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A peine dans Gombaut, Mainard, & Malleville, En peut-on admirer deux ou trois entre mille. Le refte, auffi peu lû, que ceux de Pelletier, 100 N'a fait de chez Sercy qu'un faut chez l'Epicier. Pour enfermer son sens dans la borne preferite, La mesure est toujours trop longue on trop petite. L'Epigramme plus libre, en fon tour plus borné, N'est souvent qu'un bon mot de deux rimes orné. 105 Jadis de nos Auteurs les Pointes ignorées, Furent de l'Italie en nos Vers attirées. Le Vulgaire éblouï de leur faux agrément, A ce nouvel appas courut avidement. La faveur du Public, excitant leur audace, 110 Leur nombre impétueux inonda le Parnasse. Le Madrigal d'abord en fut enveloppé. Le Sonnet orgueilleux lui-même en fut frappé. La Tragédie en fit fes plus cheres délices. 115 L'Elégie en orna fes douloureux caprices. Un Héros fur la Scene eut foin de s'en parer; Et fans Pointe un Amant n'ofa plus foûpirer. On vit tous les Bergers, dans leurs plaintes nouvelles, Fidéles à la Pointe, encor plus qu'à leurs Belles. Chaque mot eut toujours deux vifages divers. 120 La Profe la reçût auffi-bien que les Vers.

Vers 97. A peine dans Gombaut, Mainard, & Mailleville.] Trois Académiciens célébres.

Vers 100. N'a fait de chez Sercy. ] Charles de Sercy, Libraire, dont la boutique étoit

dans la Grand' Salle du Palais,


Vers 104. N'eft souvent qu'un
bon mot de deux rimes orné. ]
Telle eft cette Epigramme de
notre Poëte:

J'ai vu l'Agéfilas :
Hélas!

L'Avocat au Palais en hériffa fon stile,
Et le Docteur en chaire en fema l'Evangile.

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La Raifon ourragée enfin ouvrit les yeux;
La chassa pour jamais des discours férieux,
125 Et dans tous ces Ecrits, la déclarant infame,
Par grace, lui laissa l'entrée en l'Epigramme :
Pourvu que fa fineffe, éclatant à propos,
Roulât fur la pensée, & non pas fur les mets,
Ainfi de toutes parts les défordres cefférent.
130 Toutefois à la Cour les Turlupins restérent;
Infipides Plaifans, Bouffons infortunez,
D'un jeu de mots groffier partifans furannez.

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Vers 122. Et le Dostenr en Chaire en fema l'Evangile. ] Au commencement du siécle dans lequel notre Auteur a écrit, 'Eloquence Françoise étoit dans une étrange corruption. Un difcours public n'étoit alors qu'un tiflu bizarre de citations Grecques & Latines, A cet abus il en fucceda un aurre plus contraire à la véritable Eloquence. Les Orateurs épuifoient leur efprit en pointes frivoles, en ornemens fuperflus en faux brillans. C'eft ainfi que prêchoit Mr. Mafcaron Evêque de Tulles: il fe plaifoit à ces jeux de mots & à ces pointes; & les Rieurs difoient de fes Sermons, que c'étoit un Recueil d'Epigrammes. Le petit Pere André Boulanger, Auguftin, prêchoit de la même maniére.

Vers 130. Toutefois à la

Cour les Turlupins restérent. } Turlupin, eft le nom d'un Comédien de Paris, qui divertiffoit le peuple par de méchan tes pointes, & par des jeux de mots qu'on a appellez Turlupinades. Ses imitateurs ont été nommez Turlupins. Il étoit le Plaifant de la Farce dans la Troupe des Comédiens de l'Hôtel de Bourgogne, du tems que Bellerose en étoit le Chef. Pendant quelque tems on a vû regner en France le goût des Turlupinades, & la Cour même fembloit être la fourse de cette corruption; mais Moliere vengea le bon goût & la raifon par les fanglantes railleries qu'il fit des Turlupins & des Turlupinades, Le Marquis de la Critique de l'Ecole des Femmes, eft un de ces Turlupins,

Ce n'eft pas quelquefois qu'une Mufe un peu fine, Sur un mot en passant ne jouë & ne badine, 135 Et d'un fens détourné n'abuse avec fuccès.

Mais futez fur ce point un ridicule excès; Et n'allez pas toujours d'une pointe frivole Aiguifer par la queue une Epigramme folle. Tout Poëme eft brillant de fa propre beauté. 140 Le Rondeau, né Gaulois a la naïveté.

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La Ballade affervie à fes vieilles maximes,
Souvent doit tout fon luftre au caprice des rimes.
Le Madrigal plus fimple, & plus noble en fon

tour,

Refpire la douceur, la tendreffe & l'amour.
L'ardeur de fe montrer, & non pas de médire,
Arma la Vérité du Vers de la Satire.

