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CHAPITRE XVII.
Avertiffement contre les mauvais Livres.

QUAND je vous exhorte à lire les bons

Livres, je vous dois avertir en même-temps de fuir entiérement les mauvais, qu'on peut appeller la pefte des mœurs, après lefquels il n'y a rien de plus pernicieux pour perdre la jeuneffe.

C'eft un des plus puiffans moyens que le diable a trouvés pour corrompre les efprits, & qui lui réuffit prefque toujours infailliblement : il en a fufcité un nombre infini en toutes matieres, en toutes langues, & en tous les temps; & il en invente encore tous les jours de nouveaux. La plupart font déguifés de quelque invention d'efprit; & font d'autant plus dangereux, que fous ces déguisemens ils cachent le venin mortel qu'ils jettent bien avant dans les ames. Les jeunes gens les lifent avec plaifir & avec ardeur, & ils les retiennent facilement. Les difcours paffent; mais les Li vres leur demeurant entre les mains, ils ont le temps de méditer & d'avaler doucement le venin qu'ils y trouvent.

Les effets en font toujours pernicieux & mortels: les uns jettent l'efprit dans le doute & dans l'erreur fur les vérités les plus importan

tes,

telles que font celles de la Religion : les autres pervertiffent le jugement, & corrompent les bonnes inclinations, faifant juger bon ce qui eft mauvais, & mauvais ce qui eft bon. Les autres enseignant le vice, excitent

les paffions, enflamment la concupiscence; & allument l'amour déshonnête dans les cœurs les plus chaftes. Et il n'y en a point qui ne laiffe après foi trop de fujet d'en regretter la lecture.

Ces Livres font pernicieux à tous les hommes, mais fur-tout aux jeunes gens qui font plus fufceptibles de mauvaises impreffions, tant par la foibleffe de leur efprit, que par l'inclination qu'ils ont fouvent plus grande pour le mal que pour le bien. Ils doivent les fuir comme des productions du diable, & comme un venin déteftable que l'enfer a vomi fur la terre pour infecter les ames & pour les faire mourir.

Ces Livres font, I. tous les Livres hérétiques qui enseignent des erreurs contre la Foi, & qui combattent les vérités reçues par l'Eglife.

2. Tous les Livres impies qui tournent en dérifion la Religion & les chofes faintes; qui blâment les cérémonies de l'Eglife, & les coutumes reçues par elle; qui fe moquent des perfonnes dédiées à Dieu, comme des Prêtres & des Religieux ceux qui abusent de l'Ecriture fainte en des applications mauvaises & profanes.

3. Les Livres lafcifs & impudiques, qui font une guerre ouverte à la chafteté.

4. Les Livres qui traitent d'amour, bien qu'ils ne foient pas impudiques en paroles, tels que font plufieurs Poëtes Latins & François, & une grande partie des Romans. Ces Livres font plus dangereux que ceux de la troifieme forte; parce que ceux-là enseignent le mal à découvert, ils donnent facilement de l'averfion d'eux-mêmes aux ames qui ont tant foit peu de pudeur & de bonne conscience;

mais

mais ceux-ci ne paroiffant pas méchans tout d'abord, attirent l'efprit par leurs beaux dif cours & par la douceur des chofes qu'ils traitent, par laquelle délectant les fens, ils allument dans les coeurs le feu de l'amour impudique.

Fuyez tous ces Livres, THÉOTIME, comme des inventions que le diable a trouvées pour vous perdre. Vous ne les pouvez prefque pas lire fans pécher mortellement. Car ou vous y recevrez de mauvaises penfées, dont le confentement, ou la délectation volontaire vous rendra criminel devant Dieu, ou vous vous expoferez au danger évident d'en recevoir. Si vous avez quelqu'un de ces Livres, ne le regardez point, mais quittez-le abfolument. Quelque réfolution que vous ayez de vous abs tenir de fa lecture, la curiofité vous tentera, & vous furmontera à la fin. C'est un serpent que vous garderez, qui vous donnera quelque coup mortel, lorfque vous y penferez le moins.

Et ne dites pas que ces Livres font bien compofés, que le difcours en eft éloquent, que vous y apprenez à bien parler, & que vous trouvez beaucoup de belles choses. Car je vous répondrai que toutes ces raifons ne font que faux prétextes par lefquels vous vous trompez vous-même; & je vous dirai avec faint Auguftin, que par ces méchans Livres on n'apprend pas à bien parler, mais feulement à devenir vicieux & à commettre le mal avec moins de retenue. Je vous dirai encore que vous pouvez puifer l'éloquence ailleurs que dans ces fources corrompues, & que & que malheu

G

reuse eft l'éloquence de la fcience qu'on acquiert au détriment de fon ame & du falut éternel.

CHAPITRE XVIIL
Des bonnes converfations.

C'EST encore un moyen très-important pour acquérir la vertu, que de converser avec les perfonnes vertueufes. Il n'y a rien qui ait tant de force fur l'efprit, que l'exemple, tant pour le bien que pour le mal: l'homme eft naturellement enclin à l'imitation, & à faire ce qu'il voit faire aux autres. Que fi l'exemple peut beaucoup fut l'efprit, c'eft principalement dans la converfation où il y a d'autant plus de force qu'il eft reçu de près & fouvent. Et s'il a beaucoup de force fur les hommes, c'est principalement dans la jeunesse, comme on le voit par expérience.

C'est pourquoi un des plus importans avis qu'on puiffe donner aux jeunes gens qui aspirent à la vertu, c'eft celui de la bonne converfation.

C'eft-là, THEOTIME, où l'efprit fe forme doucement à la vertu : l'exemple de ceux qui la fuivent, lui fait des impreffions fecretes, mais fortes qui le portent à les imiter. Il prend infenfiblement leur jugement & leurs maximes ; il apprend à parler & à faire comme eux; il croit devoir faire ce qu'il voit faire aux autres. Un efprit bien né a honte de fe laiffer furmonter dans le bien par fes femblables; & c'eft un figne d'un tres-méchant naturel & d'un

efprit endurci dans le mal, lorfqu'il n'eft point touché par les bonnes actions qu'il voit faire aux autres, & qu'il perfifte dans le vice au milieu des exemples de vertu.

Ce moyen très-puiffant vous eft encore enfeigné par le Sage en l'Eccléfiaftique, chap. 9. Traitez, dit-il, avec les fagès & les prudens: Ayez pour familiers les hommes jufles & ver eueux. La raifon de ce confeil eft rendue dans les Proverbes, parce que celui qui converfe. avec les fages, deviendra fage.

Or il y a deux fortes de perfonnes vertueufes, dont vous devez aimer la converfation.

1. Celle des personnes fages qui vous furpaffent en âge auffi-bien qu'en fageffe & en vertu. C'eft l'avis du Sage dans les paroles que je viens de rapporter, & encore au chap. 6. où il dit: Trouvez-vous en la compagnie ́des fages anciens, & joignez-vous de tout votre cœur à la fageffe; c'eft-à-dire, prenez plaifir en leur compagnie, & à profiter de leurs fages difcours & de leurs bons exemples. S. Ambroise donne le même avis aux jeunes gens en ces Offices, où il dit qu'il est trèswile aux jeunes gens de fuivre les hommes fages. Que cela leur fert grandement pour apprendre la vertu, & pour donner quelque preuve de leur probité. Que les jeunes gens converfant avec les hommes fages montrent qu'ils imitent ceux aufquels ils fe joignent : & on juge d'eux ́ qu'ils forment leur vie fur ceux dont il aiment la converfation.

12. Converfez avec ceux de votre âge & de votre profeffion, que vous connoiffez être

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