce qui lui avoit donné facilité de venir jufqu'à Paris. Il falua de tout fon canon le pavillon des Tui

(1) Le Dictionnaire de Trévoux, en décrivant cette forte de bâtiment qui jaugeoit 300 tonneaux & n'avoit qu'un mât & une voile latine, ajoute qu'on l'appeloit auffi olca.

leries & vint mouiller au port Saint-Nicolas devant le Louvre. Tant qu'il y a refté, le peuple n'a ceffé de s'y amufer, & l'on affure que l'équipage a gagné plus de cent écus à le laiffer voir en dedans, quoiqu'il prît seulement un fou par perfonne. Il est venu deux mois après un pareil bâtiment on ne l'a pas regardé.

ARTICLE II.

Les académies des fciences & des arts font des espèces de républiques neutres, où font admis tous ceux qui s'y appliquent, fans diftinction de nation, ni même de religion pour les étrangers; c'est que le Parnafse appartient à tous les habiles gens; la feule capacité doit y donner entrée. Les Anglois qui connoissent ce qu'ils valent & qui ne penfent pas communément, penfent de même fur ce fujet : auffi les membres de la fameufe académie d'Angleterre, connue fous le nom de Société royale, ne font pas tous Anglois, ni anglicans. Il en eft de même en France. M. Boit, peintre en émail du roi d'Angleterre (1), en est une

(1) Charles Boit, né à Stockholm de parens françois, en 1663, mort à Paris le 6 février 1727. Les Nouvelles archives de l'art françois (2me férie, tome IV, ou tome X de la collection) ont publié le réfumé de fon inventaire après décès. Les Procès-verbaux de l'Académie royale,

preuve à l'égard de l'Académie de peinture qui fembloit être plus réfervée que les autres. Il eft Suédois & luthérien; néanmoins fa qualité d'étranger & sa religion ne l'ont point exclu. Honoré de la protection de Monseigneur le duc d'Orléans, qui l'accorde aux sciences & aux arts dans tous les fujets indifféremment, il fut reçu à l'Académie royale de peinture & de fculpture, le dernier famedi de janvier, à la recommandation de Son Alteffe Royale. Comme cette réception eft extraordinaire, Monfeigneur le duc d'Orléans eut la bonté de faire affurer l'Académie qu'elle ne tireroit point à conféquence, ce qui a été inféré dans les regiftres, & lui fit enfuite préfent d'un petit tableau en émail du même peintre repréfentant une Charité, copiée d'après Carlo Cignani (1).

édités par la même fociété, confirment ce que dit ici Dubois touchant la réception de Boit, quoique protestant, & la lettre du duc d'Antin, qui invitoit l'Académie à cette dérogation, eft annexée au registre. Converti à une date que j'ignore, Boit mourut rue du Petit-Bourbon, chez l'abbé de Revel, & fon acte de décès fut infcrit à Saint-Sulpice. Il a été publié en 1873 par M. Piot (Etat civil de quelques artifes français) & par M. H. Herluifon (Actes d'état civil d'artifles français), fur les copies relevées par M. H. Harduin.

(1) Ce n'eft point fur une miniature d'après Cignagni que Boit fut reçu; il avoit reproduit en émail une Charité de Jacques Blanchard, appartenant au Louvre, ainsi que fa copic. Boit préfenta auffi à l'Académie un portrait

ARTICLE III.

M. Voifin (1), chancelier & garde des fceaux de France, mourut à Paris en fon hôtel, la nuit du premier au fecond de février, & le même jour second, le Roi, fur la nomination de Monfeigneur le duc d'Orléans Régent, donna cette charge à M. Daguesseau, procureur général, & ci-devant avocat général (2). Le lendemain, il prêta ferment entre les mains de Sa Majesté.

Le chancelier (3) eft le premier de tous les officiers de paix; fes fonctions font auffi anciennes que la monarchie. Sous les deux premières races ceux qui les exerçoient s'appeloient indifféremment (4) référendaires, apo

du Régent (no 1434 du catalogue Reifet). Le cadre de la Charité, fculpté par Jean Le Blanc, valut à celui-ci le titre d'académicien le 30 avril 1718. Il orne encore le portrait pour lequel il avoit été fait.

(1) Daniel-François Voyfin mourut fubitement à table. (2) Henri-François Dagueffeau, né à Limoges le 27 novembre 1668, mort à Paris le 9 février 1751.

- Du

(3) Des officiers de France, par M. Loiseau (D.). bois veut fans doute défigner le livre fuivant de Charles Loyfeau Cinq livres du droit des offices de France avec le livre des feigneurs & celui des ordres. Châteaudun, 1610, ou Paris, 1614, in-folio. Réimpr. fous le titre de Traité des ordres & fimples dignités, 1640, in-folio.

(4) Hiftoire chronologique de la grande chancellerie, par

crifaires, archichanceliers, grands chanceliers, archinotaires, & quelquefois archichapelains. Sous la troisième race, le nom de chancelier eft refté à cette charge dont les honneurs ont beaucoup augmenté (1). Il est le chef de la juftice, a l'expédition de tous les édits & de tous les mandemens du Roi, & préfide à tous les confeils. Lorsqu'il va au Parlement (2), on lui députe deux confeillers pour l'aller recevoir, & il fe place au-deffus du premier préfident. Aux lits de juftice, il prend les avis & prononce les arrêts. Il eft premier préfident du grand conseil; la raison qu'en apporte un célèbre jurifconfulte (3), c'est parce qu'anciennement c'eftoit le confeil d'Eftat & qu'il en fut séparé par Charles VIII, afin de le décharger des procès (4).

Le chancelier n'affifte à aucune pompe funèbre, & ne porte jamais le deuil, ce qui lui eft particulier : Parce que, dit le fameux Le Maître (5), il fe détache en quelque façon

M. Teffereau (D.). La première édition eft de 1676, in-folio; la feconde parut de 1706 à 1710, 2 vol. infolio.

(1) Hiftoire des chanceliers de France, par François Duchefne (D.). · Paris, 1680, in-folio.

(2) M. Loifeau, ibid.; M. Teffereau (D.).

(3) M. Loiseau, ibid.; M. Teffereau, ibid. (D.).

(4) M. Loifeau, ibid.; François Duchefne, ibid. (D.). (5) Plaidoyers (D.).

La première édition des Plai

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