Je l'aime, & quand l'inhumaine, Qui me caufoit tant d'ennui, Voudroit partager ma peine,- Je n'aimerai plus que lui.
Je tenois ce fier langage, Quand ce chef-d'œuvre des Cieux Iris au charmant visage Se vint offrir à mes yeux.
Qu'une flamme mal éteinte Eft facile à rallumer !
Et qu'avec peu de contrainte On recommence d'aimer !
Iris me mit tout en flamme
Iris me fit inconstant:
Iris m'arracha de l'ame
L'Oranger que j'aimois tant.
Quel moyen d'être rebelle ! ¦ Il fallut s'humilier.
L'Amour étoit avec elle
Qui me fir tout oublier.
Connois-tu bien qui nous fommes
Dit l'Enfant imperieux ?
Volage, apprens que les hommes
Aiment comme il plaît aux Dieux. **
ArHo avoit partagé entre fes amis les poires de fon jardin, étant encore fur l'arbre. Celles d'Acante, & d'une Dame très fpirituelle fe trouverent fur un même arbre, vis-à-vis d'un Abrico tier. La Dame s'en allant à la campagne, pria Acante de lui garder fa poire, pendant fon abfence. Tel eft le fujet de cette Epitre que l'on donne ici, pour faciliter l'intelligence de la réponse qui fuit, & qui eft d'Acante.
ILLUSTRE Gardien de ma poire! Un Dragon eut jadis la gloire D'être gardien des pommes d'or. Ma poire qui vaut mieux encor, Que ne vaut la plus belle pommes Merite les foins d'un grand homme Non-feulement pour sa beauté, Mais pour l'honneur d'avoir été, Préférablement à toute autre, La fœur cadette de la vôtre; Et pour le glorieux deftin De croître dans le beau jardin
D'une pucelle de merite
Et d'Apollon la favorite.
Faites-en donc un peu de cas: Surtout ne la négligez pas. Que nu ne lui porte dommage; Et que rien ne lui faffe ombrage: Quelle foit toujours au Soleil, Afin qu'elle ait le teint vermeil; Et qu'elle en vaille plus de mille Comme celle du beau Trafille; Pour la vôtre, je wen dis rien ; La raifon & moi voulons bien 5 Que, comme étant la fœur aînée, Elle foit plus belle & mieux née.
RE'PONSE
EH, bons Dieux qui le pourroit croire ?
De fi beaux vers fur une poire!
Et fût-elle de faint Lezin, Quel Voiture ou quel Sarafin Difputeroit avec ces Belles De la gloire des bagatelles, Quand afin de nous mieux charmer,
Elles fe mêlent de rimer?
Pour moi que l'injufte Nature
Ne fit Sarafin ni Voiture, Je m'y trouve bien empêché. Mais il faut tenir fon marché. Je n'aime point à me dédire: Je l'ai dit, il faut vous écrire.
Hélas! que vous écrire encor Ces poires à la robe d'or, Si mignonnes, fi parfumées, Ces deux poires nos bien-aimées, Et dont vous faifiez tant de cas, Ces poires ne font plus; helas, Ou ne font que poires d'angoiffe; Car, pour fi peu que l'on connoisse Combien elles eurent d'appas,
On en pleure, on en créve, helas! C'étoit bien taifon que la vôtre Eût beaucoup plus d'efprit que l'autre. ́ ́ Elle en eut trop pour fon malheur, Et fe perdit avec fa foeur.
Voici de l'une & l'autre poire La trifte & lamentable histoire, -
Fiere de vous appartenir, Et gardant en fon souvenir Vos loix, vos fevéres paroles, Car ce n'étoient pas poires molles, La vôtre, fans fe contenter De vivre, croître & vegeter, Pour s'inftruire, & pour profiter Ne faifoit jamais qu'écouter. Sur-tout elle prêtoit l'oreille, Quand cette fille fans pareille, Sapho notre grande merveille,
La mere des tendres amours,' La mere des tendres difcours, Au jardin tenoit fes grands jours, Or elle entendoit que fans ceffe Chacun y parloit de tendreffe :
Lettre, billet, ou compliment, Tout finiffoit par tendrement. De travers, ou de bonne grace Tendre trouvoit par tout fa place: Jufqu'à mettre en Landeriri Un petit endroit attendri. * Que fit-elle à force d'entendre, Il lui prend une amitié tendre Pour un Abricot fon voifin. Elle l'appelle fon coufin, Le voit, l'entretient, le careffe : Ce n'étoit pourtant que tendreffe. Souvent en ce doux entretien Tout un jour ne lui duroit rien. Hors de là l'ennui la dévore Ce n'étoit tendreffe encore.
Mais qui peut resister au fort? Comme l'Abricot l'aimoit fort,
Conrart fage comme un Caton A pourtant au cœur, ce dit-on, Landerirette,
Un petit endroit attendri
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