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SEPTIEME DISCOURS

PRONONCÉ LE JOUR DE LA FÊTE DE SAINT PIERRE, 1840.

DE LA RAISON IMPLICITE ET DE LA RAISON EXPLICITE.

Rendez gloire au Seigneur Dieu dans vos cœurs, et soyez toujours prêts à répondre à tout homme qui vous demande raison de l'espérance qui est en vous; mais que ce soit avec douceur et retenue. (I St. Pierre, ch. III, 15.)

La Foi de saint Pierre fut une de ses grâces caractéristiques. Elle était vive, ardente, vigilante et prompte. Elle lui tenait lieu d'argument, de calcul, de délibération et de délai, toutes les fois qu'elle entendait la voix de son Seigneur et Sauveur; et pour l'entendre, cette voix, il n'était pas besoin qu'elle eût un son éclatant, ou que les autres sens vinssent l'aider de leur témoignage. Que le Christ apparaisse marchant sur les eaux et dise: « C'est moi, »> « Seigneur, lui répond Pierre, si c'est vous, commandez-moi d'aller à votre rencontre sur les eaux. » Qu'il demande à ses disciples « Qui suis-je ? » Simon Pierre lui répond, comme

nous le lisons dans l'Évangile de ce jour; « vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant, » et pour une Foi si manifeste et si prompte, il obtint la bénédiction de Notre Seigneur. Que dans une autre circonstance il demande aux Douze s'ils l'abandonneront comme les autres, Pierre lui répond : « Seigneur, à qui ironsnous? Vous avez les paroles de la vie éternelle; et nous croyons, et nous sommes assurés que vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant. » Après la Résurrection, saint Jean lui apprend que c'est le Christ qui est sur le rivage, et de la nacelle sur laquelle il pêchait, il s'élance aussitôt dans la mer, impatient d'arriver près de Lui. Ce ne sont pas là les seuls exemples qu'on pourrait citer de sa foi. Si jamais Foi fut désintéressée, et s'occupa de son Grand Objet, ce fut la Foi de Pierre. Si la Foi paraît quelque part différer de l'Évidence, et de ce que nous comprenons communément sous le nom de Raison, c'est dans l'exemple que Pierre nous en donne. S'il raisonnait, c'était quelquefois par défaut de Foi.«Voyant que le vent était fort, il craignit, »>< et c'est pour cela que le Christ l'appela «< homme de peu de foi. » Lorsqu'il demanda « Qui m'a touché ?»> Pierre et les autres raisonnèrent. « Maître, dirent-ils, la multitude vous presse et vous accable, et vous dites: « Qui m'a touché? » De même, lorsque le Christ lui annonça qu'il le suivrait un jour dans la voie des souffrances; « Pourquoi, lui dit Pierre, ne puis-je pas vous suivre maintenant? Et nous savons comment sa foi l'abandouna bientôt après.

La Foi et la Raison, dans l'histoire de Pierre, se contrastent donc d'une façon bien tranchée. Cepen

dant c'est Pierre, non pas Pierre le pêcheur de Galilée, mais l'Apôtre inspiré, qui, dans le texte, nous donne un précepte renfermant, dans son accomplissement légitime, un soigneux exercice de notre Raison, un exercice tant sur la Foi considérée comme un acte ou comme une habitude de l'âme, que sur l'Objet de la Foi. Nous devons non-seulement « rendre gloire au Seigneur Dieu dans nos cœurs,» non-seulement préparer au-dedans de nous un sanctuaire où puisse habiter notre Sauveur et où nous puissions nous-mêmes l'adorer; mais savoir tellement ce que nous faisons, être tellement maitres de nos pensées et de nos sentiments, tellement connaître ce que nous croyons et comment nous croyons, tellement nous rendre compte de nos idées et voir le terme où elles aboutissent, que nous puissions << toujours être prêts à répondre à tout homme qui nous demande raison de l'espérance qui est en nous. » Dans ces paroles, il y a pour nous, je pense, une recommandation claire, ou plutôt une injonction de donner à notre Religion la forme de symbole et d'Évidences.

Bien que la Foi soit la marque distinctive de l'Évangile et la simple élévation de l'âme vers le Dieu Invisible, sans raisonnement fait avec connaissance ou sans argument formel, il paraîtrait donc que l'homme peut justement, voire même religieusement, occuper son esprit à réfléchir sur sa Foi, à en examiner les motifs et l'Objet, à la revêtir des formes du langage, soit pour la défendre, soit pour la rendre recommandable, ou pour l'enseigner aux autres. Saint Pierre lui-même, en dépit de son ardeur et de sa vivacité,

nous donne dans sa propre personne quelques marques d'un semblable exercice de l'intelligence. En disant: Vous êtes le Christ, le fils du Dieu vivant, » il donna en quelque sorte à sa foi une forme dogmatique; en disant : « A qui irons-nous? vous avez les paroles de la vie éternelle,» il donua« une raison de l'espérance qui était en lui, » ou appuya sa foi sur

l'Évidence.

Rien ne ressemblerait plus à une théorie, rien ne serait plus faux que de supposer qu'une vraie Foi ne peut exister sans recevoir la forme d'un Symbole, et sans être basée sur l'Évidence; cependant, rien n'indiquerait une philosophie aussi étroite que d'affirmer qu'il faut soigneusement la séparer de toute formule dogmatique ou argumentative. Soutenir la dernière assertion, c'est enlever à la Religion le secours de la science théologique; soutenir la première, c'est prétendre que chaque enfant, chaque paysan doit être un théologien. La Foi ne peut exister sans motifs ni sans objet; mais il ne s'ensuit pas que tous ceux qui ont la Foi doivent vérifier et établir ce qu'ils croient, et comment ils croient. D'un autre côté, de ce qu'en fait elle ne peut être séparée de ses motifs et de son objet, il ne faut pas conclure qu'en les vérifiant elle cesse d'être une vraie Foi. L'âme, selon qu'elle aura réfléchi sur elle-même, pourra « rendre raison » de ce qu'elle croit et de ce qu'elle espère; et selon qu'elle n'aura pas ainsi réfléchi, elle deviendra, en proportion, incapable de le faire. Une telle connaissance ne peut pas être mauvaise, cependant elle ne peut pas être nécessaire, car bien que la réflexion soit une fa

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