Lucile le premier ofa la faire voir :

Aux vices des Romains présenta le miroir : Vengea l'humble Vertu de la richeffe altiére, 150 Et l'honnête Homme à pié, du Faquin en litfére.

Vers 147. Lucile le premier.] Caïus Lucilius, Chevalier Romain, fut l'inventeur de la Satire, en tant qu'elle eft un Poëme dont la fin eft de reprendre les vices des hom mes Car, bien que les Grecs aient compofé des vers & des Ouvrages Satiriques, c'est-à

dire, mordans, il eft certain qu'ils ne leur ont donné ni le caractére ni le tour de la Sa tire Latine. C'est pourquoi Quintilien a dit: Satira tota noftra eft; & Dioméde le Grainmairien: Satira eft Carmen apud Romanos, non quidem apud Gracos, maledicum. Horace, Satire I. Livre 2. Eft Lucilius aufus

Vers 147. Lucile le premier.]

Primus in hunc operis componere Carmina morem,
Enfe velut ftricto, quoties Lucilius ardens

Infremuit, &c. Juvenal, Sat. I.

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Horace à cette aigreur mêla fon enjoûment.
On ne fut plus ni fat ni fot impunément :
Et, malheur à tout nom qui propre à la cenfure,
Put entrer dans un Vers fans rompre la mesure.
Perfe en fes Vers obfcurs, mais ferrez & preffans,
Affecta d'enfermer moins de mots que de fens.

Juvénal, élevé dans les cris de l'Ecole,

Pouffa jufqu'à l'excès fa mordante hyperbole.
Ses ouvrages, tout pleins d'affreufes véritez,
160 Etincelent pourtant de fublimes beautez :
Soit que fur un Ecrit arrivé de Caprée,
Il brife de Séjan la ftatuë adorée :

Soit qu'il faffe au Confeil courir les Sénateurs D'un Tiran foupçonneux, pâles adulateurs : 165 Ou que, pouffant à bout la luxure Latine,

Aux Portefaix de Rome il vende Meffaline: Ses Ecrits pleins de feu par tout brillent aux yeux. De ces Maîtres favans, difciple ingénieux, Regnier feul parmi nous formé fur leur modelles, 170 Dans fon vieux ftile encore a des graces nouvelles, Heureux fi fes difcours craints du chafte Lecteur, Ne fe fentoient des lieux où fréquentoit l'Auteur;

Vers 162. Il brife de Séjan la
ftatue adorée. Juvénal, Satire
10. v. 60. & fuivans.

Vers 163. Soit qu'il fassè au
Confeil courir les Sénateurs.]
Satire 4. vers 37. jusqu'à la fin.

Vers 164. D'un Tiran foup-
çonneux pâles adulateurs.] Là

même, vers 74.

Vers 166.

· Il vende

Meffaline. Satire 6. depuis le
vers 115. jufqu'au 132.
Vers 171.Heureux!fifes difcours

craints du chafte Lecteur
Ne fe fentoient des lieux où fré-
quentoit l'Auteur.]

Vers 151. Horace à cette aigreur mêla fon enjoúment.] Perfe, Sat. I. v. 116.

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Omne vafer vitium ridenti Flaccus amico
Tangit, &c.

Et fi du fon hardi de fes rimes Ciniques,

Il n'allarmoit fouvent les oreilles pudiques. 175 Le Latin dans les mots, brave l'Honnêteté. Mais le Lecteur François veut être respecté. Du moindre fens impur la liberté l'outrage, Si la pudeur des mots n'en adoucit l'image. Je veux dans la Satire un efprit de candeur; 180 Et fuis un effronté qui prêche la pudeur.

D'un trait de ce Poëme, en bons mots fi fertile, Le François né malin forma le Vaudeville; Agréable Indiscret qui conduit par le chant, Paffe de bouche en bouche & s'accroît en marchant. 185 La liberté Françoise en fes Vers fe déploïe. Cet enfant de plaifir veut naître dans la joïe. Toutefois n'allez pas, goguenard dangereux, Faire Dieu le fujet d'un badinage affreux. A la fin tous ces jeux, que l'Athéïlme éléve. 190 Conduifent triftement le Plaifant à la Gréve. Il faut même, en chansons, du bon fens & de l'art. Mais pourtant on a vû le vin & le hazard

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Heureux ! f, moins hardi,

dans fes vers pleins de fel, Il n'avoit point trainé les Mufes au B**

lui fit fentir qu'il tomboit dans le même défaut que Regnier, & lui fournit fur le champ les deux vers qui font ici. Mr. Defpréaux les adopta en intention de mettre en marge qu'ils étoient de Mr. Arnauld; ce que ce Docteur ne voulut point fouffrir.

Vers 190. Conduisent triftement le Plaifant à la Gréve. ]

Mais Mr. Arnauld qu'il con- Quelques années avant la pufultoit fur tous fes ouvrages,blication de ce Poëme un jeune

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