Toujours ma paffion s'oppose à tes projets : D'un côté mon péché provoque ta justice; L'hiver accompagné des vents & des orages Vient de quitter la place à la belle faifon. La terre eft fans glaçons, le ciel eft fans nuages; L'un montre fon azur, l'autre son verd gazon. Par toi l'air eft ferein & la terre féconde: Grand Dieu ! c'est toi qui fais, en dépit des hivers, Retourner fur fes pas la jeunesse du monde, Et renaître à nos yeux l'éclat de l'Univers. S'il eft ainsi, de grace, arrête le tonnerre3 Epargne ton ouvrage, ô Dieu mon Créateur ! Tu fais un nouveau ciel, une nouvelle terre ; Peus-tu pas dans mon corps former un nouveau cœur ? Je fens deux forts partis combattre en mes en trailles. L'un m'entraîne aux enfers, l'autre m'élève à toi. Sans détruire, grand Dieu le champ de leurs batailles, ! Fai vaincre le parti qui combat pour ta Loi. Il y va de mon bien, il y va de ta gloire : Domte par ton efprit mon esprit obstiné. Ton triomphe est le mien, je gagne en tà viễ &toire ; Quand tu feras vainqueur, je ferai couronné. STANCES Tirées du Pfeaume 36. 'OIS-TU ces hauts palais ces pompeux édifices, Que l'injufte a bâtis du fang des innocens, attens un peu ; ne porte point d'envie Au bonheur de fa vie : L'herbe des champs s'élève, & fleurit comme lui; Mais fon brillant éclat peu de temps lui demeure; On l'admiroit n'aguere, on la fauche aujour d'hui, Et l'ouvrage d'un an périt en moins d'une heure. ୧୯୨୭ Laiffe-là ces méchans dont la chûte est pro chaine : Ne fouille point ton cœur de leurs fales defirs. Ton bonheur eft certain, ne t'en mets point en peine. Dieu te tient lieu de biens, d'honneurs & de plaifirs. Quand un homme l'honore, & n'a nulle espérance Dans les troubles du monde, il jouit de la paix; Le peuple alors l'admire,& connoît qu'il eft fage, Il reffemble au foleil tel que nous le voyons, Quand vainqueur des brouillards, ou d'un épais nuage, Droit deffus notre tête il lance fes rayons. éclaire, il échauffe en mille endroits divers ; Et de quelque côté que se tourne sa vûe, Il voit chaque climat de ce grand Univers Languir à fon départ, revivre à fa venue. 63 Quelquefois des méchans la brutale infolence De celui qui craint Dieu vient le repos troubler, Mais que peuvent-ils faire ? Il a pour fa défense Un bras dont un feul coup les peut tous accabler. Dieu qui peut à fon gré leur arracher la vie, Il fçait jufqu'où s'étend leur plus fanglant efforts Quel plaifir, ô grand Dieu! de voir par ta Un jufte profpérer plus que mille mondains, Que fon frere a foufferte. En tout temps la mifére éprouve fon fecours; Mais vous qui méprifez & l'amour & la haine Si d'un jufte courroux fon cœur eft enflammé? Quand fa main oubliroit l'usage de la foudre, Comme en un feul moment sa voix a tout fermé, Sa voix en un moment peut tout réduire en poudre. A iij STANCES. Ous n'êtes que pouvoir, je ne fuis que foibleffe, Mon Dieu mon Créateur; Je vous trouve partout, éternelle sagesse, Toujours devant mes yeux, & jamais dans mon cœur. Arbres, fleurs, & ruiffeaux, dévote folitude, $ Ces Rameaux toujours verds que l'Automne revére Me prêchent mon devoir : Tel ferai-je, il l'a dit, fi je cherche à lui plaire. Ah! qui me donneroit pour un si haut espoir, Arbres, fleurs, & ruiffeaux, votre douce innocence Qui le loue en tout temps, & jamais ne l'offense, Ο Qui vous méne à la mer, belles & claires ondes! Et vous charmantes Fleurs, Où prenez-vous cet ambre, & ces tiges fécondes, Et ce divers feuillage, & ces riches couleurs ? Arbres, fleurs, & ruiffeaux, devote folitude, Vous m'en dites affés pour des fiécles d'étude. |